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Rapport d'enquête maritime M09N0031

Envahissement et naufrage
du petit bateau de pêche Sea Gypsy Enterprises
à 67 nm à l'est de Cape Spear
(Terre-Neuve-et-Labrador)
le



Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a enquêté sur cet événement dans le but de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n’est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales. Le présent rapport n’est pas créé pour être utilisé dans le contexte d’une procédure judiciaire, disciplinaire ou autre. Voir Propriété et utilisation du contenu.

Résumé

Le 12 septembre 2009, vers 11 h 29, le petit bateau de pêche Sea Gypsy Enterprises avec cinq membres d'équipage à bord a chaviré puis a coulé à environ 60 milles marins à l'est de Cape Spear (Terre-Neuve-et-Labrador). Trois des membres d'équipage ont été secourus; le corps du quatrième membre a été repêché par un hélicoptère de recherche et sauvetage du ministère de la Défense nationale. Le cinquième membre d'équipage est porté disparu.

Renseignements de base

Fiche technique du navire

Nom du navire Sea Gypsy Enterprises
Numéro d'immatriculation 819127
Port d'immatriculation St. John's (Terre-Neuve-et-Labrador)
Pavillon Canada
Type Petit bateau de pêche
Jauge brute 63
LongueurNote de bas de page 1 13,91 m
Tirant d'eau Avant : 1,3 m Arrière : 3,2 m
Construction 1996, Clark's Harbour, Nouvelle-Écosse
Propulsion Un moteur diesel Cummins d'une puissance de 373kW entraînant une seule hélice
Cargaison 30 200 kg de crevette
Équipage 5 personnes

Renseignements sur le navire

Le Sea Gypsy Enterprises était un petit bateau de pêche ponté, de type Cape Island, à coque moulée en polyester renforcé de fibre de verre. La timonerie et les emménagements étaient situées à l'avant et la salle des machines était située sous la timonerie. La coque était divisée par quatre cloisons transversales et abritait (à partir de l'avant) les emménagements, la salle des machines, une cale à poisson, le compartiment de l'appareil à gouverner et la cambuse (voir l'Annexe B). Seule la cloison entre la cale à poisson et le compartiment de l'appareil à gouverner n'était pas étanche.Note de bas de page 2

Photo 1. Le Sea Gypsy Enterprises
Le Sea Gypsy Enterprises

Le bateau était propulsé par un moteur diesel marin avec inverseur-réducteur entraînant une seule hélice à pas fixe. Un gouvernail à safran plat était monté dans l'axe longitudinal du bateau. Un presse-étoupe d'arbre porte-hélice destiné à empêcher l'infiltration d'eau dans la salle des machines était installé au droit de la cloison entre le tunnel d'arbre et la salle des machines. Il n'était pas inhabituel que le presse-étoupe présente des fuites. Quatre réservoirs de carburant diesel étaient disposés de part et d'autre de la salle des machines et de la cambuse. Une caisse à eau douce se trouvait dans le coqueron avant.

Le pont de travail arrière était entouré d'un pavois solide formant un puits. Une porte à charnières sur le côté tribord donnait accès à la timonerie, et une porte sur le pont donnait accès à la salle des machines. Une porte à charnières étanche dans la cloison arrière de la cale à poisson donnait accès au compartiment de l'appareil à gouverner.

Le pont de travail avait une seule écoutille surélevée le long de l'axe longitudinal et donnait accès à la cale à poisson. Une seule écoutille étanche à plat pont donnant accès à la cambuse était située sur le pont principal, au droit de la hanche tribord. L'écoutille était fermée par un panneau étanche en aluminium comportant six tourniquets pouvant être serrés et desserrés à l'aide d'une clé à douilles. Des dalots (quatre de chaque côté) avaient été aménagés dans le pavois à la hauteur du pont, de chaque côté.

Photo 2. Écoutille d'accès à la cambuse.
Écoutille d'accès à la cambuse.

Le bateau était doté d'une pompe de cale et à incendie à moteur. La tuyauterie principale de cale était dotée de dispositifs d'aspiration directe donnant sur les emménagements, la salle des machines et la cale à poisson. Des pompes de cale électriques submersibles étaient aussi installées dans la salle des machines, la cale à poissonNote de bas de page 3 et la cambuse.

