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Rapport d'enquête aéronautique A15Q0120

Perte de maîtrise et impact avec le sol
Air Saguenay (1980) inc.
de Havilland DHC-2 Mk. 1 (Beaver), C-FKRJ
7 nm au nord de Tadoussac (Québec)



Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a enquêté sur cet événement dans le but de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n’est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales. Le présent rapport n’est pas créé pour être utilisé dans le contexte d’une procédure judiciaire, disciplinaire ou autre. Voir Propriété et utilisation du contenu.

Résumé

Le de Havilland DHC-2 Mk. 1 Beaver équipé de flotteurs (immatriculé C-FKRJ, numéro de série 1210), exploité par Air Saguenay (1980) inc., effectuait un vol touristique dans la région de Tadoussac (Québec) selon les règles de vol à vue. À 11 h 4, heure avancée de l'Est, l'appareil a décollé de sa base située au lac Long (Québec) pour effectuer un vol de 20 minutes, avec 1 pilote et 5 passagers à son bord. À 11 h 27, sur le trajet du retour, à quelque 2,5 milles marins au nord-nord-ouest de sa destination (7 milles marins au nord de Tadoussac), l'appareil a décroché dans un virage à grande inclinaison. L'hydravion, en descente verticale, a percuté un affleurement rocheux. L'appareil a subi des dommages importants dans la collision avec le sol et a été consumé par l'incendie qui s'est déclaré après l'impact. Les 6 occupants ont perdu la vie dans l'accident. Aucun signal de la radiobalise de repérage d'urgence n'a été capté.

1.0 Renseignements de base

1.1 Déroulement du vol

Depuis 3 ans, Air Saguenay (1980) inc. (Air Saguenay), en partenariat avec Aviation du Fjord et en collaboration avec Croisières AML, effectuait des vols touristiques au-dessus de la région de Tadoussac (Québec) à partir du lac Long (Québec)Note de bas de page 1. Air Saguenay exploitait l'hydravion alors qu'Aviation du Fjord assurait la vente des billets et le suivi des vols.

Habituellement, les vols duraient environ 20 minutes et consistaient à effectuer une boucle qui amenait l'avion à survoler le parc marin du Saguenay–Saint-Laurent, où se fait de l'observation de baleines (annexe A), puis l'embouchure du Saguenay avant de bifurquer dans les terres afin de permettre aux touristes d'observer la topographie, la flore et, à l'occasion, la faune sauvage de la région.

Le matin du vol de l'accident, vers 8 hNote de bas de page 2, à l'hydrobase du lac Long, le pilote a effectué les préparatifs pré-vol en vue du premier vol touristique prévu à 9 h. Il n'a signalé aucune anomalie à la suite de ces préparatifs.

Le pilote a effectué 3 vols sans incident avant le vol à l'étude. Vers 11 h, les 5 passagers sont montés à bord de l'hydravion. Le pilote a démarré le C-FKRJ, qui a quitté l'embarcadère à 11 h 2, puis décollé à 11 h 4.

Après le décollage, le C-FKRJ est monté à 2000 pieds au-dessus du niveau de la mer (ASL), puis s'est dirigé vers le sud au-dessus du parc marin du Saguenay–Saint-LaurentNote de bas de page 3, qu'il a survolé entre 11 h 7 et 11 h 16. Par la suite, il est passé au-dessus de l'embouchure du fjord du Saguenay, puis a bifurqué vers le nord et a quitté la zone restreinte du parc marin (figure 1).

Figure 1. Trajectoire du vol selon les données du système de positionnement mondial (Source : Google Earth, avec annotations du BST)
Trajectoire du vol selon les données du système de positionnement mondial

À ce moment, le C-FKRJ est descendu à une altitude d'environ 1100 pieds ASL en s'approchant des collines dont les sommets culminent à plus ou moins 1000 pieds ASL. Juste au sud du village de Sacré-Cœur (Québec), l'appareil a viré vers le nord-est et est passé au-dessus des collines à quelque 100 pieds au-dessus du sol (AGL) avant de retourner vers le lac Long. Alors que l'appareil passait le sommet d'une colline à environ 110 pieds AGL, le pilote a amorcé un virage à gauche à grande inclinaison. À mi-virage, le C-FKRJ a subi un décrochage aérodynamique menant à une autorotation de mise en vrille et, à 11 h 27, en descente verticale, il a percuté un affleurement rocheux sur le sommet d'une colline aux coordonnées 48°15.405′ N et 069°41.597′ O (figure 2).

Figure 2. Dernier virage selon les données du système de positionnement mondial (Source : Google Earth, avec annotations du BST)
Dernier virage selon les données du système de positionnement mondial

1.2 Tués et blessés

Tableau 1. Tués et blessés
  Équipage Passagers Autres Total
Tués 1 5 6
Blessés graves
Blessés légers / indemnes
Total 1 5 6

1.3 Dommages à l'aéronef

À la suite de l'impact avec l'affleurement rocheux, l'appareil a été détruit, il s'est enflammé, et la cabine a été consumée par l'incendie.

1.4 Autres dommages

Environ 106 litres (170 livres) de carburant et environ 24 litres d'huile moteur se sont déversés et ont été consumés par l'incendie après impact.

1.5 Renseignements sur le personnel

1.5.1 Généralités

Tableau 2. Renseignements sur le personnel
Licence de pilote Pilote professionnel - avion
Date d'expiration du certificat médical 01 décembre 2015
Heures totales de vol 5989
Heures de vol sur avions à flotteurs 5549
Heures de vol sur type (DHC-2) 4230
Heures de vol au cours des 90 derniers jours 251
Heures de vol au cours des 30 derniers jours 117,6
Heures de service avant l'événement 3
Heures hors service avant la période de travail 11 h 45 min

Le pilote possédait les licences et les qualifications nécessaires pour effectuer le vol, conformément à la réglementation en vigueur. Le pilote a obtenu sa licence de pilote privé en 2000 et a réussi une qualification sur hydravion en juin 2000. Le pilote a obtenu sa licence de pilote professionnel en avril 2001.

Le pilote a été embauché comme pilote de brousse par Air Saguenay en 2001. Après son recrutement, il a reçu, entre autres, une formation de familiarisation avec les politiques et les procédures de la compagnie.

Air Saguenay considérait le pilote comme étant dévoué, discipliné et chevronné. La compagnie l'avait nommé pilote en chef adjoint. À ce titre, ses fonctions comprenaient le rôle d'instructeur de vol sur le DHC-2 Mk. 1 (DHC-2) depuis environ 10 ans. Il a également participé aux essais en vol requis pour la spécification d'exploitation pour le transport de charge externe. Ces essais consistaient, entre autres, à évaluer les caractéristiques de décrochage de l'avion dans différentes conditions. En conséquence, le pilote devait bien connaître le comportement du DHC-2 en décrochage dans des conditions variées.

C'était son deuxième été comme pilote affecté à l'hydrobase du lac Long.

1.5.2 Formation

En mai 2015, le pilote a suivi sa formation périodique, qui comprenait une formation au sol et un entraînement en vol. Au terme de sa formation, le pilote a réussi l'examen théorique et la vérification de compétenceNote de bas de page 4 en vol sur le DHC-2. Lors de sa vérification de compétence, administrée par le pilote en chef de la compagnie, le pilote a démontré avec succès être en mesure d'exécuter notamment le vol lent, les sorties de décrochage et les virages inclinés à 30° et à 45°. Depuis sa formation périodique, le pilote avait accumulé 310 heures de vol, dont 117,6 dans les 30 jours précédant l'accident.

1.5.3 Temps de service de vol et périodes de repos

Après une période de repos de 7 jours, le pilote est revenu au travail le 20 juillet 2015. Sauf le 11 août, le pilote a volé tous les jours jusqu'au 16 août inclusivement. Selon les documents de la compagnie, le pilote devait être au repos du 17 au 20 août afin de satisfaire aux limites minimales réglementaires de temps de repos, soit 3 périodes d'au moins 24 heures de repos par période de 30 jours consécutifs. Ainsi, faute de pilote, les vols touristiques du 17 août auraient dû être annulés. Or, les renseignements obtenus indiquent que le 17 août, le pilote en cause dans l'accident a effectué 9 vols totalisant 5,6 heures.

Les heures des vols effectués le 17 août avec le C-FKRJ n'ont pas été consignées dans le carnet de route de l'appareil tel que requis par la réglementationNote de bas de page 5 en vigueur, ni dans le carnet de vol du pilote. En outre, ces heures n'ont pas été enregistrées dans le registre de suivi de temps de vol et de service de volNote de bas de page 6.

Le 21 août, après 3 jours de congé, le pilote a effectué un vol local à partir du lac Sébastien (Québec). Le matin du 22 août, il est retourné au lac Long d'où il a effectué plusieurs vols touristiques les 22 et 23 août (la journée de l'accident).

Dans les 30 jours précédents, le pilote avait travaillé 27 jours; la durée moyenne de son temps de service de vol et de ses heures de vol était respectivement de 10,1 heuresNote de bas de page 7 et de 4,4 heuresNote de bas de page 8 par jour. Une journée typique de travail débutait généralement vers 8 h 30 et se terminait vers 19 h 30. Pendant la durée de sa période de service, le pilote vivait dans un chalet, fourni par Air Saguenay, au lac Long. Le pilote y vivait seul. Il n'a donc pas été possible de recueillir des renseignements concernant le sommeil du pilote.

1.6 Renseignements sur l'aéronef

Le C-FKRJ était équipé d'une seule commande de vol pouvant pivoter du côté gauche au côté droit dans le poste de pilotage. Le C-FKRJ était équipé de flotteurs EDO 58-4580 conformément au certificat de type A-22 (figure 3).

Figure 3. C-FKRJ (Source : J. Arcelin)
C-FKRJ

Le modèle DHC-2 Mk. 1 Beaver (DHC-2) a été conçu par de Havilland Aircraft of Canada Ltd., qui en a commencé la construction au milieu des années 1940. Le DHC-2 a été spécifiquement développé pour être exploité comme avion de brousse au Canada. Cet appareil équipé de systèmes simples a une solide réputation de fiabilité dans des conditions difficiles. Présentement, 382 DHC-2 sont immatriculés au Canada, dont 223 en exploitation commerciale.

Tableau 3. Renseignements sur l'aéronef
Constructeur de Havilland Aircraft of Canada Ltd.
Type et modèle DHC-2 Mk. 1
Année de construction 1956
Numéro de série 1210
Date d'émission du certificat de navigabilité 24 juillet 1987
Total d'heures de vol cellule 25 223,7
Type de moteur (1) P&W R-985-AN-14B Radial, 9 cylindres, refroidi à l'air
Type d'hélice ou de rotor (1) Hamilton Standard 22D30-403
Masse maximale autorisée au décollage 2313 kg (5090 livres)
Type(s) de carburant recommandé(s) 100LL
Type de carburant utilisé 100LL

Le 3 juin 2015, le moteur a été réinstallé sur le C-FKRJ à la suite d'une remise à neuf, et le 3 août 2015, le C-FKRJ a fait l'objet d'une inspection périodique dite « de 100 heures ». Au moment de l'accident, le C-FKRJ avait accumulé 71,7 heures depuis la dernière inspection de 100 heures et le moteur totalisait 171,4 heures d'utilisation depuis son installation.

La dernière intervention de maintenance avait été effectuée le 22 août 2015 à Baie-Comeau et consistait à resserrer un écrou desserré sur le générateur qui avait causé le déclenchement du coupe‑circuit du générateur. Cette rectification a été consignée dans les carnets techniques et la certification après maintenance a été effectuée.

Rien n'indique qu'il y ait eu une défaillance de la cellule ou un mauvais fonctionnement d'un système pendant le vol.

1.6.1 Commandes de vol

Figure 4. Commandes de vol (Source : Manuel de vol du DHC-2 Beaver, figure 1-5, avec annotations du BST)
Commandes de vol

Les commandes de vol primaires du DHC-2 sont conventionnelles et sont contrôlées par un manche de commande et des palonniers. Le C‑FKRJ n'avait pas de volant du côté droit (copilote). Toutefois, il était doté d'un manche de commande dont la partie supérieure, qui comprend le volant, peut basculer de gauche à droite et est maintenue en position par un verrou dans la charnière (figure 4). Le basculement du volant en vol rectiligne ne dérange pas le contrôle ou l'équilibre de l'appareil.

1.6.2 Masse et centrage

La masse maximale autorisée au décollage était de 5090 livres. Le formulaire de masse et centrage du vol n'a pas été retrouvé; il est possible qu'il se trouvait dans l'appareil. Afin de savoir si la masse et le centrage de l'appareil avaient pu affecter les caractéristiques de vol et les performances du C-FKRJ, la masse des occupants et sa répartition à bord de l'avion ont été évaluées. Pour calculer la masse des occupants, les enquêteurs ont utilisé les masses normaliséesNote de bas de page 9 homologuées d'étéNote de bas de page 10, et la masse du carburant a été estimée en fonction des habitudes de ravitaillement avant le premier vol de la journée. Le BST a estimé la masse de l'hydravion à 4765 livres au décollage et à 4705 livres au moment de l'accidentNote de bas de page 11. En conséquence, l'hydravion aurait été exploité conformément aux limites prescrites par le constructeur.

1.6.3 Radiobalise de repérage d'urgence

L'appareil était muni d'une radiobalise de repérage d'urgence (ELT) automatique fixe (Ameri‑King, modèle AK-451-20) transmettant sur les fréquences 406 MHz et 121,5 MHz. Elle était installée juste derrière le compartiment à bagage du côté droit de l'appareil et a été complètement consumée par l'incendie. Malgré l'impact important le long de l'axe longitudinal du C-FKRJ, aucun signal d'ELT n'a été captéNote de bas de page 12 par le système Cospas-Sarsat, ni entendu ou signalé pendant les recherches.

1.6.4 Dérive ventrale et dérives de stabilisateurs

Le C-FKRJ était équipé de dérives de stabilisateurs (Seafin)Note de bas de page 13 de Kenmore Air Harbor Inc. (Kenmore), en remplacement de la dérive ventrale, selon les instructions du certificat de type supplémentaire (CTS) SA456NW. Kenmore a vendu plusieurs trousses de modification pour l'installation de dérives Seafin pour d'autres DHC-2 appartenant à Air Saguenay, mais pas spécifiquement pour le C-FKRJ.

