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Rapport d'enquête aéronautique A05O0112

Mauvais réglage des tabs du compensateur de profondeur
du Raytheon/Hawker 800XP N829LX
exploité par Flight Options LLC
à l'aéroport international de Toronto / Lester B. Pearson (Ontario)
le



Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a enquêté sur cet événement dans le but de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n’est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales. Le présent rapport n’est pas créé pour être utilisé dans le contexte d’une procédure judiciaire, disciplinaire ou autre. Voir Propriété et utilisation du contenu.

Résumé

Le Raytheon 800XP immatriculé N829LX , numéro de série 258466, effectue son premier vol après des travaux de peinture et de remontage effectués par Flying Colours/Rapid Aircraft Repair Inc. à Peterborough (Ontario). L'avion décolle de Peterborough à destination de Buffalo (New York) aux États-Unis. Pendant la montée initiale, alors que la vitesse indiquée avoisine les 190 nœuds (KIAS), l'équipage note un problème de compensation en piqué. La vitesse est maintenue au dessous de 190 KIAS. L'équipage pilote manuellement et se déroute sur l'aéroport international Lester B. Pearson de Toronto pour pouvoir inspecter l'appareil. En approche sur Toronto, la gouverne de direction se met à vibrer puis se bloque. L'équipage déclare une situation d'urgence. L'avion se pose sans autre incident vers 13 h 48, heure avancée de l'Est. Une inspection révèle que les commandes du compensateur de profondeur sont mal réglées.

Renseignements de base

De bonnes conditions météorologiques de vol à vue (VMC) régnaient au moment de l'incident. La météo n'a joué aucun rôle dans l'incident.

Le commandant de bord était en place gauche. Il possédait une licence de pilote de ligne des États-Unis en état de validité ainsi qu'un certificat médical valable de classe 1 délivré le 17 mars 2005. En date de juin 2005, le commandant de bord totalisait environ 6029 heures de vol, dont 2280 sur type.

Le copilote était en place gauche. Il possédait une licence de pilote de ligne des États-Unis en état de validité ainsi qu'un certificat médical valable de classe 1 délivré le 27 avril 2005. En date de juin 2005, le copilote totalisait environ 8600 heures de vol, dont 1800 sur type.

Le 4 mai 2005, l'avion est arrivé chez Flying Colours/Rapid Aircraft Repair Inc. à Peterborough (Ontario) pour y être repeint. Flying Colours est un atelier de peinture d'aéronefs. Rapid Aircraft Repair Inc. est un organisme de maintenance agréé (OMA). Conformément aux procédures de Rapid Aircraft Repair Inc., l'avion a été inspecté à son arrivée et toutes les anomalies ont été notées. Cette opération a été effectuée par un technicien d'entretien d'aéronefs (TEA) principal qui possédait un pouvoir de certification - aéronefs et plusieurs années d'expérience sur ce type d'appareil. Par la suite, une équipe de TEA et d'apprentis s'est chargée du démontage de l'avion en prévision du décapage de la peinture.

Dans le cadre du démontage, les trappes du train d'atterrissage et les commandes de vol ont été déposées. Au moment de la dépose des gouvernes de profondeur, les biellettes de commande du compensateur de profondeur - deux sur chacun des stabilisateurs droit et gauche - ont elles aussi été déposées. La dépose de ces biellettes de commande n'était pas obligatoire mais, s'il n'y avait pas eu dépose, elles auraient pu être endommagées car, une fois la gouverne de profondeur déposée, elles dépassent de l'arrière du stabilisateur.

La dépose des biellettes de commande du compensateur de profondeur a été effectuée en desserrant les contre-écrous du raccord de l'embout à œillet de la biellette qui est fixé à la chape du vérin à vis, puis en dévissant les biellettes de commande du raccord de l'embout à œillet. Le TEA principal chargé de la dépose des biellettes a compté le nombre de tours complets nécessaires à leur dépose et a inscrit ce nombre sur une étiquette attachée solidement à chaque biellette (figure 1). Cette façon de faire devait aider au moment du remontage ultérieur de l'avion.