À l'origine, le Sea Gypsy Enterprises avait 50 pieds de longueur, mais en 2000, les propriétaires ont embauché une firme d'architectes navals pour développer un plan de formes pour le bateau. En 2002, une cambuse de quatre pieds a été ajoutée à l'arrière du bateau. L'allongement du bateau a été exécuté conformément aux plans approuvés par Transports Canada (TC). Le bateau a aussi fait l'objet d'une inspection par TC.

En septembre 2008, le bateau avait fait l'objet d'un essai de stabilité, et un livret de stabilité avait été produit en janvier 2009.Note de bas de page 4 Toutefois, l'examen du livret a révélé que les calculs de stabilité du bateau étaient fondés sur la longueur initiale du bateau (50 pieds), alors que le bateau avait maintenant une longueur de 54 pieds.Note de bas de page 5

Déroulement du voyage

Le soir du 7 septembre 2009, le Sea Gypsy Enterprises appareille de Port de Grave (Terre-Neuve-et-Labrador) avec un équipage de cinq personnes pour aller pêcher la crevette. Le matin du 9 septembre, le bateau arrive sur les lieux de pêche et commence à pêcher. Dans l'après-midi du 11 septembre, la cale à poisson est remplie d'environ 29 200 kg de crevette (dans des sacs) et de 4000 kg de glace. Environ 450 kg de crevette sont stockés sur le pont et 560 kg sont stockés sur le pont supérieur à l'arrière de la timonerie. Le voyage de retour se déroule sans incident jusqu'aux environs de 11 h 9Note de bas de page 6 le 12 septembre. Puis, au cours des 15 minutes suivantes, la vitesse du bateau chute de 6,2 à 4,0 nœuds. Le capitaine en est informé. À ce moment, le bateau embarque de l'eau par-dessus les pavois.

À peu près au même moment, on remarque que le panneau d'écoutille de la cambuse qui n'avait pas été verrouillé s'est déplacé et gît en diagonale sur l'ouverture. On remarque aussi que la cambuse est complètement inondée.Note de bas de page 7 Deux membres de l'équipage remettent le panneau en place, mais comme ils sont incapables de le verrouiller à l'aide des tourniquets, ils restent debout sur le panneau pour le maintenir en place. Entre-temps, la pompe de cale de la cambuse est mise en marche. On ne remarque pas d'infiltration d'eau dans la salle des machines à partir du presse-étoupe de l'arbre porte-hélice au droit de la cloison arrière de la salle des machines.

À peu près au même moment, l'indicateur d'angle de barre de la passerelle cesse de fonctionner (l'indicateur de barre se trouve dans le compartiment de l'appareil à gouverner). Comme la pompe de cale ne suffit pas à évacuer l'eau embarquée, quatre des membres d'équipage endossent des combinaisons d'immersion. Deux membres d'équipage se rendent ensuite sur le toit de la timonerie et larguent le radeau de sauvetage bâbord. Pendant ce temps, le capitaine communique avec le Centre des Services de communication et de trafic maritimes (SCTM) de St. John's et lance un Mayday à 11 h 9. Le Centre des SCTM diffuse immédiatement un Mayday Relay.

Le bateau chavire, et au moins quatre des cinq membres d'équipage abandonnent le navire. Le capitaine, qui n'avait pas endossé sa combinaison d'immersion, se rend au radeau de sauvetage à la nage et monte à son bord. Cependant, la bosse est prise dans le gréement, et le capitaine n'arrive pas à trouver le couteau du radeau pour couper la bosse; il abandonne donc le radeau bâbord et nage jusqu'à la capsule du radeau tribord. Le radeau tribord qui est muni d'un dispositif de largage automatique se déploie, mais ne se gonfle pas. En tirant sur la bosse, le capitaine parvient à gonfler le radeau puis il monte à son bord. Inquiet que le radeau coule avec le bateau, il coupe la bosse du radeau avec le couteau. Le radeau s'éloigne alors du bateau, avec le capitaine comme seul passager. Les autres membres de l'équipage n'ont pas réussi à monter à bord de l'un ou l'autre des radeaux de sauvetage.

Environ 20 minutes après avoir chaviré, le bateau coule par 47°36′N, 051°01′W.

Recherche et sauvetage

Après la diffusion du Mayday Relay et le chavirement du bateau, le signal d'une radiobalise de localisation des sinistres (RLS) a été détecté, et la balise a continué à émettre pendant 2 heures et 56 minutes.

