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Rapport d’enquête sur la sécurité du transport aérien A19W0094

Atterrissage dur
Bombardier DHC-8-402, C-FKWE
Aéroport international d’Edmonton (Alberta)



Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a enquêté sur cet événement dans le but de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n’est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales. Le présent rapport n’est pas créé pour être utilisé dans le contexte d’une procédure judiciaire, disciplinaire ou autre. Voir Propriété et utilisation du contenu.

Déroulement du vol

À 16 h 18Note de bas de page 1 le 19 juillet 2019, un avion Bombardier DHC-8-402 (immatriculation C-FKWE, numéro de série 4467) exploité par WestJet Encore Ltd. effectuait le vol régulier 3362 (WEN3362) en régime de vol aux instruments (IFR) entre l’aéroport de Fort McMurray (CYMM) (Alberta) et l’aéroport international d’Edmonton (CYEG) (Alberta). Deux membres d’équipage de conduite, 2 membres d’équipage de cabine et 70 passagers se trouvaient à bord. Le commandant de bord était le pilote aux commandes (PF), et le premier officier était le pilote surveillant (PM). Le temps de vol prévu était de 1 heure et 2 minutes.

Après le départ, l’avion est monté à une altitude de croisière au niveau de vol 240Note de bas de page 2. Au cours du vol, on a changé la piste d’atterrissage, de la piste 30 à la piste 20, et finalement à la piste 12 à CYEG, à cause des conditions météorologiques qui incluaient un orage dans la région. Durant l’approche finale à la piste 12, l’équipage de conduite a reçu l’autorisation d’effectuer une approche à vue. Le PF avait prévu un atterrissage avec volets réglés à 15Note de bas de page 3 et une vitesse VREFNote de bas de page 4 de 122 KIAS (vitesse indiquée en nœuds), ce qu’il a indiqué au PM durant un exposé. Au cas où il faudrait interrompre l’approche, le plan prévoyait un virage vers la droite sur le cap 270° magnétique. Le contrôleur avait approuvé cette manœuvre.

Durant la phase d’approche, le PF a ajouté 20 nœuds à la vitesse VREF en prévision d’une approche interrompue, qui exigerait de voler à grande proximité de l’orage qui approchait et un possible cisaillement du vent. On s’attendait à ce que l’atterrissage soit brusque étant donné les conditions potentielles de rafales au sol.

Lorsque l’avion se trouvait à 3 milles marins de CYEG, en vol en palier à 5000 pieds au-dessus du niveau de la mer, les volets étaient réglés à 15°, le train d’atterrissage était sorti, et sa vitesse anémométrique était de 142 KIAS, soit la vitesse VREF prévue plus les 20 nœuds ajoutés.

À 17 h 13, l’avion a posé son train d’atterrissage principal dans la zone de poserNote de bas de page 5 à une vitesse de 142 KIAS. Peu après le toucher initial des roues, le capteur de référence air-sol de l’avion a indiqué que l’avion avait brièvement repris son envol (mode air)Note de bas de page 6. Le PF a alors poussé la commande de profondeur en position maximale de piqué. Un bruit fort et une oscillation de la roue du train avant ont suivi, et l’avion a tiré vers la gauche durant le roulement sur la piste d’atterrissage.

Après l’atterrissage, l’équipage de conduite a vérifié le système intégré de communications et d’applications de l’avion, mais celui-ci n’avait consigné aucune indication d’atterrissage dur. L’équipage de conduite a ensuite quitté la piste 12 pour emprunter la voie de circulation A2. Préoccupé par la possibilité de dommages causés à l’avion durant l’atterrissage, l’équipage de conduite a immobilisé l’avion et a fait appel au personnel de maintenance.

Étant donné l’activité orageuse à proximité de l’aéroport, peu après que l’avion eut atterri, le gestionnaire en service à CYEG a émis une alerte rougeNote de bas de page 7, interdisant les préposés au sol et le personnel de maintenance de s’engager sur le terrain d’aviation. L’alerte rouge a été levée environ 45 minutes plus tard, et le personnel de maintenance de WestJet Encore Ltd. a inspecté l’avion à l’étude. Au terme d’une brève évaluation de dommages, les 2 pneus du train avant ont été remplacés, et l’équipage de conduite a circulé jusqu’à la porte de l’aérogare pour laisser descendre les passagers.

On n’a signalé aucun blessé.

Renseignements météorologiques

Le message d’observation météorologique régulière d’aérodrome (METAR) diffusé à 17 h pour CYEG – 13 minutes avant l’atterrissage – faisait état des conditions suivantes :

Une importante cellule orageuse située au nord-est de l’aéroport se déplaçait vers le sud-ouest et se trouvait au-dessus de l’extrémité de départ de la piste 12 au moment où l’avion à l’étude atterrissait (figure 1).

Figure 1. Image de télévision en circuit fermé de la piste 12 saisie à partir de la porte 54, vers le sud, juste avant l’atterrissage de l’avion à l’étude (indiqué par la flèche verte) (Source : Administration aéroportuaire d’Edmonton, avec annotation du BST)
Image de télévision en circuit fermé de la piste 12 saisie à partir de la porte 54, vers le sud, juste avant l’atterrissage de l’avion à l’étude (indiqué par la flèche verte) (Source : Administration aéroportuaire d’Edmonton, avec annotation du BST)

Renseignements sur l’équipage

Les dossiers indiquent que le commandant de bord et le premier officier possédaient les licences et les qualifications nécessaires au vol en vertu de la réglementation en vigueur.