Figure 1. Vérin à vis du compensateur de profondeur
Figure of Vérin à vis du compensateur de profondeur

Après le décapage de la peinture, l'avion a été une nouvelle fois inspecté à la recherche d'anomalies qui auraient pu être cachées par la peinture, et les réparations requises ont été effectuées. Puis, il y a eu masquage et préparation de l'appareil en prévision de la peinture.

Après la peinture, l'avion a été préparé en vue du remontage, opération qui comprenait l'enlèvement de la totalité du ruban et du papier ayant servi à protéger les surfaces qu'il ne fallait pas peindre. Par la suite, l'avion a été remonté et préparé en vue de la livraison.

Pendant le remontage, les biellettes de commande du compensateur de profondeur ont été remises en place par revissage desdites biellettes aux embouts à œillet en faisant le même nombre de tours que celui utilisé au moment de la dépose des biellettes. Par la suite, les commandes de vol ont été vérifiées afin de s'assurer qu'elles se déplaçaient toutes dans le bon sens, puis les biellettes et leurs embouts à œillet ont été verrouillés en conséquence. Le directeur de la maintenance a effectué une inspection indépendante des systèmes de l'avion touchés par les travaux, les entrées pertinentes ont été faites et l'avion a été remis en service.

L'incident est survenu lors du premier vol effectué par le N829LX après les travaux de peinture. Au terme des travaux de peinture, l'équipage de conduite avait passé plusieurs heures à inspecter l'avion. Lors de cette inspection, une vérification du bon fonctionnement et du déplacement dans le bon sens de toutes les commandes de vol avait été faite. L'équipage n'avait rien noté d'anormal dans les commandes de vol, mais il avait trouvé deux petites anomalies sans rapport avec l'incident et un morceau de ruban-cache.

Après le vol de l'incident, l'avion a été mis en quarantaine jusqu'à ce qu'un inspecteur du BST, un inspecteur de l'assurance de la qualité de la compagnie Flight Options et des mécaniciens de cette compagnie puissent l'examiner. Dans le cadre de cet examen, un panneau d'accès sur la dérive a été déposé afin de permettre une vérification du réglage des tabs du compensateur de profondeur. Grâce à la dépose de ce panneau d'accès, il était possible d'atteindre le secteur des commandes de profondeur et d'y insérer une broche de réglage. Tous ont pu constater que le panneau d'accès, vis comprises, avait été peint alors qu'il était en place et qu'il n'avait jamais été déposé auparavant.

Pendant la vérification du réglage des commandes de vol, la gouverne de profondeur a été fixée en position neutre et le volant du compensateur de profondeur a été réglé à 35 degrés, conformément au manuel de maintenance. À la figure 504 de la rubrique 27-30-00 du manuel de maintenance, il est indiqué que les bords de fuite des tabs du compensateur de profondeur devraient affleurer avec le bord de fuite de la profondeur réglée de la façon indiquée ci-dessus. Toutefois, les bords de fuite des deux tabs du compensateur de profondeur de droite et de gauche se trouvaient à 0,250 pouce au-dessous du bord de fuite de la profondeur, ce qui se traduisait pour l'avion par une situation de compensation en cabré. Ensuite, le volant du compensateur a été tourné jusqu'à atteindre la compensation maximale en piqué (contre les butées mécaniques). Une fois le volant en butée, le bord de fuite des tabs du compensateur était toujours légèrement au-dessous du bord de fuite de la profondeur. C'est ainsi que, le compensateur étant mis à la position de plein piqué, le réglage faisait que l'avion se trouvait dans une situation de compensation en cabré.

La commande de direction et son système de compensation ont été déplacés à plusieurs reprises dans toute leur plage de débattement, mais aucune anomalie n'a été découverte. Par mesure de précaution, le carénage du panneau a été repositionné de manière à augmenter la distance entre le panneau des câbles et la commande de direction. De plus, la colonne à ressort de la direction a été lubrifiée.