L'enquête a révélé que le stabilisateur muni de dérives Seafin installé sur le C-FKRJ provenait d'un autre DHC-2 de la compagnie. Toutefois, aucune inscription aux dossiers techniques du C-FKRJ n'indique le remplacement du stabilisateur horizontal d'origine par un autre qui, lui, était équipé de dérives Seafin.

L'enquête a démontré que malgré quelques lacunes datant possiblement de plus de 20 ans, les dossiers récents indiquent que l'aéronef était entretenu conformément à la réglementation en vigueur et aux procédures approuvées.

1.6.4.1 Historique de la dérive ventrale et des dérives de stabilisateurs (Seafin)

Depuis la certification initiale du DHC-2 en 1948, il y a eu de la confusion quant à l'obligation d'installer une dérive ventrale lorsque l'aéronef est équipé de flotteurs, car certains croyaient à tort que son installation était optionnelle (annexe B). Dans certains cas, la dérive ventrale avait été retirée alors qu'elle était requise, ce qui réduisait la stabilité directionnelle de ces appareils. Une étude approfondie de l'historique de la dérive ventrale et des dérives Seafin a été effectuée (annexe B). En résumé :

Dans l'accident à l'étude, le C-FKRJ était équipé de flotteurs EDO 58-4580 et n'avait pas fait l'objet d'une modification pour l'augmentation de la masse maximale au décollage à 5500 livres. Par conséquent, le remplacement de la dérive ventrale par des dérives Seafin sur le C-FKRJ était conforme aux exigences du CTS SA456NW de Kenmore.

1.6.5 Décrochage du DHC-2

Le DHC-2 a été conçu et certifié conformément aux British Civil Airworthiness Requirements, publiées en 1945. Les exigences de certification particulières relatives aux caractéristiques de décrochage mentionnent entre autres que si le décrochage survient pendant un vol rectiligne, il ne devrait y avoir de tendance ni au basculement latéral brusque ni à la vrille. De plus, l'appareil devrait donner un avertissement clair de décrochage, par des vibrations ou d'autres indications, en vol rectiligne ou en virage. On avait jugé que les indications aérodynamiques signalaient clairement l'imminence d'un décrochage.

Le manuel de vol du DHC-2 indique par ailleurs que dans un virage à grande inclinaison, le facteur de charge peut atteindre la charge limite et augmenter le risque d'un décrochage inopiné. Par conséquent, le manuel présente un tableau fournissant la vitesse de décrochage et le facteur de charge correspondant selon l'angle d'inclinaison latérale de l'appareil (figure 5).

Figure 5. Vitesse de décrochage et facteur de charge selon l'angle d'inclinaison (Source : Viking Air Limited, DHC-2 Beaver Airplane Flight Manual, PSM1-2-1, révision 11, 8 juillet 2002, section 4.6.1, p. 36)
Vitesse de décrochage et facteur de charge selon l'angle d'inclinaison

Selon le manuel de vol, « [traduction] le décrochage est doux dans toutes les conditions normales de charge et de configuration des volets et peut être anticipé par de légères vibrations ». Toutefois, lors d'un décrochage, si on laisse l'aéronef exécuter un mouvement de lacet, il a également tendance à effectuer un roulis. Le pilote doit immédiatement prendre des mesures correctives afin d'empêcher le mouvement de roulisNote de bas de page 16.

Également selon le manuel de vol, le DHC-2 décroche à 45 mi/h vitesse indiquée (IAS) lorsque les volets sont à la position atterrissage et à 60 mi/h IAS avec les volets relevés.

1.6.5.1 Essais en vol

Des entreprises de fabrication en aéronautique ont effectué des essais en vol du DHC-2 pour déterminer les caractéristiques d'un décrochage par suite de modifications importantes à la structure des ailes ou en prévision d'une telle modification. Le résultat de ces essais diffère en fonction des modifications apportées à l'appareil testé. Le C-FKRJ n'avait pas subi de telles modifications.

La société Aeronautical Testing Service Inc.Note de bas de page 17 a effectué des essais en vol d'un DHC-2 non modifié dans le cadre du processus de conception d'un générateur de tourbillons pour ce type d'aéronef.

Les essais visaient à évaluer les caractéristiques de décrochage, les avertissements de décrochage et la maîtrise des décrochages dans une vaste gamme de configurations de masse et centrage, à l'origine non exigées spécifiquement en vertu des British Civil Airworthiness Requirements. Le rapport sur ces essais en vol indique qu'avec un centrage avant, comme c'était le cas dans l'événement à l'étude, les caractéristiques de décrochage de l'appareil se sont avérées acceptables.

TCAC a également effectué des essais en vol du DHC-2 afin d'évaluer les caractéristiques de décrochage de l'appareil. Les ingénieurs d'essai en vol ont qualifié le décrochage de doux et ont signalé une sortie de décrochage conventionnelle.

1.6.6 Avertisseurs de décrochage

Un avertisseur de décrochage qui procure une alarme visuelle et sonore est disponible pour le DHC-2, sous forme d'ensemble de modification (MOD 2/973) approuvé par TCACNote de bas de page 18. Le C‑FKRJ n'en était pas muni.

1.7 Renseignements météorologiques

Il n'y a aucune station météorologique au lac Long. Selon les témoignages, les conditions météorologiques dans la région du vol au moment de l'accident étaient propices au vol à vue, avec un ciel dégagé et des vents calmes. La station météorologique automatique la plus proche, située à 10 milles marins (nm) au sud-est (au centre du fleuve Saint-Laurent) rapportait des vents calmes et une température de 16 °C au moment du vol. Le message d'observation météorologique régulière de 11 h à l'aéroport de Bagotville (Québec) (CYBG)Note de bas de page 19 rapportait un vent de l'est à 4 nœuds (calme), une visibilité de 25 milles terrestres, quelques nuages à 3000 pieds et une couche de cirro-stratus couvrant ¼ du ciel à 26 000 pieds, et une température de 21 °C.

1.8 Aides à la navigation

Le pilote utilisait, entre autres, un système de positionnement mondial (GPS) personnel pour naviguer au-dessus de la région du vol.

Selon les données enregistrées par le GPS, le C-FKRJ a suivi pratiquement la même trajectoire que celle des vols précédents. L'appareil survolait systématiquement le parc marin du Saguenay–Saint-Laurent (annexe A) à l'altitude prescrite avant d'amorcer sa descente en direction de Sacré-Cœur pour revenir par la suite au lac Long.

1.9 Communications

Le vol de l'accident s'est déroulé dans un espace aérien non contrôlé, c'est-à-dire sans services de contrôle de la circulation aérienne (ATC). La radio de l'hydravion fonctionnait normalement au moment du décollage. Les communications s'effectuaient sur la fréquence 123,2 MHz. Habituellement, le pilote effectuait 3 communications radio lors d'un vol : avant de décoller, en montée initiale, et en rapprochement.

Lors du vol de l'accident, le pilote a signalé son intention de décoller du lac Long. Ensuite, une fois en vol, il a annoncé son intention de monter à 2000 pieds en direction du parc marin du Saguenay–Saint-Laurent en passant au-dessus de la région du lac Gobeil (Québec). C'est la dernière transmission connue de l'appareil. Le pilote n'a signalé aucun problème avant l'accident.

1.10 Renseignements sur l'aérodrome

L'hydrobase du lac Long est située à 4,6 nm au nord-nord-est de Tadoussac et était le point de rencontre pour les clients désirant faire un vol touristique dans la région.

1.11 Enregistreurs de bord

L'aéronef n'était muni d'aucun enregistreur de bord, que ce soit des données de vol (FDR) ou des conversations de poste de pilotage (CVR), et la réglementation en vigueur n'en exigeait aucun.

1.12 Renseignements sur l'épave et sur l'impact

Après avoir percuté un affleurement rocheux, l'appareil a pris feu et la cabine a été détruite par l'incendie après impact (figure 6). Faute de survivants ou de témoins et en raison de la nature destructrice de l'incendie, il n'a pas été possible de réunir d'éléments de preuve relatives à la source de l'incendie, au déversement de carburant et à la propagation de l'incendie.

Figure 6. Site de l'accident
Site de l'accident

Cela dit, les réservoirs de carburant principaux du DHC-2 se trouvent directement sous le plancher de la cabine des passagers, entre les points de fixation du train d'atterrissage principal. À cet endroit, les réservoirs de carburant sont très vulnérables aux dommages en cas d'accident, comme une pénétration du train d'atterrissage, et ils exposent les occupants à un front de flamme si le carburant prend feu. De plus, de gros câbles d'alimentation électrique à courant continu qui courent dans la partie inférieure du fuselage le long des réservoirs de carburant peuvent devenir une source d'allumage s'ils sont endommagés par un impact.

L'épave reposait à la verticale, nez vers le bas. Le ventre de l'appareil s'appuyait sur un affleurement rocheux. Le moteur s'est séparé de l'appareil sous les forces de l'impact et a été trouvé en contrebas à environ 8 mètres. L'hélice, encore attachée au moteur, était fortement endommagée. Les 2 pales étaient pliées et tordues; l'une d'elles était rompue et a été retrouvée sous l'épave.

Pendant la descente, l'hélice a entaillé un arbre à des intervalles égaux d'environ 81 cm à 6 reprises avant de heurter le sol. Les ailes reposaient au sol, l'aile droite située entre 2 arbres rapprochés, dont les branches n'ont pas été endommagés lors de la descente de l'appareil. Les marques au sol et l'absence de dommages à la végétation environnante correspondent à une descente verticale du C-FKRJ.

1.12.1 Examen de laboratoire du BST

Le C-FKRJ a été examiné sur les lieux de l'accident et à nouveau au Laboratoire technique du BST à Ottawa (Ontario) en présence d'un représentant de Viking Air Limited (Viking), le titulaire du certificat de type, et d'un représentant d'Air Saguenay.

1.12.1.1 Continuité des commandes de vol

Les divers circuits des commandes de vol situés au niveau de la cabine ont été endommagés par les forces d'impact et par l'incendie après impact. Cependant, il a été possible d'établir la continuité des commandes du gouvernail de profondeur, du gouvernail de direction et de la quasi-totalité des volets et des ailerons. Quelques composants de la partie intérieure des commandes de l'aileron droitNote de bas de page 20 et des commandes de volets se trouvant au plafond de la cabine ont été détruits dans l'incendie après impact. En raison des dommages causés par l'incendie, il n'a pas été possible d'établir la position des volets au moment de l'impact. Par ailleurs, l'examen n'a révélé aucune anomalie qui aurait pu nuire au fonctionnement normal du système de commande de vol.

Les dommages observés sur le verrou de la charnière et sur le manche de commande de vol correspondent à ce qu'aurait causé une déformation vers l'avant alors que le volant était en position à gauche (côté pilote) au moment de l'impact.

1.12.1.2 Extraction des données du système de positionnement mondial

Le GPSNote de bas de page 21 appartenant au pilote a été retrouvé sur le site de l'accident et été envoyé au Laboratoire technique du BST aux fins d'extraction des données de volNote de bas de page 22. La mémoire du GPS contenait les données des 20 vols effectués à partir du 17 août 2015. Le GPS a enregistré la date, l'heure, la position et l'altitude à toutes les 5 secondes.

1.12.1.3 Analyse des données système de positionnement mondial

Une analyse des données brutes du GPS a été réalisée pour déterminer la trajectoire précise du dernier virage du vol de l'accident et comparer ce virage aux virages des vols précédents (sections 1.16.1 et 1.16.2 ci-dessous).

1.12.1.4 Extraction des données de la mémoire non volatile

Un téléphone intelligent, un lecteur audionumérique, une caméra numérique ainsi qu'une carte mémoire Secure Digital ont été retrouvés sur le site. Puisque le mot de passe du téléphone n'était pas connu, il n'a pas été possible d'extraire les données qu'il contenait. Il n'a pas été possible non plus d'accéder aux données des autres dispositifs en raison des dommages causés par l'incendie.

1.12.1.5 Examen des instruments

L'examen des instruments de bord a été limité par l'étendue des dommages causés par la force de l'impact avec le sol et l'incendie après impact.

Le cadran du tachymètre était calciné et l'aiguille était coincée à 3750 tours par minute (tr/min). Faute de marques témoins, rien n'indique si cette position de l'aiguille correspond à sa position au moment de l'impact (voir la section 1.12.1.6 ci-dessous).

L'aiguille de l'indicateur du taux de descente indiquait 980 pieds par minute. Toutefois, en raison de la sensibilité inhérente de l'instrument, le mouvement de l'aiguille est sujet à des fluctuations rapides lorsqu'un déplacement perpendiculaire à l'axe longitudinal de l'appareil survient au moment de l'impact. Par conséquent, la position de l'aiguille n'indique pas nécessairement le taux de descente juste avant l'impact.

L'aiguille de l'indicateur de vitesse était brisée, la partie de l'aiguille reliée à son engrenage se trouvant à une position équivalant à 68 mi/h. La précarité du mécanisme restant ne permet pas de conclure hors de tout doute quelle était la vitesse de l'avion au moment de l'impact. Toutefois, la position de l'aiguille se trouve dans la plage possible au début d'une récupération à la suite d'une mise en vrille.

1.12.1.6 Examen de l'hélice

L'expertise effectuée sur l'hélice n'a révélé aucune anomalie qui aurait pu indiquer un fonctionnement anormal.

L'hélice a entaillé un arbre à 6 reprises juste avant l'impact, ce qui laisse croire que le moteur produisait de la puissance à ce moment. Selon les calculs du laboratoire du BST, le régime moteur est estimé à 1160 tr/min, donc le moteur aurait été à faible puissance juste avant l'impact. Toutefois, faute d'enregistreur de données de vol, il n'a pas été possible de quantifier le niveau de puissance.

1.13 Renseignements médicaux et pathologiques

L'examen du dossier médical TCAC du pilote n'a révélé aucun facteur médical qui aurait pu avoir une incidence sur le rendement du pilote.

Le corps du pilote a fait l'objet d'une autopsie et d'analyses toxicologiques. Le pathologiste judiciaire a déterminé qu'un polytraumatisme contondant était la cause du décès. Autrement dit, les blessures subies lors de l'accident ont mené au décès du pilote. Par ailleurs, l'autopsie a révélé une maladie coronarienne athérosclérotiqueNote de bas de page 23 qui aurait pu provoquer un malaiseNote de bas de page 24.