À 11 h 14, le Centre de coordination des opérations de sauvetage de Halifax (Nouvelle-Écosse) commence à dépêcher des ressources, notamment deux hélicoptères Cormorant et deux avions Hercules respectivement des escadrons du ministère de la Défense nationale de Gander (Terre-Neuve-et-Labrador) et de Greenwood (Nouvelle-Écosse). Deux petits appareils commerciaux sont également dépêchés; le premier se trouve à environ 170 km des lieux de l'événement; le deuxième est dépêché plusieurs heures plus tard à partir de St. John's.

Un des appareils commerciaux a été le premier à arriver sur les lieux à 11 h 51. Vers 14 h 50, un des hélicoptères avait secouru le capitaine du bateau et deux membres de l'équipage, et il avait repêché le corps d'un membre de l'équipage.

Les efforts de recherche et sauvetage ont continué jusqu'à 22 h le 14 septembre 2009, après quoi on a mis fin aux opérations et remis le dossier à la Gendarmerie royale du Canada.

Avaries au navire

Le bateau chaviré est demeuré à flot pendant une brève période avant de couler. Il n'a pas été renfloué.

L'événement n'a pas fait de pollution apparente.

Victimes

Le capitaine et deux membres de l'équipage ont souffert d'hypothermie légère. Un membre de l'équipage a perdu la vie, et un membre est porté manquant.

Certificats du navire

Le Sea Gypsy Enterprises a été inspecté pour la dernière fois par Transports Canada le 14 avril 2009, date à laquelle on lui a délivré un certificat d'inspection pour un navire autre qu'un navire à passagers ayant une jauge brute de plus de 15 tonneaux sans excéder 150 tonneaux. Le certificat était valide jusqu'au 13 avril 2013 et autorisait le navire à effectuer des voyages à proximité du littoral, classe 1.

Brevets, certificats et expérience du personnel

Le capitaine était titulaire d'un brevet de Capitaine de pêche, troisième classe, et comptait 16 années d'expérience de pêche, dont 12 en qualité de capitaine.

Le membre d'équipage de quart au début de l'événement était titulaire d'un brevet de Capitaine de pêche, deuxième classe, et comptait 9 années d'expérience de pêche.

Les cinq membres de l'équipage avaient reçu une formation aux fonctions d'urgence en mer.

Conditions météorologiques et état de la mer

Au moment de l'événement, les vents soufflaient du nord-ouest entre 20 et 25 nœuds. La température de l'air et celle de la mer étaient respectivement de 11 °C et de 9°C. Il y avait des vagues de 3 m et la visibilité était de 10 à 12 milles.

Équipement de sauvetage

Le Sea Gypsy Enterprises avait à son bord 8 gilets de sauvetage, 8 combinaisons d'immersion, un radeau de sauvetage pour 12 personnes muni d'un dispositif de largage automatique, un radeau de sauvetage pour 8 personnes muni d'un dispositif de largage automatique, 2 bouées de sauvetage et une RLS à dégagement libre.

Exigences proposées pour les dispositifs d'alarme de haut niveau d'eau de cale

À la suite de l'enquête menée sur l'envahissement et le naufrage du petit bateau de pêche Brier Mist en 1998, le Bureau a émis une préoccupation de sécurité concernant l'absence de progrès visant l'installation de systèmes d'alarme et de niveau d'eau dans les compartiments sous la ligne de flottaison. De plus, le rapport d'enquête du coroner sur le décès des cinq membres de l'équipage du Brier Mist recommandait à TC que les bateaux de pêche semblables au Brier Mist « aient l'obligation d'être munis d'un détecteur de niveau d'eau dans les cales ».

TC a indiqué son accord à ce sujet et mentionné qu'un comité directeur sur les petits bateaux de pêche se pencherait sur la question. En date de 2010, la recommandation du coroner n'avait pas encore été mise en œuvre.

Lors de la réunion du Conseil consultatif maritime canadien tenue au printemps de 2009, TC a présenté un document d'information pour consultation publique intitulé Avant-projet de Règlement sur la sécurité des bateaux de pêche. Ce document contient une proposition voulant que, à bord de tous les bateaux de pêche, sauf lorsqu'on peut voir facilement la cale, soit installée une alarme de niveau d'eau de cale élevé dans chaque compartiment étanche à l'eau.

TC a souligné que ce projet de règlement serait probablement publié dans la Gazette du Canada, Partie I, en 2011.