L'article 571.02 du Règlement de l'aviation canadien (RAC) exige que toute personne qui exécute des travaux sur un aéronef le fasse conformément aux recommandations du constructeur ou à des pratiques équivalentes. Un examen des documents de l'avion et des bons de travail a montré qu'une signature avait été apposée par Flying Colours/Rapid Aircraft Repair Inc. pour certifier que toutes les commandes de vol avaient été installées et verrouillées conformément aux chapitres pertinents du manuel de maintenance de l'avion. Toutefois, les manuels de maintenance exigent que, au moment de la pose des commandes de vol, leur réglage soit vérifié. Pour vérifier le réglage, il faut se servir de broches de réglage et de cales de mesure de l'incidenceNote de bas de page 1. Et pour utiliser les broches de réglage, il aurait fallu déposer le panneau d'accès, ce qui n'a pas été fait. De plus, Flying Colours/Rapid Aircraft Repair Inc. ne possédait aucun ensemble de broches de réglage ou de cales de mesure de l'incidence. La compagnie a indiqué qu'elle pouvait en emprunter au besoin mais qu'elle avait jugé que ces articles n'étaient pas nécessaires pour les travaux à exécuter sur l'avion. L'explication tenait au fait qu'aucun problème dans les commandes de vol n'avait été signalé à l'arrivée de l'avion, que l'avion avait été remonté de façon à retrouver l'état qu'il avait à son arrivée et que le réglage ne devait pas avoir changé. Le réglage et la vérification des commandes de vol n'ont pas été effectués conformément au manuel de vol et, en conséquence, les travaux effectués sur l'avion ne respectaient pas les exigences de l'article 571.02 du RAC.

L'article 571.10 du RAC et l'avis de navigabilité C010Note de bas de page 2 exigent que les travaux qui dérangent les commandes moteur et les commandes de vol fassent l'objet d'une inspection, par au moins deux personnes, pour s'assurer du bon montage, du bon verrouillage et du bon sens de fonctionnement desdites commandes, et exigent également que les dossiers techniques renferment la signature de ces deux personnes. Cette procédure vise à garantir que les systèmes jouant un rôle critique sont remontés correctement avant que l'avion entreprenne un vol. L'inspection indépendante doit avoir lieu avant la certification après maintenance. Les entrées relatives au N829LX indiquaient que cette inspection avait été effectuée. Toutefois, l'enquête a montré que la personne ayant procédé à l'inspection s'était intéressée au bon verrouillage mais ne s'était pas assurée du bon montage et du bon sens de fonctionnement.

Faits établis

Faits établis quant aux causes et aux facteurs contributifs

  1. Les tabs du compensateur de profondeur n'ont pas été réglés conformément au manuel de maintenance de l'avion, ce qui s'est traduit par un mauvais réglage et par un problème de compensation en piqué.
  2. La maintenance a été effectuée sans respecter les normes de navigabilité pertinentes et les exigences de l'article 571.02 du Règlement de l'aviation canadien.
  3. La vérification indépendante des commandes n'a pas été effectuée conformément aux normes décrites dans le Règlement de l'aviation canadien et dans l'avis de navigabilité, si bien que le mauvais réglage des commandes n'a pas été décelé.
  4. Des déclarations incorrectes de certification après maintenance ont été faites dans les documents de l'avion.

Mesures de sécurité

Le 10 juin 2005, Transports Canada a signifié à Rapid Aircraft Repair Inc. un avis de suspension par mesure de prévention. Le 14 juin 2005, il a effectué une vérification spéciale de Rapid Aircraft Repair Inc. Le 21 juin 2005, il lui a signifié une suspension modifiée. Le 27 juin 2005, il a annulé l'avis de suspension par suite de la mise en œuvre de mesures correctives immédiates.

Le 22 août 2005, Transports Canada a reçu de Rapid Aircraft Repair Inc. un plan de mesures correctives à long terme.

Après l'incident et la vérification effectuée par Transports Canada, Rapid Aircraft Repair Inc. a engagé un directeur de l'assurance de la qualité et l'a désigné comme étant la personne responsable de la maintenance. La compagnie a ensuite pris les mesures suivantes à l'égard de la maintenance des aéronefs :

Le présent rapport met un terme à l'enquête du Bureau de la sécurité des transports (BST) sur cet événement. Le Bureau a autorisé la publication du rapport le .