1.14 Incendie

L'incendie après impact a complètement détruit l'habitacle de l'appareil avant l'arrivée des secouristes.

1.15 Questions relatives à la survie des occupants

L'agent au sol chargé de la billetterie a tenté sans succès de communiquer avec l'appareil quand la durée du vol a dépassé la durée normale. L'absence de communication pouvait toutefois s'expliquer par les limites de la portée optique des ondes radio lorsque l'appareil vole à basse altitude.

Une fois que l'avion était en retard de plus de 30 minutes, l'agent a informé Air Saguenay, et la compagnie a enclenché les procédures d'urgence. Air Saguenay a dépêché 2 avions vers le lac Long pour amorcer les recherches et a avisé le Centre conjoint de coordination des opérations de sauvetage (CCCOS) Halifax que le C-FKRJ était manquant.

À 13 h 17, un avion CC-130 Hercules a été dépêché sur les lieux, et à 13 h 21, un hélicoptère CH-146 Griffon a été affecté à la mission de sauvetage.

Vers 13 h 30, les avions d'Air Saguenay ont localisé l'épave du C-FKRJ et sa position a été relayée au CCCOS Halifax.

À 14 h 30, le CC-130 a survolé le site de l'accident.

À 15 h 10, le CH-146 est arrivé sur les lieux.

C'est à 15 h 17 que les premiers sauveteursNote de bas de page 25 sont arrivés sur les lieux de l'accident. Ils ont constaté qu'il n'y avait aucun survivant.

Dans l'appareil, l'espace vital a été éliminé par les forces d'impact, et tous les occupants sont morts sur le coup. L'accident ne laissait aucune chance de survie. L'incendie intense qui a suivi a détruit tous les sièges, les ceintures et leurs ancrages.

1.16 Essais et recherche

1.16.1 Analyse du dernier virage précédant l'accident

Les données brutes enregistrées aux 5 secondes du GPS ont servi au calcul de la trajectoire du C-FKRJ pendant le dernier virage de l'avion. Ce calcul de trajectoire a permis de déterminer la position du C-FKRJ à chaque seconde et ainsi d'établir l'angle d'inclinaison de l'appareil au moment de la perte de maîtrise.

Le résultat des calculs indique que l'avion a amorcé son dernier virage à 11 h 26 min 49 s, à une altitude de 1120 pieds ASL, soit quelque 110 pieds AGL (figure 7). L'augmentation de l'angle d'inclinaison de l'avion a fait passer le rayon du virage de 400 pieds à 275 pieds. À l'amorce du virage, la vitesse de l'appareil est passée de 73 mi/h à 85 mi/h, alors que l'inclinaison s'accentuait.

Figure 7. Dernier virage à la fin du dernier vol (Source : Google Earth, avec annotations du BST)
Dernier virage à la fin du dernier vol

Par la suite, la vitesse de l'appareil a progressivement diminué jusqu'à 60 mi/h, avec un angle d'inclinaison d'environ 50° à mi-virageNote de bas de page 26. Pendant le virage, l'altitude a augmenté d'environ 40 pieds et, compte tenu des variations de la hauteur du relief autour du sommet de la colline, l'appareil se trouvait à quelque 175 pieds au-dessus du site de l'accident lorsqu'il a subi un décrochage aérodynamique. Il a percuté le sol à 11 h 27 min 7 s.

1.16.2 Analyse des trajectoires des vols précédents

L'analyse des données GPSNote de bas de page 27 indique que le trajet du vol de l'accident était sensiblement similaire aux trajets des 20 derniers vols touristiques effectués par le pilote (figure 8). On remarque que le pilote effectuait régulièrement des vols à basse altitude, dont certains comportaient des virages à grande inclinaison après avoir survolé la réserve faunique. À titre d'exemple, les 4 vols effectués le jour de l'accident sont passés par Sacré-Cœur pour ensuite survoler une colline à basse altitude (entre 45 et 136 pieds AGL).

Figure 8. Trajectoires des vols de la journée de l'accident (Source : Google Earth, avec annotations du BST)
Trajectoires des vols de la journée de l'accident

Six jours avant l'accident (le 17 août 2015), le pilote avait effectué 12 survols à basse altitude, dont 8 au-dessus du site de l'accident, où la présence d'une famille d'ours avait été signalée (figure 9). Pendant les virages, la hauteur du C-FKRJ se situait entre 150 et 350 pieds AGL, sa vitesse, entre 56 et 74 mi/h, et les angles d'inclinaison, entre 16° et 45°.

Figure 9. Vols du 17 août 2015 (Source : Google Earth, avec annotations du BST)
Vols du 17 août 2015

Généralement, les volets sont utilisés lors de manœuvres (virages) autour d'un point d'intérêt au sol. Toutefois, les données GPS ne permettent pas d'établir la configuration de l'appareil lors des vols enregistrés. Ainsi, la marge de décrochage a été calculée en fonction de l'angle d'inclinaison et de la vitesse de décrochage du C-FKRJ sans volets. Il est important de souligner que ces calculs ne peuvent servir qu'à des fins de comparaison des virages, puisqu'il n'est pas possible d'établir la marge précise de chaque virage sans connaître la position des volets. Ils ont démontré que le pilote volait régulièrement à des vitesses sous la vitesse de décrochage sans volets lors de virages à basse altitude.

1.16.3 Rapports de laboratoire du BST

Le BST a complété les rapports de laboratoire suivants dans le cadre de la présente enquête :

1.17 Renseignements sur les organismes et sur la gestion

1.17.1 Air Saguenay (1980) inc.

Air Saguenay exploite plusieurs types d'hydravion, dont le DHC-2, en vertu des sous‑parties 2 et 3 de la partie VII du Règlement de l'aviation canadien (RAC). L'exploitation de ces appareils s'effectue à partir de sa base principale située au lac Sébastien et de bases secondaires dont celle du lac Long.

Selon le manuel d'exploitation de la compagnie (MEC), le gestionnaire des opérations doit autoriser tous les vols avant le départ, auprès du préposé au suivi des vols. L'autorisation de vol est accordée lorsque le commandant de bord a déterminé, entre autres, que le vol peut être entrepris conformément au RAC. Le gestionnaire des opérations confie ensuite au commandant de bord le contrôle d'exploitation du vol tout en demeurant responsable de l'ensemble des vols.Note de bas de page 28

Les vols touristiquesNote de bas de page 29 effectués à partir du lac Long aux fins de survoler la région de Tadoussac et le parc marin du Saguenay–Saint-Laurent constituent des excursions aériennesNote de bas de page 30 régies par la sous-partie 3 de la partie VII du RAC.

Le MEC ne contient aucune restriction régissant les vols touristiques. De plus, il ne prescrit aucune altitude minimale de vol au-dessus du sol. Toutefois, l'obligation de conformité au RAC inclut les exigences relatives à la marge prescrite de franchissement d'obstacles en vol effectué conformément aux règles de vol à vue (VFR) de jour, soit 300 pieds AGL (voir la section 1.18.1.1 ci-dessous).

Air Saguenay utilise un système de régulation des vols par les pilotes. La préparation du vol, sa planification et son exécution sont sous leur entière responsabilité. Le pilote doit s'assurer que le déroulement du vol est conforme à la réglementation en vigueur et aux procédures prescrites par le MEC. Le pilote doit déterminer la faisabilité d'un vol et élaborer un plan de navigation. Il choisit le trajet en fonction des performances de l'appareil, de la topographie, des obstacles, et des conditions météorologiques.

Air Saguenay utilise un système de suivi des vols de type D qui consiste à surveiller la progression d'un vol et aviser les autorités de recherches et sauvetage si le vol est en retard ou porté manquant. Le commandant de bord est responsable de la surveillance du vol. Lors des vols touristiques, le préposé à la billetterie au lac Long assure le suivi des vols en surveillant les communications radio du pilote au décollage et à l'amerrissage.

Lorsque le personnel au sol s'est rendu compte que le C-FKRJ était en retard, il a tenté en vain de communiquer avec l'appareil par radio. Après 30 minutes de retard, le préposé à la billetterie a avisé Air Saguenay que l'appareil était manquant et la compagnie a enclenché les procédures du MECNote de bas de page 31.

1.17.1.1 Temps de vol, temps de service de vol et périodes de repos

En bref, le MEC réitère les limites de temps de vol et de service de vol du RAC. Ainsi, selon le MEC,

a) Tous les pilotes doivent tenir la compagnie au courant de leurs temps de vol et de leurs temps de service de vol en tenant à jour le formulaire 8.9.

b) Le formulaire doit être remplis [sic] à chaque jour et remis au responsable des temps de vol et temps de service de la compagnie. Ce registre permet à la compagnie de surveiller le temps de vol, le temps de service de vol et les périodes de repos de tous les pilotesNote de bas de page 32.

Selon le MEC 3.13.1a),

il est interdit à la compagnie d'assigner du temps de vol à un pilote, et au pilote d'accepter une telle assignation, s'il doit en résulter que le temps de vol total de ce pilote dans le cadre des vols qu'il a effectués dépassera […] 120 heures par 30 jours consécutifs […]Note de bas de page 33.

Toutefois, la compagnie a reçu les consignes d'exploitation nécessaires pour augmenter cette limite de temps de vol à 150 heures par période de 30 jours consécutifs jusqu'à un maximum de 6 fois par période de 365 joursNote de bas de page 34.

Toujours selon le MEC, la compagnie doit accorder 3 périodes d'au moins 24 heures de repos par période de 30 jours consécutifsNote de bas de page 35. L'examen des dossiers de la compagnie indique qu'entre le 19 juillet 2015 et le 16 août 2015, le pilote a bénéficié d'une seule journée de congé, soit le 11 août 2015. Par conséquent, la compagnie avait accordé au pilote un congé prévu par la réglementation du 17 au 20 août.

Les exigences réglementaires qui limitent le temps de vol et le temps de service de vol et qui prescrivent les durées minimales de repos constituent la défense la plus rudimentaire dans la prévention de la fatigue des équipagesNote de bas de page 36.

1.17.1.2 Gestion de la sécurité des opérations

Tous les organismes ont l'obligation de gérer les risques associés à leurs activités d'exploitation aérienne. À la base, la gestion des risques consiste à

Après avoir évalué les risques et les exigences opérationnelles des vols touristiques au lac Long, Air Saguenay a adopté des mesures pour minimiser les risques liés à ces vols :

Air Saguenay exploitait ses aéronefs en vertu des sous-parties 702 et 703 du RAC. Or, les exploitants assujettis à ces sous-parties ne sont pas tenus de mettre en œuvre un système de gestion de la sécurité (SGS). En conséquence, Air Saguenay n'était pas tenu d'incorporer un SGS en bonne et due forme. La compagnie a néanmoins élaboré volontairement un SGS, en mai 2011, à partir des lignes directrices de TCAC pour les activités assujetties à la sous‑partie 705 du RAC.

1.17.2 Transports Canada, Aviation civile — Surveillance réglementaire

Le programme de surveillance de TCAC « permet de vérifier que les entreprises respectent les exigences réglementaires et disposent de systèmes efficaces afin de veiller à satisfaire en permanence aux exigences réglementairesNote de bas de page 38 ». Le programme comprend « des évaluations, des inspections de validation de programme (IVP) et des inspections du processusNote de bas de page 39 ».

Le BST a examiné les activités de surveillance menées par TCAC et les réponses de la compagnie au cours des 6 années précédant l'événement.

À la suite d'un accident survenu en juillet 2010, TCAC a effectué, du 9 au 20 août 2010, une IVP pour s'assurer que la compagnie avait mis en œuvre des politiques, des processus et des procédures efficaces pour respecter les exigences réglementaires. Selon le rapport d'IVP : « Suite à l'analyse de l'ensemble des constatations, il a été déterminé qu'il n'y a aucune défaillance systémique dans le système de contrôleNote de bas de page 40. »

Du 17 au 27 novembre 2014, TCAC a effectué une IVP visant le contrôle opérationnel et le programme d'assurance de la qualité relatif à la maintenance. Comme aucun SGS n'était requis par la réglementation, le SGS de la compagnie n'était pas assujetti à la surveillance et aux inspections de TC, ainsi l'IVP ne l'a pas pris en compte. Toutefois, les rapports SGS de la compagnie ont été examinés pendant l'IVP et ceux-ci ont permis de soulever une constatation liée aux limites de temps de vol.

La version révisée du rapport d'IVP a soulevé 4 « constatations modéréesNote de bas de page 41 » liées au contrôle opérationnel, dont une liée aux limites de temps de vol. Air Saguenay s'est objecté à cette constatation puisque les mesures correctives avaient déjà été mises en place par l'entremise de leur SGS. Quoique TCAC n'a pas accepté de retirer cette constatation, les mesures correctives ont été approuvées par TCAC en septembre 2015.

À la suite de l'accident à l'étude, TCAC a effectué une inspection du processus du système de contrôle de la maintenance d'Air Saguenay; toutefois, aucune activité de surveillance des opérations de vol n'a été entreprise.

Puisque le RAC ne contient aucune norme d'exploitation liée spécifiquement aux vols touristiques, la surveillance réglementaire effectuée par TCAC ne pouvait soulever des lacunes associées à ces vols.

1.18 Renseignements supplémentaires

1.18.1 Les manœuvres à basse altitude

En raison du relief entourant certains lacs ou à cause du mauvais temps, le pilote de brousse se voit à l'occasion contraint de voler à basse altitude et de suivre des rivières, des vallées, des lacs et des littoraux. Dans de telles conditions, il arrive que le pilote soit amené à effectuer des manœuvres à la limite des performances de l'appareil pour atteindre les objectifs de ce type de vol.

1.18.1.1 Le vol à basse altitude

Voler à basse altitude est généralement considéré comme une activité dangereuseNote de bas de page 42. En vol à basse altitude, le champ visuel est plus limité et le paysage en arrière-plan peut cacher de nombreux obstacles s'il ne présente pas suffisamment de contraste. Le risque de collision avec des câbles et d'autres structures est donc augmenté. Ces collisions peuvent survenir au-dessus de terrains plats, à très basse altitude et dans des conditions météorologiques favorables, les câbles non balisés étant difficiles à repérer. De plus, en cas de panne moteur, le pilote d'hydravion disposera de très peu de temps pour effectuer la procédure d'urgence, choisir un lac et effectuer un amerrissage d'urgence.