Analyse

La sécurité d'un navire en mer repose sur le maintien de l'intégrité de l'étanchéité à l'eau. Il importe que les écoutilles et autres ouvertures soient bien fermées pour empêcher l'infiltration d'eau. Il importe également que les membres d'équipage se rendent compte des situations qui se développent pour prendre rapidement les mesures nécessaires. Les lacunes de sécurité liées à ces questions, comme le démontre le présent événement, sont discutées dans les paragraphes qui suivent.

Scénario d'envahissement

On ne peut trop insister sur l'importance de s'assurer que les écoutilles étanches sont verrouillées d'une manière efficace en mer. Si l'on ne verrouille pas les écoutilles, sauf lorsqu'il faut les garder ouvertes lorsque l'équipage effectue des travaux, on peut compromettre la sécurité du navire.

Dans le cas qui nous occupe, le panneau d'écoutille de la cambuse était en place, mais il n'était pas verrouillé; il n'était maintenu en place que par son propre poids. Il n'était donc pas étanche et, lorsque le navire a embarqué des paquets de mer, la cambuse a également été envahie. Des calculs montrent que l'eau embarquée aurait ajouté un poids supplémentaire d'environ 13 tonnes sur l'arrière du bateau, réduisant ainsi le franc-bord du navire de quelque 68 mm.

L'envahissement de la cambuse n'aurait pas suffi en soi à faire couler le navire. Il aurait fallu une plus grande quantité d'eau qui aurait pu s'infiltrer dans le compartiment de l'appareil à gouverner par le presse-étoupe de la mèche du gouvernail. Le poids de l'eau additionnelle dans la cambuse aurait aussi accru le tirant d'eau arrière, ce qui aurait augmenté la pression d'eau sur le presse-étoupe de la mèche du gouvernail et peut-être causé une infiltration d'eau ou un défaut de fonctionnement du presse-étoupe. Un tel envahissement des fonds du bateau aurait réduit davantage le tirant d'eau arrière et, une fois le compartiment pratiquement envahi, le livet de pont aurait été immergé, entraînant une importante perte de stabilité du bateau.

Le navire n'ayant pas été renfloué, le scénario proposé ne peut être déterminé comme étant le scénario qui a mené à l'accident. Il demeure néanmoins le scénario le plus probable du fait que l'indicateur d'angle de barre (l'indicateur de barre se trouvait dans le compartiment de l'appareil à gouverner) a cessé de fonctionner peu avant que le navire coule. Ce défaut de fonctionnement donne à penser que le compartiment a pu être envahi par les fonds. En outre, il n'y avait pas de fuite visible au niveau du presse-étoupe de l'arbre porte-hélice au droit de la cloison arrière de la salle des machines, ce qui permet de penser que l'eau n'était pas évacuée par le tunnel d'arbre, mais s'accumulait dans le compartiment de l'appareil à gouverner.

Le problème des panneaux d'écoutille non verrouillés a été abordé antérieurement. En avril 1998, TC a publié le Bulletin de la sécurité des navires (BSN) numéro 06/1998, Responsabilités des propriétaires et des capitaines de navires relativement au maintien de l'étanchéité aux intempéries de leurs navires, pour rappeler aux propriétaires et aux capitaines de navire de s´assurer que les panneaux d'écoutille sont bien fermés en mer et de veiller à ce que les ouvertures donnant accès à des compartiments dans la coque soient gardées en position fermée, lorsqu'elles ne sont pas utilisées.

Détection d'infiltration d'eau et accès aux compartiments importants

Il est important de détecter rapidement toute infiltration d'eau afin de pouvoir prendre les mesures nécessaires à temps avant que la situation s'aggrave et devienne une urgence. Même dans les cas où l'infiltration d'eau ne peut être freinée, une détection rapide donne plus de temps à l'équipage pour abandonner le navire, augmentant ainsi ses chances de survie. Pour ce qui est des compartiments qui ne peuvent faire l'objet d'une inspection périodique en route (par exemple le compartiment de l'appareil à gouverner de ce bateau), l'installation de pompes automatiques et de dispositifs d'alarme de haut niveau d'eau dans les cales est une solution peu coûteuse et efficace pour alerter l'équipage. Idéalement, chaque compartiment fermé situé sous la ligne de flottaison devrait être muni d'un dispositif d'alarme et d'un dispositif pour évacuer l'eau.