Le commandant de bord détenait une licence de pilote de ligne – avion ainsi qu’un certificat médical valide de catégorie 1. Il avait à son actif plus de 5234 heures de vol au total, dont 1748 heures sur type.

Le premier officier était titulaire d’une licence de pilote professionnel – avion et de qualifications pour multimoteur et pour le vol aux instruments de groupe 1, ainsi qu’un certificat médical valide de catégorie 1. Il avait à son actif plus de 1028 heures de vol au total, dont 28 heures sur type.

L’examen des horaires de travail et de repos du commandant de bord et du premier officier a permis d’écarter la fatigue comme facteur contributif à cet événement.

Renseignements sur l’aéronef

L’aéronef à l’étude a été construit en 2014 et a obtenu un certificat de navigabilité la même année. Il était aménagé de manière à pouvoir transporter au plus 78 passagers.

L’aéronef était certifié, équipé et entretenu conformément aux calendriers de maintenance de WestJet Encore Ltd. et à la réglementation en vigueur.

Dommages à l’aéronef

Une fois les passagers descendus de l’avion, le personnel de maintenance de WestJet Encore Ltd. a effectué une inspection plus détaillée de l’avion à l’étude qui a révélé des ondulations dans le revêtement du fuselage (figure 2) ainsi que des dommages à la trappe gauche du train avant, à la cloison de pressurisation avant et à l’ensemble du train avant.

Figure 2. Revêtement ondulé du côté droit du nez (marqueur bleu à essuyage à sec ajouté à des fins d’illustration) (Source : BST)
Revêtement ondulé du côté droit du nez (marqueur bleu à essuyage à sec ajouté à des fins d’illustration) (Source : BST)

Renseignements de l’enregistreur de données de vol

L’avion était muni d’un enregistreur de conversations de poste de pilotage (CVR) ainsi que d’un enregistreur numérique de données de vol (DFDR), comme le stipule le Règlement de l’aviation canadien. Le CVR avait une capacité d’enregistrement de 2 heures, et le DFDR avait une capacité d’enregistrement de 140 heures.

Le manuel d’utilisation de l’aéronef stipule que le disjoncteur du CVR doit être désactivé après un incident ou un accidentNote de bas de page 8. Or, comme le système intégré de communications et d’applications de l’avion n’a présenté aucune indication d’atterrissage dur à l’équipage de conduite, celui-ci n’a pas désactivé les disjoncteurs du CVR. Après le remplacement des pneus, l’avion a circulé jusqu’à la porte, où l’équipe d’opérations techniques de WestJet Encore a désactivé les disjoncteurs des DFDR/CVR. Dans l’intervalle, l’enregistrement audio de l’événement a été écrasé, et de précieux renseignements pour appuyer l’enquête ont été perdus.

Les données consignées par le DFDR ont permis de confirmer que tous les systèmes de bord fonctionnaient normalement durant l’événement.

Ces données ont aussi indiqué que le fort braquage en piqué de la gouverne de profondeur au toucher des roues a entraîné un abaissement du nez de l’avion à un taux de 10 degrés par seconde, comparativement au taux normal de 4 degrés par seconde; il s’agissait du taux d’abaissement du nez le plus élevé enregistré au cours d’atterrissages précédents.

Procédures normales

En ce qui a trait à la vitesse d’approche et aux techniques de poser des roues, le Aircraft Operating Manual de WestJet Encore contient les directives suivantes [traduction] :

Effectuer l’approche à VREF + 5 KIAS. En cas de rafales, ajouter la moitié du coefficient de rafale jusqu’à un maximum de 10 KIASNote de bas de page 9.

À mesure que l’avion approche du seuil, réduire la vitesse anémométrique de manière à atteindre la VREF au toucher des roues dans la zone de toucher des rouesNote de bas de page 10.

Il faut rapidement poser la roue avant au sol après le poser du train principalNote de bas de page 11.

Adaptations

Étant donné les rafales durant l’approche, le Aircraft Operating Manual de WestJet Encore stipulait comme procédure normale une vitesse de référence de VREF + 5 nœuds, plus la moitié du coefficient de rafale de 15 nœuds, soit un total de VREF + 13 nœuds. Les procédures stipulaient en outre la réduction de cette vitesse une fois que l’avion survole le seuil de piste de manière à atteindre la VREF au toucher des roues. Toutefois, l’équipage de conduite avait prévu une approche à VREF + 20 nœuds, ce qu’il a effectué. L’équipage de conduite n’a pas réduit la vitesse anémométrique lorsque l’avion approchait du seuil de piste, et l’avion s’est posé à cette vitesse.

Message de sécurité

Dans l’événement à l’étude, l’équipage de conduite n’a pas réduit la vitesse de l’avion, de la vitesse de référence (VREF + 20 KIAS) à la vitesse de toucher des roues (VREF). L’équipage de conduite a abaissé le nez de l’avion à un taux supérieur à la normale, ce qui a causé des dommages à l’avion. Ces faits soulignent l’importance pour les équipages de conduite de respecter les procédures et les techniques d’exploitation établies.

Le présent rapport conclut l'enquête du Bureau de la sécurité des transports du Canada sur cet événement. Le Bureau a autorisé la publication de ce rapport le . Il a été officiellement publié le .