Selon le RAC, « il est interdit d'utiliser un aéronef […] à une distance inférieure à 500 pieds de toute personne, tout navire, tout véhicule ou toute structureNote de bas de page 43 ». Toutefois, les parties de vol du C-FKRJ qui se sont déroulées à basse altitude survolaient principalement des collines et de la forêt. Or, quand il n'y a ni personne, navire, véhicule ou structure, dans le cadre d'une exploitation en vertu de la sous-partie 3 de la partie VII du RAC, « il est interdit d'utiliser un aéronef en vol VFR […] le jour, à moins de 300 pieds agl ou à une distance inférieure à 300 pieds de tout obstacle, mesurée horizontalementNote de bas de page 44 ».

1.18.1.1.1 Virage autour d'un objet d'intérêt

Dans certaines circonstances, un pilote peut décider pour diverses raisons d'effectuer des survols autour d'un point d'intérêt au sol. Si son attention est entièrement retenue par l'observation de cet objectif au sol, le pilote peut négliger le contrôle de la vitesse, le contrôle de l'inclinaison et l'augmentation du facteur de charge. De telles circonstances constituent des conditions favorables au décrochage ou au virage engagé (piqué en spirale).

En théorie, pour observer un objectif donné à basse altitude, il est nécessaire d'incliner fortement l'avion à faible vitesse, alors qu'à une altitude supérieure, la même observation est possible à plus faible inclinaison et à plus haute vitesse. Il convient de signaler qu'il est facile de surestimer la vitesse réelle lorsque l'avion vole à basse altitude avec un vent arrière, en raison de la vitesse-sol apparente qui semble élevée. Dans une telle situation, le pilote peut alors avoir tendance à réduire la vitesse au point de faire décrocher l'avion.

1.18.1.1.2 Illusions crées par la dérive

Dans le contexte de l'accident à l'étude, les vents étaient calmes au site de l'accident, les illusions crées par la dériveNote de bas de page 45 n'étaient donc pas présentes lors du dernier virage à basse altitude.

1.18.1.1.3 Virage en-dessous de la hauteur pivotale

Lors de virages à basse altitude, les sens du pilote peuvent être induits en erreur par l'illusion liée au vol en-dessous de la hauteur pivotaleNote de bas de page 46. La hauteur pivotale est la hauteur à laquelle, du point de vue du pilote, l'extension de l'axe latéral de l'appareil apparaît comme un point fixe au sol. Cette altitude est calculée en fonction de l'angle d'inclinaison et du rayon du virage (figure 10).

Figure 10. Virage à la hauteur pivotale (Source : Basée sur l'image originale de R. Hildesheim)
Virage à la hauteur pivotale

Pendant les virages à altitude normale, soit au-dessus de la hauteur pivotale, l'extension de l'axe latéral de l'appareil se déplace en sens inverse au-dessus du sol. De la perspective du pilote, le bout de l'aile semble reculer par rapport au sol (figure 11).

Figure 11. Virage au-dessus de la hauteur pivotale (Source : Basée sur l'image originale de R. Hildesheim)
Virage au-dessus de la hauteur pivotale

Lorsque les virages sont effectués en-dessous de la hauteur pivotale, le mouvement du bout de l'aile basse avance dans le même sens que l'appareil par rapport au sol. Si le pilote fixe un point au centre du virage au sol, il peut avoir l'impression que l'aile basse avance plus vite qu'à l'habitude, ce qui peut l'inciter à appliquer du palonnier vers l'intérieur du virage. Si la vitesse est près de la vitesse de décrochage, cette action au palonnier peut provoquer le décrochage de l'aile basse, entraînant une autorotation de mise en vrille (figure 12).

Figure 12. (Source : Basée sur l'image originale de R. Hildesheim)
asée sur l'image originale de R. Hildesheim

Lors de l'accident à l'étude, le C-FKRJ a amorcé un virage à quelque 110 pieds AGL alors que la hauteur pivotale du virage était de 328 pieds AGLNote de bas de page 47.

1.18.1.1.4 Virage à grande inclinaison

Plus l'angle d'inclinaison est grand, plus la portance doit être importante pour maintenir une altitude constante. En guise d'illustration, la figure 13 compare différents rayons de virage et les niveaux de risque qu'ils posent à différentes vitesses pour un petit avion. La figure montre à quel point le rayon d'un virage est réduit simplement en diminuant la vitesse et en augmentant l'angle d'inclinaison à 45°. Elle montre également que le risque de décrochage augmente à mesure que le rayon du virage diminue.

Figure 13. Niveaux de risque liés aux rayons de virage en fonction de la vitesse pour petits avions (Source : Rapport d'enquête aéronautique du BST A11P0106)
Niveaux de risque liés aux rayons de virage en fonction de la vitesse pour petits avions
1.18.1.2 La perte de maîtrise en vol
1.18.1.2.1 Le décrochage aérodynamique

Un décrochage est une perte de portance et une augmentation de traînée qui se produit lorsque l'aéronef vole à un angle d'attaque supérieur à l'angle qui assure la portance maximale. Quelle que soit la vitesse, un avion décroche toujours lorsque les ailes atteignent cet angle d'attaque critiqueNote de bas de page 48.

La vitesse de décrochage varie quant à elle, entre autres, selon le poids, la puissance, la position des volets et l'angle d'inclinaison. Lorsque les autres facteurs sont constants, la vitesse de décrochage est plus élevée lorsque le facteur de charge augmente, soit par suite d'une manœuvre brusque, soit par suite d'un virage à grande inclinaison. Ainsi, plus l'angle d'inclinaison est important, plus la vitesse de décrochage est élevée.

Tous les pilotes professionnels connaissent les dangers du décrochage : une perte quasi totale du contrôle de la trajectoire de l'avion et, du fait même de la perte de portance, un taux de descente élevé. De plus, la sortie du décrochage exige généralement une perte d'altitude. Pour prévenir la majorité des problèmes dans ce domaine dangereux du vol, il faut que le pilote ait une indication immédiate et évidente de l'approche du décrochage : immédiate parce qu'il y a urgence, et évidente, pour éviter toute confusion avec un autre phénomène.

1.18.1.2.2 L'autorotation de la mise en vrille

La mise en vrille s'amorce au moment où l'aéronef décroche et qu'une aile produit plus de portance que l'autre. L'aile descendante ayant un angle d'attaque plus grand décroche encore plus et a plus de traînée, ce qui provoque une autorotation. Pendant cette phase de la mise en vrille, la trajectoire de vol passe de l'horizontale à la verticaleNote de bas de page 49.

Généralement, même si le pilote prend les mesures nécessaires pour arrêter l'autorotation dès qu'elle commence, l'appareil se retrouve en position verticale, l'accélération est rapide et une grande altitude est nécessaire pour pouvoir reprendre une trajectoire horizontale (figure 14). Si l'autorotation se poursuit, l'appareil pourrait se stabiliser en vrille avec une trajectoire hélicoïdale vers le bas.

Figure 14. Mise en vrille (Source : Transports Canada, TP 1102, Manuel de pilotage, 4e édition, avec annotations du BST)
Mise en vrille
1.18.1.2.3 Le vol lent

On peut définir le vol lent comme étant la gamme des vitesses comprises entre la vitesse d'autonomie maximale de l'aéronef et la vitesse immédiatement supérieure à celle du décrochage. Les caractéristiques associées au comportement et au pilotage de l'aéronef en vol lent sont les suivantes :

À ce sujet, le manuel de vol du DHC-2 indique qu'il est possible de maintenir la pleine maîtrise de l'avion à 75 mi/h IAS avec les volets à la position croisière, et à 65 mi/h IAS avec les volets à la position atterrissageNote de bas de page 50.

1.18.1.3 Prévention des pertes de maîtrise en vol
1.18.1.3.1 Formation sur les caractéristiques de décrochage du DHC-2

L'entraînement en vol effectué à Air Saguenay en début de saison comporte des exercices de décrochage. À partir du vol rectiligne en palier ou en virage à faible inclinaison, l'appareil est placé en décélération progressive jusqu'au point de décrochage. Le comportement docile de l'appareil est tel que le pilote manque d'autorité du gouvernail de profondeur, ce qui peut mener à un décrochage aérodynamique complet. Les symptômes de l'imminence d'un décrochage commencent à se manifester clairement de façon progressive de sorte que le pilote dispose d'amplement de temps pour éviter le décrochage.

Toutefois, comme c'est le cas pour plusieurs autres avions, un décrochage en virage à grande inclinaison avec de la puissance provoque une autorotation de mise en vrille avec peu ou pas de signes de l'imminence du décrochage. Pourtant, l'entraînement en vol ne comporte pas de décrochage en virage à grande inclinaison avec de la puissance. La formation en décrochage qui n'aborde pas toutes les conditions de vol (dont les virages à grande inclinaison avec de la puissance) a été relevée comme facteur de risque dans plusieurs rapports d'enquête du BSTNote de bas de page 51.

1.18.1.3.2 Système d'indication d'angle d'attaque

Le General Aviation Joint Steering Committee (GAJSC) a pour objectif d'améliorer la sécurité dans le secteur de l'aviation générale (aviation récréative). En avril 2011, le comité a mandaté son équipe d'analyse de la sécurité (Safety Analysis Team [SAT]) de passer en revue les accidents mortels de l'aviation générale de 2001 à 2010. La SAT a examiné 2472 accidents mortels de l'aviation générale. Elle a constaté que la perte de maîtrise en vol a mené à 1259 de ces accidents.

La perte de maîtrise, principalement les décrochages aérodynamiques, compte pour environ 40 % des accidents causant des décèsNote de bas de page 52. À la lumière de ces données, le GAJSC/SAT a formé un groupe de travail qui avait pour objectif de chercher, analyser et élaborer des solutions pour éviter ce type d'accident.

Parmi les nombreuses recommandations du groupe figure l'utilisation d'un système d'indication d'angle d'attaque. Une indication visuelle de l'angle d'attaque procure au pilote une meilleure conscience de la situation à l'approche d'un angle d'attaque critique. Le pilote peut ainsi d'autant mieux éviter un décrochage aérodynamique même s'il a une charge de travail élevée ou une distraction externe. Un tel système procure une information visuelle continue sur la marge de décrochage aérodynamique en tout temps, peu importe l'assiette, la vitesse ou la puissance.

En réaction au rapport du GAJSC, la FAA a pris des mesures concrètes pour faciliter l'installation de systèmes d'indication d'angle d'attaque à bord d'avions d'aviation générale. Par la suite, la FAA a publié une lettre d'information et a émis des recommandations sur l'installation de systèmes d'indication d'angle d'attaque, leur utilisation et la formation connexe, ciblant spécifiquement les organismes de maintenance, les pilotes, les propriétaires d'avions, les instructeurs de vol, les écoles de pilotage et les centres de formationNote de bas de page 53.

En 2016, la perte de maîtrise en vol dans l'aviation générale figure sur la « Most Wanted List » du National Transportation Safety Board (NTSB) des États-Unis comme priorité pour améliorer la sécurité aérienne. Selon le NTSB, 47 % des accidents mortels survenus entre 2008 et 2014 sont attribuables à la perte de maîtrise en vol (1210 décès). Le NTSB avait cerné, entre autres, l'inattention du pilote en raison de la charge de travail, de distractions ou d'une baisse de vigilance comme causes communes de perte de maîtrise. Ces pertes de maîtrise sont particulièrement meurtrières lorsque les avions sont près du sol, et que le temps et l'altitude disponibles pour récupérer d'un décrochage sont limités. Une des solutions proposées est l'utilisation de systèmes d'indication d'angle d'attaque.

Au Canada, l'installation d'un système d'indication d'angle d'attaque doit être faite en vertu d'un CTS sur les avions certifiés, tel que le DHC-2.

1.18.1.3.3 Avertisseurs de décrochage

Un avertisseur de décrochage est un dispositif qui fournit au pilote un avertissement de décrochage clair et distinct, indépendamment de la reconnaissance par le pilote des comportements de l'appareil juste avant un décrochage, comme le tremblement aérodynamique.

Lors des essais en vol effectués en vue de la certification du DHC-2 au cours des années 1940, on avait jugé que des indications aérodynamiques signalaient clairement l'imminence d'un décrochage. Ainsi, rien n'exigeait à l'époque l'installation d'un avertisseur de décrochage, et un tel dispositif n'avait pas été installé à bord du C-FKRJ depuis sa certification.

En août 2008, à la suite d'un accident survenu en Alaska au mois d'août 2007Note de bas de page 54, la FAA a envoyé 5 recommandations à TCAC visant les DHC-2. Une d'entre elles rappelait que le DHC-2 avait été originalement certifié sans avertisseur de décrochage et qu'un tel avertisseur n'était toujours pas requis. La FAA recommandaitNote de bas de page 55 que des avertisseurs de décrochage soient installés sur les DHC-2.

TCAC a répondu que la recommandation était judicieuse, mais que l'installation d'un système d'avertissement de décrochage sur les DHC-2 existants était improbable sans une modification à la réglementation.

Depuis 1998, le BST a publié 12 rapports d'enquête au sujet d'accidents mettant en cause des DHC-2 non équipés d'un avertisseur de décrochage qui ont décroché et se sont écrasés (annexe C).

En octobre 2013, à la conclusion du rapport d'enquête aéronautique A12O0071, le BST a exprimé une préoccupation liée à la sécurité indiquant que les vibrations aérodynamiques du DHC-2 ne fournissent pas aux pilotes un avertissement adéquat de l'imminence d'un décrochage.

Le BST notait, entre autres, la fréquence élevée d'accidents causés par un décrochage aérodynamique ainsi que les conséquences graves de ces accidents lorsqu'ils surviennent à basse altitude lors des phases critiques de vol.

L'importance du risque est déterminée en fonction de la probabilité et de la gravité des conséquences malheureuses. Compte tenu du nombre d'accidents combiné aux conséquences catastrophiques, le décrochage du DHC-2 à basse altitude comporte un niveau de risque élevé.

Selon TCAC, les caractéristiques de décrochage du DHC-2 fournissent des indices acceptables qui permettent de reconnaître suffisamment tôt les symptômes de l'imminence d'un décrochage afin que le pilote puisse prendre les mesures voulues pour l'éviter.

Néanmoins, TCAC a publié en juillet 2014 une Alerte à la sécurité de l'Aviation civile (ASAC)Note de bas de page 56 intitulée « Installation dans des aéronefs DHC-2 qui n'étaient pas équipés d'un système avertisseur de décrochage artificiel ». Cet ASAC avait pour objet de renseigner sur les bénéfices en matière de sécurité des systèmes avertisseurs de décrochage et, en conclusion, TCAC recommandait que

tous les propriétaires de DHC-2 incorporent le système avertisseur de décrochage artificiel de la MOD 2/1605Note de bas de page 57, ou un autre système avertisseur de décrochage artificiel approuvé [et,] dans la mesure du possible, tous les propriétaires et exploitants installent un système avertisseur de décrochage artificiel sur les aéronefs qui n'en étaient pas équipés à l'origineNote de bas de page 58.

Viking Air Limited, le titulaire actuel du certificat de type DHC-2, a conçu une modification optionnelle de l'avertisseur de décrochage de Havilland (MOD 2/973) qui procure une alarme visuelle et sonore d'un décrochage imminent. Cette modification améliore l'alarme visuelle en la plaçant à un endroit plus visible au pilote sur le tableau de bord.

À la fin juin 2014, Viking Air Limited a publié un bulletin technique dans lequel il recommandait l'installation ou l'amélioration des avertisseurs de décrochage sur tous les DHC-2 par l'entremise de la MOD 2/973.

1.18.2 La surveillance des vols

La direction d'Air Saguenay ne disposait d'aucune méthode de surveillance des vols en temps réel et il n'existait pas de processus visant à évaluer la façon dont un vol s'était déroulé. Toutefois, la réglementation actuelle n'exige pas un tel niveau de surveillance des vols.

Les pilotes étaient évalués selon leur rendement général et pendant les vérifications de compétence. Les clients étaient invités à fournir de la rétroaction après un vol. À la suite de l'événement à l'étude, il est ressorti que la direction d'Air Saguenay ne savait pas que le pilote avait l'habitude d'effectuer des virages serrés à basse altitude.

Le BST a constaté à plusieurs reprises, dans ses enquêtes sur des accidents mettant en cause divers organismes, que la direction ne savait pas qu'un employé ou un instructeur contrevenait à la réglementation en vigueur ou aux politiques de l'entreprise. À titre d'exemple, le Rapport d'enquête aéronautique A09Q0065 du BST a révélé qu'à l'insu de la direction, l'instructeur volait beaucoup plus bas que ne l'autorisait la politique de l'entreprise. Le Rapport d'enquête aéronautique A12W0031 a révélé que le pilote volait exclusivement au-dessus d'un relief peu accidenté lors de vols d'excursion. Toutefois, à la suite d'un vol de tournage d'émissions de télévision auquel le pilote avait pris part comme passager, ce dernier a vraisemblablement été influencé par l'expérience positive à bord du vol de tournage, au cours duquel le vol s'effectuait à grande proximité du relief abrupt accidenté, de sorte que ses vols subséquents comme pilote ont été effectués à proximité du relief abrupt accidenté. L'entreprise n'était pas au courant que le pilote avait effectué un changement de trajectoire lors des vols d'excursions.

Compte tenu des statistiques combinées sur les accidents mettant en cause des exploitations régies par les sous-parties 702, 703 et 704 du RAC, il existe des arguments convaincants pour que l'industrie et l'organisme de réglementation déterminent les dangers et gèrent de façon proactive les risques inhérents à ces exploitations. Afin d'assurer une gestion efficace du risque, il faut savoir pourquoi des incidents se produisent et quelles pourraient être les lacunes de sécurité qui y ont contribué.

En outre, une surveillance régulière des activités normales de vol peut aider les exploitants à améliorer leur efficacité opérationnelle et à déceler les lacunes de sécurité avant qu'elles ne causent un accident.

1.18.2.1 Systèmes d'enregistrement des données de vol légers et suivi des données de vol

La mise au point de systèmes d'enregistrement des données de vol légers offre la possibilité d'étendre la surveillance des vols aux plus petites exploitations. Grâce à cette technologie et au suivi des données de vol (SDV), ces exploitations seront notamment en mesure de surveiller la conformité aux procédures d'utilisation normalisées, la prise de décisions des pilotes et le respect des limites opérationnelles. Le SDV permettra aux exploitants de déceler les problèmes dans leurs exploitations et de prendre des mesures correctives avant qu'un accident se produise. Aucune disposition du RAC n'exige l'installation d'un système d'enregistrement des données de vol léger dans les aéronefs.

Si un accident venait à se produire, les enregistrements de systèmes d'enregistrement des données de vol légers fourniraient des renseignements utiles pour permettre de mieux déterminer les lacunes de sécurité dans le cadre de l'enquête.

Le Bureau reconnaît qu'il faudra régler certains enjeux pour faciliter l'utilisation efficace des enregistrements provenant des systèmes d'enregistrement des données de vol légers, notamment des questions relatives à l'intégration de cet équipement dans un aéronef, à la gestion des ressources humaines et à des enjeux d'ordre juridique, comme la restriction concernant l'utilisation d'enregistrements des conversations et d'enregistrements vidéo dans le poste de pilotage. Néanmoins, compte tenu des possibilités qu'offre cette technologie combinée au SDV pour améliorer considérablement la sécurité, le Bureau croit qu'aucun effort ne doit être épargné pour surmonter ces obstacles.

En conséquence, dans le cadre de l'enquête sur un accident survenu en mars 2011Note de bas de page 59, le Bureau a recommandé que

Le ministère des Transports, en collaboration avec l'industrie, élimine les obstacles et élabore des pratiques recommandées en ce qui a trait à la mise en œuvre du suivi des données de vol et à l'installation de systèmes d'enregistrement des données de vol légers par les exploitants commerciaux qui ne sont pas actuellement tenus de munir leurs aéronefs de ces systèmes.
Recommandation A13-01du BST

En août 2013, Transports Canada (TC) a entrepris des discussions avec l'intention de déterminer les obstacles et les entraves à la surveillance des données de vol.

En février 2014, TC a appuyé la recommandation et prévoyait rédiger une circulaire d'information pour décrire les pratiques recommandées concernant les programmes de SDV.

En novembre 2015, TC a convenu que le SDV renforcerait la sécurité aérienne au Canada. Toutefois, TC n'a pas publié la circulaire d'information, et la nouvelle activité proposée consiste à rédiger un document de travail et à examiner à nouveau l'évaluation des risques du SDV.

Dans sa réponse de janvier 2017, TC renouvelle sa proposition d'organiser un groupe de discussion en 2017, ce qu'il avait l'intention de faire depuis 2013. Cependant, d'ici à ce que ce groupe de discussion formule des conclusions quant aux défis et aux avantages de l'installation d'enregistreurs multifonctions légers dans les petits aéronefs et à ce que TC indique au BST le plan d'action découlant de ces conclusions, on ignore quand et comment la lacune de sécurité soulevée par la recommandation A13-01 sera corrigée.

Par conséquent, à l'égard de la réponse à la recommandation A13-01, le Bureau estime que son évaluation est impossible.

Même si TC a proposé d'effectuer une analyse plus approfondie de cet enjeu de sécurité, il n'a pris aucune mesure concrète pour mettre la recommandation du BST en pratique. Le Bureau craint que cela entraîne d'importants retards, comme c'est le cas pour la mise en œuvre de nombreuses autres recommandations.

1.18.2.2 Système de gestion de la sécurité

Les entreprises de transport ont la responsabilité de gérer les risques de sécurité liés à leur exploitation. Les SGS fournissent le cadre nécessaire pour y parvenir, et de nombreuses entreprises mettent en œuvre un SGS en bonne et due forme, soit volontairement, soit pour se conformer aux exigences du RACNote de bas de page 60 à cet égard. Même les petites entreprises doivent suivre des processus de sécurité pour gérer les risques.

Le BST a souligné à de nombreuses reprises les avantages des SGS. En effet, lorsqu'ils sont bien appliqués, ces systèmes permettent aux entreprises de gérer efficacement les risques et de rendre leur exploitation plus sécuritaire.

1.18.2.2.1 Liste de surveillance du BST

La gestion de la sécurité et la surveillance resteront sur la Liste de surveillance du BST jusqu'à ce que :

La Liste de surveillance du BST énumère les principaux enjeux de sécurité qu'il faut s'employer à régler pour rendre le système de transport canadien encore plus sûr.

La gestion de la sécurité et la surveillance figurent sur la Liste de surveillance 2016.

Cet enjeu de la Liste de surveillance a été abordé dans le rapport d'enquête du BST sur l'accident survenu en mai 2013Note de bas de page 61. Le rapport souligne entre autres qu'environ 90 % de tous les titulaires de certificat d'aviation canadien ne sont toujours pas tenus d'avoir de SGS, selon la réglementation en vigueur, et que TC n'a aucune assurance quant à la capacité de ces exploitants de gérer efficacement la sécurité. Le rapport a fait ressortir la nécessité pour TC d'adapter son approche de la surveillance réglementaire en fonction de la compétence de l'exploitant.

Par conséquent, à la conclusion du rapport d'enquête aéronautique A13H0001, cet enjeu de la Liste de surveillance a été formalisé sous forme de recommandations au ministère des Transports comme suit :

Le ministère des Transports exige que tous les exploitants d'aviation commerciale au Canada mettent en œuvre un système de gestion de la sécurité en bonne et due forme.
Recommandation A16-12 du BST

Le ministère des Transports effectue des évaluations régulières des SGS pour déterminer la capacité des exploitants de gérer efficacement la sécurité.
Recommandation A16-13 du BST

Le ministère des Transports renforce ses politiques, ses procédures et sa formation en matière de surveillance, afin que la fréquence et l'objet de la surveillance et des activités de contrôle après surveillance, y compris les mesures d'application, correspondent à la capacité de l'exploitant de gérer efficacement le risque.
Recommandation A16-14

1.18.2.3 Encadrement des vols touristiques

En raison du nombre et de la concentration des vols touristiques aux États-Unis, le NTSB a longtemps été préoccupé par la fréquence des accidents liés à ces vols. Des facteurs systémiques propres à l'exploitation de vols touristiques soulevés lors de 2 enquêtes d'accidents, en 1994, ont incité le NTSB à réaliser une enquête spéciale sur ce type d'exploitation aérienneNote de bas de page 62.

En juin 1995, le NTSB a publié le rapport d'enquête spécial « Safety of the Air Tour Industry in the United States » (sécurité du secteur des vols touristiques aux États-Unis). L'imposition possible d'une altitude minimale de vol a été soulevée dans le rapport. À ce sujet, le NTSB a conclu que : « [traduction] Le Bureau appuie l'établissement d'une altitude minimale de vol, qui procure suffisamment de temps au pilote pour choisir un site d'atterrissage d'urgence, puis préparer l'appareil et les passagers pour effectuer l'atterrissage d'urgenceNote de bas de page 63. »

En 1996, un groupe d'exploitants aériens qui effectuent des vols touristiques aux États-Unis ont mis sur pied l'organisation Tour Operators Program of Safety (TOPS), qui a pour objectif d'améliorer la sécurité des vols touristiques en hélicoptère. Pour devenir membres de l'organisation, les exploitants doivent instaurer des mesures de sécurité et des normes d'exploitation qui vont au-delà des exigences réglementaires et se soumettre à une vérification annuelle.

Parmi les normes d'exploitation exigées, on retrouve l'imposition de limites concernant l'assiette et l'inclinaisonNote de bas de page 64 des appareils, ainsi qu'une altitude minimale de vol de 500 pieds AGL : « [traduction] Ces normes visent notamment à éviter toute perception que les vols touristiques puissent comporter des éléments d'un manège à sensation, de la voltige, du vol à basse altitude ou des manœuvres brusques inutilesNote de bas de page 65. »

En février 2014, la publication d'un examen des préoccupations de sécurité aérienne liées aux vols touristiquesNote de bas de page 66 aux États-Unis a révélé des progrès significatifs concernant plusieurs préoccupations mentionnées dans le rapport de 1995 du NTSB et lors d'enquêtes ultérieures. Toutefois, l'examen a noté, entre autres, que la question des altitudes minimales de vol n'a pas été complètement résolue en raison des topographies variées, des restrictions liées aux conditions météorologiques et de la concentration de vols à des altitudes similaires.

Il ressort de l'examen que le taux d'accidents dans certains segments de l'industrie des vols touristiques est similaire à celui de certains segments de l'industrie aérienne reconnus comme étant plus dangereux, tels que les vols des services médicaux d'urgence héliportés. Ainsi, l'examen conclut que

[traduction]

Exposer les clients et les pilotes de vols touristiques à des taux d'accidents élevés normalement associés aux vols à « risque élevé » lors d'activités récréatives et professionnelles dans des conditions météorologiques de vol à vue est inacceptable, et les intervenants de cette industrie de vols touristiques devraient continuer à travailler ensemble pour réduire ce risque inutileNote de bas de page 67.

1.19 Techniques d'enquête utiles ou efficaces

Sans objet.

2.0 Analyse

Le pilote était qualifié conformément à la réglementation en vigueur pour effectuer le vol et il avait reçu la formation exigée par Transports Canada, Aviation civile (TCAC). Bien que l'examen du dossier médical du pilote n'ait révélé aucun facteur médical qui aurait pu avoir une incidence sur le rendement du pilote, l'autopsie pratiquée sur le corps du pilote a permis de découvrir qu'il avait une athérosclérose coronarienne importante.

L'enquête a révélé que l'appareil fonctionnait normalement pendant le vol et au moment de l'accident. L'examen de l'épave et de différents composants n'a révélé aucun indice démontrant que l'avion aurait subi une défaillance structurale, des problèmes de commandes de vol, un fonctionnement anormal des volets, une perte de puissance moteur ou un incendie en vol.

L'appareil évoluait dans des conditions favorables au vol à vue, par vent calme dans un ciel dégagé. Rien ne porte à croire que les conditions météorologiques aient été en cause dans cet événement.

La trajectoire verticale avec une absence de vitesse vers l'avant correspond à ce qui se produit en situation de décrochage aérodynamique menant à une autorotation de mise en vrille. Ces constatations, ainsi que l'examen des données du système de positionnement mondial (GPS) du pilote, semblent indiquer que l'avion a décroché dans un virage à grande inclinaison à gauche, amorcé à environ 110 pieds au-dessus du sol (AGL). Ainsi, le décrochage se serait produit à une altitude à partir de laquelle il n'était pas possible de reprendre la maîtrise de l'appareil avant l'impact avec le sol.

Par conséquent, l'analyse portera sur l'état de santé du pilote, les manœuvres à basse altitude, la surveillance des vols, la perte de maîtrise en vol et la prévention de celle-ci.

2.1 L'état de santé du pilote

Afin de déterminer l'incidence de l'état de santé du pilote sur le vol, les enquêteurs se sont penchés sur les données de vol et sur les indices laissés par l'appareil sur le site de l'accident. Ils ont tenté de détecter la présence de signes précurseurs d'un comportement anormal du pilote dans la manipulation de l'avion.

L'analyse des données GPS a permis d'établir que l'hydravion a plus ou moins suivi la même trajectoire, autant sur le plan vertical qu'horizontal, que celle des vols précédents. Ceci laisse supposer que le pilote était en pleine possession de ses moyens jusqu'au moment du virage final. Ensuite, l'hydravion a décroché dans un virage à grande inclinaison. De par sa nature, un décrochage dans de telles circonstances aurait précipité l'appareil dans une autorotation de mise en vrille. Or, l'examen du site indique que l'avion a percuté le sol en piqué dans une trajectoire verticale sans rotation. De ces faits, on peut conclure que le pilote a dû arrêter l'autorotation en appuyant sur le palonnier droit avant l'impact.

Pour ces raisons, à partir des renseignements recueillis, les enquêteurs ont déterminé que rien ne laisse croire que le pilote aurait subi une affection physiologique au moment de l'accident. Cette conclusion est étayée par les données GPS et l'examen du site de l'accident.

2.2 Les manœuvres à basse altitude

L'organisme de réglementation est conscient des risques potentiels encourus par les pilotes lors de vols à basse altitude. Ainsi pour les vols effectués en vertu de la sous-partie 3 de la partie VII du Règlement de l'aviation canadien (RAC), il est interdit d'utiliser un aéronef selon les règles de vol à vue (VFR) de jour à moins de 300 pieds AGLNote de bas de page 68.

Il est d'ailleurs reconnu que le vol à basse altitude réduit la marge de sécurité en cas de panne moteur, de perte de maîtrise ou de tout autre imprévu, tout en augmentant le risque d'impact avec le sol. Cela dit, il arrive que les circonstances justifient ce type de vol.

Cependant, le relief entourant le lac Long (Québec) n'exigeait pas de manœuvre particulière à basse altitude pour effectuer les décollages et amerrissages. De plus, lors des vols touristiques, le pilote avait l'obligation de survoler le parc marin du Saguenay–Saint-Laurent à au moins 2000 pieds au-dessus du niveau de la mer (ASL). Puisque l'élévation du terrain sous la trajectoire normalement suivie lors de ces vols est d'au plus 1000 pieds ASL, l'altitude imposée de 2000 pieds ASL, si elle est maintenue à l'extérieur des limites du parc, assure une marge de franchissement du relief d'au moins 1000 pieds.

Par ailleurs, ces vols touristiques devaient s'effectuer dans des conditions météorologiques favorables au vol à vue afin de permettre aux passagers d'observer les baleines et ne nécessitaient pas de manœuvres à basse altitude.

À cet égard, on a constaté que le pilote avait régulièrement volé à basse altitude et avait effectué des virages à grande inclinaison près du sol lors des vols précédents. Bien qu'il n'ait pas été possible d'établir la marge de décrochage précise lors de ces virages sans connaître la position des volets, l'analyse des données a permis de démontrer que dans plusieurs virages, la vitesse du C-FKRJ se situait sous la vitesse de décrochage sans volets. Puisque ces virages étaient effectués à moins de 300 pieds AGL, il est possible de conclure que la marge de sécurité était réduite près de la limite absolue, car à ce moment, le pilote ne disposait que de peu d'altitude pour réagir en cas de perte de maîtrise de l'appareil.

Il est possible que son expérience de pilote de brousse l'ait souvent conduit à manœuvrer près du sol. Ainsi, tout porte à penser qu'à défaut de consigne organisationnelle spécifique concernant une altitude minimale de vol, le pilote a établi son propre seuil quant à l'altitude minimale sécuritaire de ces vols. Il est probable que, soit le pilote acceptait le niveau de risque lié à ces manœuvres à basse altitude, soit il l'ignorait. Dans un cas comme dans l'autre, le pilote effectuait des manœuvres à marge de sécurité réduite à basse altitude. Par conséquent, ces vols comportaient un niveau de risque qui n'était pas nécessaire pour atteindre les objectifs de vols touristiques.

2.3 La surveillance des vols

À première vue, ces vols touristiques comportent peu de risque. De par leur nature, ils s'effectuent dans de bonnes conditions météorologiques et ne comportent aucune contrainte temporelle ou opérationnelle qui exige de manœuvrer à basse altitude.

En principe, le gestionnaire des opérations doit veiller à la sécurité des opérations. Dans la pratique, il ne dispose pas nécessairement de tous les outils nécessaires pour s'acquitter entièrement de cette tâche. C'est pourquoi le manuel d'exploitation de la compagnie (MEC) rappelle aux pilotes que l'exécution des vols est sous leur entière responsabilité et qu'ils doivent s'assurer que le déroulement du vol est conforme à la réglementation en vigueur et aux procédures prescrites par le manuel.

2.3.1 Suivi des données de vol et systèmes d'enregistrement des données de vol légers

Air Saguenay (1980) inc. (Air Saguenay), comme la plupart des compagnies d'envergure similaire, ne dispose d'aucune méthode de surveillance directe de l'exécution des vols. Par conséquent, la compagnie ignorait que le C-FKRJ n'était pas piloté en conformité avec la réglementation en vigueurNote de bas de page 69. De plus, elle n'était pas consciente que les habitudes de vol du pilote présentaient un niveau de risque qui n'était pas nécessaire pour atteindre les objectifs de ces vols touristiques.

Étant donné que l'aéronef en cause n'était muni d'aucun enregistreur de bord, la direction de la compagnie n'avait pas accès à des données de vol permettant de veiller au respect des limites d'exploitationNote de bas de page 70. Même si la compagnie n'avait pas établi de normes d'exploitation propres aux vols touristiques, un système de suivi de vol ou de surveillance après vol aurait pu permettre à la direction de déceler les manœuvres à basse altitude.

La mise au point de systèmes d'enregistrement des données de vol légers offre la possibilité d'élargir le niveau de surveillance par le suivi des données de vol (SDV), notamment pour vérifier la conformité aux procédures de la compagnie ainsi que le respect des limites opérationnelles. De plus, la présence à bord d'un système d'enregistrement des données de vol léger peut avoir une influence positive sur le comportement des pilotes. Finalement, le suivi de ces données permet aux exploitants de déceler les écarts d'exploitation et de prendre des mesures correctives avant qu'un accident ne se produise. Si des systèmes d'enregistrement des données de vol légers ne sont pas utilisés pour faire un suivi précis des opérations de vol, il existe un risque que les pilotes dérogent aux procédures et aux limites établies, réduisant ainsi les marges de sécurité.

Le BST a déjà reconnu le potentiel des systèmes de surveillance et du SDV pour aider les exploitants à repérer de manière proactive les lacunes de sécurité avant qu'elles ne provoquent un accident. Toutefois, bien que des dispositifs abordables soient disponibles, l'installation de ceux-ci dans un avion requiert une certification particulière qui, elle, peut rendre l'implantation de ces dispositifs plus complexe et coûteuse. Pour cette raison, le Bureau a formulé une recommandation visant à éliminer les obstacles à la mise en œuvre du SDV et à l'installation de systèmes d'enregistrement des données de vol légers par les exploitants commerciaux qui ne sont toujours pas tenus de munir leurs aéronefs de tels systèmes.

Transports Canada (TC) a appuyé cette recommandation. Toutefois, les engagements pris par TC de publier une circulaire d'information et d'organiser un programme de consultation ne se sont pas concrétisés. Bien que TC ait proposé d'effectuer une analyse plus approfondie de cet enjeu de sécurité, il n'a pris aucune mesure concrète pour mettre la recommandation du BST en pratique. Si TC ne prend pas de mesures concrètes pour faciliter l'utilisation de systèmes d'enregistrement des données de vol légers et le SDV, les exploitants risquent de ne pas pouvoir repérer de manière proactive les lacunes de sécurité avant qu'elles ne provoquent un accident.

2.3.2 Suivi du temps de vol, du temps de service de vol et des périodes de repos

L'horaire de travail du pilote respectait les exigences de la réglementation qui, en principe, assure un minimum de temps de repos et de récupération. Toutefois, la semaine précédant l'accident, le pilote a travaillé une journée de repos prévue et de ce fait n'a pas bénéficié du temps de repos requis par la réglementation. Si l'on considère que les exigences réglementaires concernant les temps de repos minimaux représentent la défense la plus fondamentale contre la fatigue, il est primordial que les pilotes puissent se prévaloir de ces périodes. Si les pilotes n'obtiennent pas au minimum les périodes de repos réglementaires, il y a un risque que des vols soient effectués alors que les pilotes sont fatigués.

Un examen des antécédents de travail du pilote a démontré que lors des opérations de vols touristiques du lac Long, le pilote effectuait en moyenne 9 vols par jour, ce qui représente 4,4 heures de vol au cours d'une journée de travail de 10,1 heures de service.

L'enquête n'a pas permis d'obtenir de données de sommeil pour le pilote en cause et, par conséquent, une analyse complète de la fatigue n'a pas pu être réalisée. Cependant, puisque le pilote résidait au lac Long pendant ses périodes de travail, il a eu la possibilité d'obtenir un repos suffisant entre les périodes de service de vol. De plus, le pilote avait bénéficié de 3 jours de congé au cours de la semaine précédant la journée de l'accident. Ainsi, le pilote avait eu l'occasion d'obtenir un repos suffisant avant l'événement et il est peu probable que le pilote était dans un état de fatigue au moment de l'événement.

L'omission de consigner les heures de vol et de service de vol effectuées le 17 août dans le carnet de route de l'appareil et dans le registre de suivi de temps de vol et de service de vol a contribué à créer

Dans ce contexte, la direction de la compagnie n'était plus en mesure de gérer efficacement les temps de vol et les périodes de repos du pilote. Si tous les vols effectués ne sont pas consignés au carnet de vol du pilote et suivis par la compagnie, il est possible que le pilote ne reçoive pas les périodes de repos requises, ce qui augmente le risque que des vols soient effectués alors que le pilote est fatigué.

De plus, le service de maintenance de la compagnie ne pouvait pas exercer le suivi requis par la réglementation des heures de vol effectuées par le C-FKRJ. Si des vols effectués ne sont pas consignés au carnet de route de l'appareil, il est possible que des échéances d'inspection, de maintenance et de vie de certains composants soient dépassées, ce qui augmente le risque de défaillance.

2.3.3 Systèmes de gestion de la sécurité

Les manœuvres à basse altitude pour atteindre des lacs en régions montagneuses ou lors de vols dans des conditions météorologiques défavorables sont des éléments inhérents au vol de brousse.

Air Saguenay a travaillé pour mettre en œuvre un système de gestion de la sécurité (SGS), même si un SGS n'est pas exigé par la réglementation pour les exploitants assujettis à la sous-partie 703 du RAC. Cependant, l'implantation d'un SGS est un processus ardu, exigeant que l'entreprise passe d'une culture de la conformité à une culture de la gestion des risques en matière de sécurité.

Ce passage est d'autant plus difficile pour une entreprise de brousse qui ne possède ni le personnel ni la structure organisationnelle d'autres transporteurs aériens. Pour cette raison, on pourrait s'attendre à ce que TCAC, qui fait la promotion des SGS pour l'ensemble de l'industrie de l'aviation, fournisse à ces organisations de l'information sur le concept de gestion de la sécurité et facilite l'implantation d'un SGS.

Or, TCAC n'évalue ni ne vérifie les SGS mis en place sur une base volontaire. En conséquence, le SGS d'Air Saguenay n'a pas été évalué ou assujetti à une activité de surveillance de la part de TCAC lors de la dernière inspection de validation de programme (IVP).

Les enquêtes sur l'accident à l'étude et sur d'autres événements récents soulignent la nécessité pour les exploitants de gérer efficacement les risques à la sécurité. Quoique beaucoup d'entreprises, dont Air Saguenay, aient reconnu les avantages d'un SGS et volontairement amorcé la mise en œuvre d'un tel système au sein de leur organisme, environ 90 % de tous les titulaires de certificat d'aviation canadien ne sont toujours pas tenus d'avoir de SGSNote de bas de page 71 selon la réglementation en vigueur. Plus de 10 ans après la mise en place de la première réglementation sur les SGS des exploitants aériens et des entreprises qui font la maintenance d'aéronefs, il appert que la mise en œuvre des SGS stagne.

Par conséquent, TCAC n'a aucune assurance quant à la capacité de ces exploitants de cerner et d'atténuer les risques.

À cet égard, par sa Liste de surveillance et ses recommandationsNote de bas de page 72, le Bureau a souligné le fait que si les SGS ne sont pas exigés, évalués et surveillés par TC afin d'assurer une amélioration continue, il y a un risque accru que les entreprises n'arrivent pas à repérer et atténuer efficacement les risques liés à leurs opérations.

2.3.4 Encadrement des vols touristiques

En raison du nombre et de la concentration des vols touristiques aux États-Unis, les risques associés à ces vols sont connus depuis près de 25 ans, notamment :

Il est possible de concevoir que lors de vols touristiques, le désir de faire vivre une expérience de vol mémorable aux passagers puisse inciter certains pilotes à voler trop près du relief et à effectuer des manœuvres brusques inutiles. Afin d'atténuer ces risques, des exploitants américains se spécialisant dans ce type de vols ont adopté des normes d'exploitation qui vont au-delà des exigences réglementaires.

Au Canada, la fréquence et la concentration géographique des vols touristiques sont beaucoup plus faibles. À ce jour, il n'existe aucun organisme regroupant les exploitants de vols touristiques au pays. En conséquence, chaque exploitant est laissé à lui-même pour élaborer et mettre en œuvre des normes visant à réduire les risques liés aux vols touristiques.

Air Saguenay n'avait instauré aucune norme particulière pour encadrer les pilotes qui effectuaient les vols touristiques et n'était pas tenue de le faire. En conséquence, les pilotes d'Air Saguenay, comme ceux de la plupart des exploitants de ce type de vols, étaient libres de voler selon leurs limites personnelles en tenant compte des conditions du vol et de leur interprétation de la réglementation en vigueur.

L'analyse des trajectoires des vols précédents a démontré que le pilote volait régulièrement à basse vitesse lors de virages à basse altitude. Par conséquent, il est raisonnable de conclure qu'avec le temps, la limite personnelle du pilote s'était approchée de la limite absolue des performances de l'appareil.

Par ailleurs, les données disponibles ont permis de constater que le pilote respectait toujours l'altitude imposée au-dessus de la réserve faunique. Ce n'est qu'à l'extérieur de la zone du parc, où aucun seuil d'altitude au-delà de la limite de 300 pieds AGL du RAC n'avait été établi par la compagnie, que le pilote volait à basse altitude. Il est donc raisonnable de penser qu'en l'absence de limites sur les manœuvres et l'altitude minimale imposées par la compagnie avant le vol, le pilote a volé en fonction de ses limites personnelles et a effectué un virage à grande inclinaison à quelque 110 pieds AGL.

2.4 La perte de maîtrise en vol

Après avoir survolé le parc marin du Saguenay–Saint-Laurent, le pilote a amorcé une descente qui a amené l'appareil à survoler le relief à basse altitude lors du retour vers le lac Long. Vers la fin du vol, le pilote a entrepris un virage à grande inclinaison à quelque 110 pieds au-dessus d'une colline partiellement dénudée de végétation. Les observations fauniques précédemment signalées laissent supposer que la manœuvre avait pour objet l'observation d'une famille d'ours.

C'est pendant ce virage que l'hydravion a subi un décrochage aérodynamique causant une autorotation de mise en vrille. Les circonstances portent à croire que l'augmentation du facteur de charge générée par le virage, possiblement combinée à l'illusion liée au vol en-dessous de la hauteur pivotale, ont provoqué le décrochage de l'aile gauche. Il convient toutefois de préciser qu'un décrochage en soi n'entraîne pas nécessairement un accident s'il survient à une altitude suffisante pour permettre la reprise de la maîtrise avant l'impact avec le sol. Dans le cas à l'étude, le pilote a effectué un virage à gauche à grande inclinaison, et un décrochage aérodynamique s'est produit, provoquant une mise en vrille à une altitude insuffisante pour permettre une reprise de la maîtrise de l'appareil avant l'impact à la verticale avec le sol (figure 15).

Figure 15. Mise en vrille près du sol (Source : Transports Canada, TP 1102, Manuel de pilotage, 4e édition, avec annotations du BST)
Mise en vrille près du sol

2.5 La prévention des pertes de maîtrise en vol

En vol à basse altitude, le décrochage suivi de l'autorotation de mise en vrille, aussi brève soit-elle, ne permet pas au pilote de reprendre la maîtrise de l'appareil avant l'impact avec le sol. Il est donc primordial d'agir sur les commandes avant que l'autorotation de mise en vrille se produise. Comme le démontre l'accident à l'étude, même un pilote possédant une expérience considérable peut être incapable de se rétablir d'un décrochage s'il n'en reconnaît pas les signes précurseurs.

Au moment de la certification du DHC-2 en 1948, il a été démontré que les vibrations aérodynamiques produites juste avant un décrochage constituaient un avertissement de décrochage clair et distinct. Les normes de certification ont évolué depuis, et un avertisseur de décrochage est maintenant requis pour la certification des nouveaux appareils.

Le décrochage du DHC-2 dans des conditions contrôlées a été qualifié comme étant doux, et la sortie du décrochage, conventionnelle. Toutefois, comme c'est le cas pour plusieurs autres avions, un décrochage en virage à grande inclinaison avec de la puissance motrice provoque une autorotation de mise en vrille avec peu ou pas de signes de l'imminence du décrochage.

2.5.1 Entraînement en vol sur le décrochage du DHC-2

L'entraînement en vol a pour but d'améliorer la sécurité en évitant que le pilote se trouve dans des situations à risques sans qu'il y soit préparé. L'entraînement en vol sur le décrochage dispensé par Air Saguenay se fait dans un environnement contrôlé où le pilote peut constater

Cependant, en virage à grande inclinaison avec de la puissance motrice, les signes précurseurs de décrochage sont beaucoup plus subtils et ne laissent pratiquement pas de temps au pilote pour réagir avant la perte de maîtrise lorsque l'avion amorce l'autorotation de mise en vrille. Il est probable que le C-FKRJ ait offert très peu de signes de l'imminence du décrochage alors qu'il effectuait un virage en survolant le sommet de la colline. L'entraînement en vol ne comporte pas d'exercice de décrochage en virage à grande inclinaison avec de la puissance motrice.

De par son expérience à titre d'instructeur, le pilote effectuait régulièrement des exercices de décrochage dans des conditions contrôlées. Ainsi, on ne peut pas écarter la possibilité que l'entraînement en vol ait renforcé la confiance du pilote en des caractéristiques de décrochage docile qui ne correspondent pas au comportement de l'appareil en virage à grande inclinaison avec de la puissance. Bien que le pilote ait été au fait des caractéristiques de décrochage plus brusque en virage à grande inclinaison, la formation annuelle ne lui a pas donné une expérience contextuelle représentative qui aurait pu l'aider à éviter la perte de maîtrise. Si les pilotes ne suivent pas un entraînement sur le décrochage qui démontre le comportement réel de l'avion en virage à grande inclinaison avec de la puissance, il y a un risque accru de perte de maîtrise. Finalement, si la perte de maîtrise survient près du sol, il est possible que le pilote ne dispose pas d'altitude suffisante pour reprendre la maîtrise de l'appareil avant l'impact avec le sol – comme dans l'accident à l'étude.

2.5.2 Indicateur ou avertisseur d'un décrochage imminent

L'encadrement, la surveillance des vols ainsi que la formation des pilotes sont des mesures administratives qui permettent de réduire les risques liés à la perte de maîtrise. Toutefois, à elles seules ces mesures ne suffisent pas à prévenir la perte de maîtrise accidentelle.

Au Canada, depuis 1998, 13 événements (y compris l'accident à l'étude) sont survenus à la suite d'un décrochage aérodynamique d'un DHC-2. Ainsi, en octobre 2013, le BST a exprimé une préoccupation liée à la sécurité indiquant que les vibrations aérodynamiques du DHC-2 ne fournissent pas aux pilotes un avertissement adéquat de l'imminence d'un décrochageNote de bas de page 73.

L'analyse du risque en fonction de la probabilité et de la gravité des conséquences malheureuses indique que le décrochage du DHC-2 à basse altitude comporte un niveau de risque élevé.

Vu le nombre de DHC-2 enregistrés au Canada, il est possible de conclure que ce type d'accident risque de survenir à nouveau. Par conséquent, il est raisonnable d'examiner des dispositifs qui pourraient prévenir un certain nombre de ces accidents en augmentant la conscience situationnelle du pilote de sorte qu'il puisse agir à temps pour éviter la perte de maîtrise de l'avion.

Il existe plusieurs types de systèmes de bord qui fournissent une indication continue de la marge de décrochage, certains avec une alarme, et certains qui procurent uniquement un avertissement clair et sans équivoque de l'imminence d'un décrochage.

2.5.2.1 Indicateur d'angle d'attaque

Une des solutions proposées par le National Transportation Safety Board (NTSB) des États‑Unis pour réduire le nombre d'accidents liés à la perte de maîtrise en aviation générale est l'utilisation de systèmes d'indication d'angle d'attaque. Ces systèmes procurent une information visuelle continue sur la marge de décrochage aérodynamique, peu importe l'assiette, la vitesse ou la puissance. De plus, certains de ces systèmes génèrent une alarme visuelle, sonore et même tactile avant le décrochage. Cette information conscientise le pilote afin d'éviter une perte de maîtrise. Les systèmes d'indication d'angle d'attaque ont été reconnus comme moyen d'améliorer la sécurité des vols en procurant une meilleure conscience de la marge de décrochage en tout temps, permettant de ce fait aux pilotes de réagir pour éviter la perte de maîtrise de l'avion.

2.5.2.2 Avertisseur de décrochage

Les avertisseurs de décrochage constituent un des derniers moyens de défense dans la prévention des décrochages accidentels en procurant un signal sonore et parfois visuel de l'imminence d'un décrochage aérodynamique. Leur installation sur les DHC-2 a déjà été recommandée par TCAC et Viking Air Limited (le fabricant). Les avertisseurs de décrochage ont été reconnus comme moyen d'améliorer la sécurité des vols en procurant un avertissement clair et sans équivoque d'un décrochage imminent.

2.5.2.3 Conclusion

Les systèmes d'indicateur d'angle d'attaque procurent une meilleure conscience situationnelle quant à la marge de décrochage, alors que les avertisseurs de décrochage procurent une alerte de l'imminence d'un décrochage.

Malgré l'expérience du pilote et en dépit du fait qu'il était instructeur sur le DHC-2, il n'a pas perçu l'imminence d'un décrochage aérodynamique lors du virage à grande inclinaison près du sol et il a perdu la maîtrise du C-FKRJ qui n'était muni d'aucun système d'indication ou d'avertissement. Il est raisonnable de conclure que l'absence d'un système d'indication d'angle d'attaque ou d'un avertisseur d'un décrochage imminent a privé le pilote d'un dernier moyen de défense contre la perte de maîtrise de l'avion.

3.0 Faits établis

3.1 Faits établis quant aux causes et aux facteurs contributifs

  1. Le pilote effectuait des manœuvres à marge de sécurité réduite à basse altitude. Par conséquent, ces vols comportaient un niveau de risque qui n'était pas nécessaire pour atteindre les objectifs de vols touristiques.
  2. En l'absence de limites sur les manœuvres et l'altitude minimale imposées par la compagnie avant le vol, le pilote a volé en fonction de ses limites personnelles et a effectué un virage à grande inclinaison à quelque 110 pieds au-dessus du sol.
  3. Lorsque le pilote a effectué un virage à gauche à grande inclinaison, un décrochage aérodynamique s'est produit, provoquant une mise en vrille à une altitude insuffisante pour permettre une reprise de la maîtrise de l'appareil avant l'impact à la verticale avec le sol.
  4. L'absence d'un système d'indication d'angle d'attaque ou d'un avertisseur d'un décrochage imminent a privé le pilote d'un dernier moyen de défense contre la perte de maîtrise de l'avion.

3.2 Faits établis quant aux risques

  1. Si des systèmes d'enregistrement des données de vol légers ne sont pas utilisés pour faire un suivi précis des opérations de vol, il existe un risque que les pilotes dérogent aux procédures et aux limites établies, réduisant ainsi les marges de sécurité.
  2. Si Transports Canada ne prend pas de mesures concrètes pour faciliter l'utilisation de systèmes d'enregistrement des données de vol légers et le suivi des données de vol, les exploitants risquent de ne pas pouvoir repérer de manière proactive les lacunes de sécurité avant qu'elles ne provoquent un accident.
  3. Si les pilotes n'obtiennent pas au minimum les périodes de repos réglementaires, il y a un risque que des vols soient effectués alors que les pilotes sont fatigués.
  4. Si tous les vols effectués ne sont pas consignés au carnet de vol du pilote et suivis par la compagnie, il est possible que le pilote ne reçoive pas les périodes de repos requises, ce qui augmente le risque que des vols soient effectués alors que le pilote est fatigué.
  5. Si des vols effectués ne sont pas consignés au carnet de route de l'appareil, il est possible que des échéances d'inspection, de maintenance et de vie de certains composants soient dépassées, ce qui augmente le risque de défaillance.
  6. Si les systèmes de gestion de la sécurité ne sont pas exigés, évalués et surveillés par Transports Canada afin d'assurer une amélioration continue, il y a un risque accru que les entreprises n'arrivent pas à repérer et atténuer efficacement les risques liés à leurs opérations.
  7. Si les pilotes ne suivent pas un entraînement sur le décrochage qui démontre le comportement réel de l'avion en virage à grande inclinaison avec de la puissance, il y a un risque accru de perte de maîtrise.

3.3 Autres faits établis

  1. Le remplacement de la dérive ventrale par des dérives Seafin sur le C-FKRJ était conforme aux exigences du certificat de type supplémentaire de Kenmore Air Harbor Inc.
  2. Le volant était en position à gauche (côté pilote) au moment de l'impact.
  3. Les systèmes d'indication d'angle d'attaque ont été reconnus comme moyen d'améliorer la sécurité des vols en procurant une meilleure conscience de la marge de décrochage en tout temps, permettant de ce fait aux pilotes de réagir pour éviter la perte de maîtrise de l'avion.
  4. Les avertisseurs de décrochage ont été reconnus comme moyen d'améliorer la sécurité des vols en procurant un avertissement clair et sans équivoque d'un décrochage imminent.

4.0 Mesures de sécurité

4.1 Mesures de sécurité prises

4.1.1 Air Saguenay (1980) inc.

Encadrement des vols touristiques :

Formation annuelle :

4.2 Mesures de sécurité à prendre

4.2.1 Avertisseur de décrochage

Le pilote dans l'événement à l'étude effectuait régulièrement des exercices de décrochage en conditions contrôlées à titre d'instructeur. De plus, il était au fait des caractéristiques de décrochage plus brusque du DHC‑2 en virage à grande inclinaison. Toutefois, malgré son expérience, il n'a pas su déceler l'imminence d'un décrochage avant la perte de la maîtrise de l'avion.

Un avertisseur de décrochage n'était pas requis au moment de la certification du DHC-2 en 1948, puisqu'il a été jugé  que les vibrations aérodynamiques produites juste avant un décrochage constituaient un avertissement de décrochage clair et distinct. Ainsi, il n'y a aucune exigence quant à leur installation à bord des DHC-2 dans le Règlement de l'aviation canadien. Les normes de certification ont évolué depuis, et un avertisseur de décrochage est maintenant requis pour la certification des nouveaux avions.

Dans les conditions contrôlées de certification, le décrochage du DHC-2 a été qualifié comme étant doux. Toutefois, comme c'est le cas pour plusieurs autres avions, un décrochage en virage à grande inclinaison avec de la puissance motrice provoque une autorotation de mise en vrille avec peu ou pas de signes de l'imminence du décrochage, et la trajectoire de vol passe de l'horizontale à la verticale. En vol à basse altitude, le décrochage suivi de l'autorotation de mise en vrille, aussi brève soit-elle, ne permet pas au pilote de reprendre la maîtrise de l'appareil avant l'impact avec le sol.

À la conclusion du Rapport d'enquête aéronautique A12O0071 en octobre 2013, le BST a exprimé une préoccupation liée à la sécurité indiquant que les vibrations aérodynamiques du DHC-2 ne fournissent pas aux pilotes un avertissement adéquat de l'imminence d'un décrochage. Le BST notait, entre autres, la fréquence élevée d'accidents causés par un décrochage aérodynamique ainsi que les conséquences désastreuses de ces accidents lorsqu'ils surviennent à basse altitude et lors des phases critiques de vol.

Depuis, 2 autres accidents liés au décrochage de DHC-2 sont survenus : 1 en 2014 et l'accident à l'étude, en 2015. Ainsi, au total, 13 incidents à la suite d'un décrochage aérodynamique de DHC-2 sont survenus au Canada depuis 1998.

Afin de réduire le risque de perte de maîtrise de l'avion, il faut que le pilote ait une indication immédiate et évidente de l'imminence du décrochage : immédiate parce qu'il y a urgence, et évidente pour éviter toute confusion avec un autre phénomène. En procurant un signal sonore et parfois visuel de l'imminence d'un décrochage aérodynamique, les avertisseurs de décrochage constituent un des derniers moyens de défense dans la prévention des décrochages accidentels.

Bien que Transports Canada et le fabricant, Viking Air Limited, en aient recommandé l'installation en 2014, seulement 4 avertisseurs de décrochage ont été installés sur les DHC-2 immatriculés au Canada. Présentement, 382 DHC-2 sont immatriculés au Canada, dont 223 en exploitation commerciale.

L'importance du risque est déterminée en fonction de la probabilité et de la gravité des conséquences négatives. Vu le nombre de DHC-2 en exploitation commerciale sans avertisseur de décrochage, combiné au fait que les manœuvres à basse altitude sont inhérentes au vol de brousse, il est raisonnable de conclure qu'il est probable qu'un décrochage à basse altitude survienne à nouveau. Puisque le décrochage à basse altitude implique des conséquences catastrophiques, ce type d'accident comporte un niveau de risque élevé.

Ainsi, tant que l'on n'exigera pas qu'au minimum les DHC-2 commerciaux immatriculés au Canada soient équipés d'un système avertisseur de décrochage, les pilotes et les passagers qui voyagent à bord de ces aéronefs demeureront exposés à un risque accru de blessure ou de décès comme suite à un décrochage à basse altitude.

En conséquence, le Bureau recommande que :

le ministère des Transports exige que tous les aéronefs de type DHC-2 en exploitation commerciale au Canada soient équipés d'un système avertisseur de décrochage.
Transportation Safety Recommendation A17-01

Le présent rapport conclut l'enquête du Bureau de la sécurité des transports sur cet événement. Le Bureau a autorisé la publication de ce rapport le . Le rapport a été officiellement publié le .

Annexes

Annexe A – Parc marin du Saguenay–Saint-Laurent et trajectoire du vol

Source : Supplément de vol – Canada, 20 août 2015, p. C24, avec annotations du BST
Parc marin du Saguenay–Saint-Laurent et trajectoire du vol

Annexe B – Historique de la dérive ventrale et des dérives de stabilisateurs Seafin

Date Événement
12 mars 1948 Transports Canada, Aviation civile (TCAC) publie la fiche de données de certificat de type (FDCT) A-22 pour le de Havilland Aircraft of Canada DHC‑2 (DHC-2).
12 mars 1948 La Federal Aviation Administration (FAA) publie la FDCT A-806 pour le DHC-2.
2 juin 1977 La FAA approuve le certificat de type supplémentaire (CTS) SA456NW de Kenmore Air Harbor Inc. (Kenmore) qui vise à remplacer la dérive ventrale par les dérives de stabilisateurs horizontaux (Seafin). Ce CTS est aussi approuvé par TCAC (SA00456NW).
8 avril 1991 TCAC émet la consigne de navigabilité (CN) CF-83-09R2 visant les DHC-2 en service qui sont en configuration sur flotteurs sans aucune dérive additionnelle. La consigne rappelle la nécessité d'installer soit la dérive ventrale, soit une des autres dérives approuvées, comme les dérives Seafin de Kenmore, afin d'assurer la stabilité directionnelle.
30 décembre 1992 TCAC approuve le CTS SA92-63 qui permet d'augmenter la masse maximale au décollage d'un DHC-2 sur flotteurs de 5090 à 5500 livres.
15 mai 1998 TCAC publie l'Avis de navigabilité B045 qui vise à assurer l'inter-compatibilité des différents CTS installés sur un même appareil.
14 avril 2004 Viking publie le bulletin de service 2/54 rappelant que l'installation de la dérive ventrale est requise sur tous les DHC-2 sur flotteurs, sans toutefois empêcher les modifications approuvées aux termes d'un CTS relatif au remplacement de la dérive ventrale.
31 janvier 2006 TCAC publie la révision 26 de la FDCT A-22 qui exige dorénavant d'installer une dérive ventrale lorsque l'aéronef est équipé de flotteurs, sans toutefois empêcher les modifications approuvées aux termes d'un CTS relatif au remplacement de la dérive ventrale.
16 août 2007 Accident au décollage du DHC-2 N345KA en Alaska, dans des conditions de vents forts en raison du passage d'un front (jusqu'à 35 à 40 nœuds signalés dans la région). Le N345KA avait été modifié en vertu du CTS SA92-63 (augmentation de la masse maximale à 5500 livres) avec les flotteurs EDO 679-4930. Des dérives Seafin Kenmore étaient installées; toutefois, la dérive ventrale avait été retirée.
24 avril 2008 Viking publie la lettre de service DHC2-SL-01-001 qui vise les DHC-2 modifiés en vertu du CTS SA92-63 (augmentation de la masse maximale à 5500 livres) avec l'utilisation des flotteurs EDO 58-4580 allongés ou EDO 679-4930. La lettre de service stipule que la dérive ventrale ainsi que les dérives Seafin Kenmore doivent être installées.
26 juin 2008 Selon le rapport factuel du NTSB (ANC07MA083) sur l'accident du DHC-2 N345KA survenu en Alaska :
  • 15 septembre 2004, la révision 4 des instructions d'installation du CTS (SA92-63), qui permet d'augmenter la masse maximale au décollage, comprend une liste des matériaux où la mention « optionnelle » figure à côté de la dérive ventrale, pour les propriétaires possédant déjà une dérive ventrale.
  • 27 mars 2008, Viking confirme que la dérive ventrale est « optionnelle » lorsque les dérives de stabilisateurs Kenmore sont installées. Toutefois, Viking mentionne que la dérive ventrale apporte une stabilité latérale additionnelle lorsque le DHC-2 est exploité à basse vitesse à un poids brut compris entre 5090 et 5500 livres.
  • 12 juin 2008, après une révision du CTS (SA92-63) qui permet d'augmenter la masse maximale au décollage avec les flotteurs EDO 679-4930, Viking confirme que la dérive ventrale ainsi que les dérives Seafin Kenmore doivent être installées. Viking a l'intention de corriger le texte de la révision 4 des instructions d'installation de ce CTS.
  • 20 juin 2008, Viking laisse savoir que bien que le N345KA avait été modifié selon le CTS qui permet d'augmenter la masse maximale au décollage à 5500 livres, sa masse lors du décollage de l'accident était inférieure à 5090 livres. Ainsi, Viking conclut qu'aucune caractéristique défavorable de vol n'aurait été présente pendant le vol de l'accident sans la dérive ventrale.
  • La FAA revoit l'approbation du CTS SA92-63, qui permet d'augmenter la masse maximale au décollage à 5500 livres avec les flotteurs EDO 679-4930, et est en accord avec l'avis de Viking.
11 juillet 2008 TCAC approuve la nouvelle révision des instructions d'installation du CTS SA92-63 (augmentation de la masse maximale à 5500 livres) de Viking, qui retire la mention « optionnelle » figurant à côté de la dérive ventrale dans la liste des matériaux.
29 août 2008 La FAA transmet des recommandations de sécurité à TCAC visant le DHC-2. Celles-ci, entre autres, mettent en question les caractéristiques de décrochage et suggèrent l'installation d'avertisseurs de décrochage.
16 juin 2009 Transports Canada répond que le DHC-2 en cause dans l'accident du N345KA n'était pas conforme au CTS SA92-63 (augmentation de la masse maximale à 5500 livres) avec l'utilisation des flotteurs EDO 679-4930, puisque la dérive ventrale ainsi que les dérives Seafin Kenmore devaient être installées. Ainsi, il n'était pas pertinent de se prononcer sur les caractéristiques d'un appareil en configuration qui n'était pas approuvée.

Quant aux systèmes d'avertissement de décrochage, TCAC considère que la recommandation est judicieuse, mais que l'installation d'un tel système sur les DHC-2 existants est improbable sans une modification à la réglementation.

Annexe C – Rapports d'enquête aéronautique du BST sur des accidents d'aéronefs causés par un décrochage alors que l'appareil n'était pas équipé d'un avertisseur de décrochage

Accident Type Décès Résumé
A14O0105 DHC-2 Beaver 0 Le DHC-2 Beaver équipé de flotteurs (immatriculé C-FHVT, numéro de série 284) s'est incliné sur la gauche avant l'arrondi. Le pilote a tenté de reprendre la maîtrise de l'aéronef en braquant l'aileron de droite et en donnant au maximum du palonnier droit. La manœuvre a échoué, et l'aéronef a percuté le relief boisé ascendant au-dessus du rivage. Deux des 3 occupants ont été légèrement blessés. L'appareil n'était pas équipé d'un avertisseur de décrochage.
A12O0071 DHC-2 Beaver 2 L'hydravion DHC-2 (immatriculé C-FGBF, numéro de série 168) a subi un décrochage et s'est écrasé lors d'un remise des gaz pendant l'amerrissage. Deux des 3 occupants se sont noyés. L'appareil n'était pas équipé d'un avertisseur de décrochage.
A11C0100 DHC-2 Beaver 5 L'hydravion DHC-2 (immatriculé C-GUJX, numéro de série 1132) a subi un décrochage et s'est écrasé au décollage. Les 5 occupants ont succombé à leurs blessures. L'appareil n'était pas équipé d'un avertisseur de décrochage.
A10Q0117 DHC-2 Beaver 2 Un hydravion amphibie à flotteurs DHC-2 (immatriculé C-FGYK, numéro de série 123) a subi un décrochage et s'est écrasé au décollage. Deux des 5 occupants ont succombé à leurs blessures. L'appareil n'était pas équipé d'un avertisseur de décrochage.
A09P0397 DHC-2 Beaver 6 L'hydravion DHC-2 (immatriculé C-GTMC, numéro de série 1171) a subi un décrochage et s'est écrasé au décollage. Six des 8 occupants ont succombé à leurs blessures. L'avion était équipé d'un avertisseur de décrochage, mais il ne fonctionnait pas, ce que le BST a établi comme cause ou facteur contributif de l'événement.
A08A0095 DHC-2 Beaver 0 Un hydravion DHC-2 (immatriculé C-FPQC, numéro de série 873) a subi un décrochage et s'est écrasé alors que l'équipage tentait d'effectuer un amerrissage forcé. Cinq des 7 occupants ont été grièvement blessés. L'appareil n'était pas équipé d'un avertisseur de décrochage.
A05Q0157 DHC-2 Beaver 1 Un hydravion DHC-2 (immatriculé C-FODG, numéro de série 205) a subi un décrochage et s'est écrasé au décollage. Le pilote, seul occupant à bord, a subi des blessures mortelles. L'appareil n'était pas équipé d'un avertisseur de décrochage.
A04C0098 DHC-2 Beaver 4 Un hydravion DHC-2 (immatriculé C-GQHT, numéro de série 682) a subi un décrochage et s'est écrasé pendant l'approche. Les 4 occupants ont succombé à leurs blessures. L'appareil n'était pas équipé d'un avertisseur de décrochage.
A01Q0166 DHC-2 Beaver 3 Un hydravion DHC-2 (immatriculé C-GPUO, numéro de série 810) a subi un décrochage et s'est écrasé pendant l'approche. Trois des 7 occupants ont succombé à leurs blessures. L'hydravion n'était pas équipé d'un avertisseur de décrochage, et le BST a conclu qu'il s'agissait là d'un facteur de risque.
A01P0194 DHC-2 Beaver 5 Un hydravion DHC-2 (immatriculé C-GVHT, numéro de série 257) a subi un décrochage et s'est écrasé pendant l'approche. Les 5 occupants ont succombé à leurs blessures. L'hydravion n'était pas équipé d'un avertisseur de décrochage; le BST a classé ce renseignement dans les autres faits établis.
A00Q0006 DHC-2 Beaver 3 Un DHC-2 (immatriculé C-FIVA, numéro de série 515) a subi un décrochage et s'est écrasé pendant la montée. Trois des 6 occupants ont succombé à leurs blessures. L'appareil n'était pas équipé d'un avertisseur de décrochage.
A98P0194 DHC-2 Beaver
Modifié : masse max augmentée
0 Un hydravion DHC-2 (immatriculé C-GCZA, numéro de série 1667) a subi un décrochage et s'est écrasé après avoir interrompu son approche. Les occupants n'ont pas été blessés, mais l'avion a subi des dommages importants. L'hydravion n'était pas équipé d'un avertisseur de décrochage, et le BST a établi que le fait que le pilote n'ait pas été averti de l'imminence d'un décrochage était une cause ou un facteur contributif de l'événement.