Des enquêtes du BST sur des événements antérieurs ont reconnu les dangers liés aux infiltrations d'eau non détectées.Note de bas de page 8 En conséquence, TC a publié le BSN numéro 04/2000, Détection de l'envahissement sur les bateaux de pêche, qui « recommande fortement que des détecteurs d´eau (p. ex. interrupteurs à flotteur, sondes, etc.) soient installés dans tous les compartiments secs (autres que les cales à poisson) situés sous le pont supérieur qui ne font pas fréquemment l´objet de visites ». Dans le bulletin, on recommande aussi, à titre de mesure provisoire jusqu´à ce que l´installation des détecteurs d´eau dans les compartiments secs soit terminée, « qu´il soit stipulé dans les ordres permanents que l´on effectue à chaque quart des rondes de surveillance pour vérifier les niveaux d´eau et mesurer les creux ». Au mois d'août 2002, TC a publié un autre BSN, plus précisément le BSN numéro 09/2002, Systèmes d'assèchement des cales : la détection rapide peut sauver des vies, concernant l´importance des systèmes d´assèchement des cales et de détection rapide des fuites et des risques dont les exploitants doivent être conscients, et des mesures nécessaires qu'ils doivent prendre le cas échéant.

Dans le cas qui nous occupe, on ne procédait pas à une inspection visuelle périodique de la cambuse. Par conséquent, personne n'avait constaté l'infiltration d'eau jusqu'à ce que l'arrière du navire soit immergé et que la cambuse soit complètement inondée. Un dispositif d'alarme de haut niveau d'eau était installé dans la salle des machines du bateau, mais il n'y en avait pas ailleurs. Sans dispositif d'alarme, la détection rapide d'une infiltration d'eau dans la cambuse et dans le compartiment de l'appareil à gouverner n'était possible que par des inspections visuelles répétées. En outre, on ne pouvait accéder au compartiment de l'appareil à gouverner que par la cale à poisson, mais une fois la cale à poisson pleine, l'équipage ne disposait d'aucun moyen pour détecter l'infiltration d'eau dans le compartiment de l'appareil à gouverner.

Même si le compartiment de l'appareil à gouverner n'avait pas été envahi par les fonds, un navire dont l'accès aux compartiments est ainsi limité présente des risques additionnels. Par exemple, si de l'équipement essentiel fait défaut ou si un problème survient, l'accès limité à des compartiments critiques pour la sécurité pourrait causer des retards, et ainsi faire perdre un temps précieux durant une situation d'urgence. Dans le cas qui nous occupe, l'indicateur d'angle de barre (l'indicateur de barre était situé dans le compartiment de l'appareil à gouverner) a cessé de fonctionner peu avant que le navire coule, ce qui suggère que le compartiment a été envahi par les fonds. Toutefois, l'équipage n'avait aucun moyen de vérifier si c'était le cas.

Pratiques et procédures de sécurité

Le paragraphe 106(1) de la Loi de 2001 sur la marine marchande du Canada stipule, et les bonnes pratiques de navigation dictent, qu'il faut élaborer des règles d'exploitation sécuritaires du bâtiment ainsi que la procédure à suivre en cas d'urgence. De telles procédures comprennent le verrouillage de manière efficace des écoutilles étanches, l'entretien de l'équipement et la tenue d'exercices de sécurité de manière à pouvoir aider les membres d'équipage à identifier et à gérer les risques pour la sécurité. Dans le cas qui nous occupe, le navire a appareillé à destination des lieux de pêche alors que le panneau d'écoutille de la cambuse n'était pas verrouillé. Par conséquent, l'envahissement par les hauts n'a été constaté que lorsque la situation était devenue critique.

En l'absence de pratiques et de procédures de sécurité établies, il se peut que certaines conditions dangereuses ne soient pas décelées et corrigées comme il se doit.

Faits établis

Faits établis quant aux causes et aux facteurs contributifs

  1. Le panneau d'écoutille non verrouillé a permis un envahissement par les hauts de la cambuse, ce qui a accru le tirant d'eau arrière du navire.
  2. Le bateau n'étant pas équipé d'un dispositif d'alarme ou d'un autre dispositif de détection de l'infiltration d'eau, l'équipage a détecté l'envahissement trop tardivement.
  3. Une quantité d'eau additionnelle s'est probablement infiltrée dans le compartiment de l'appareil à gouverner, peut-être par le presse-étoupe de la mèche du gouvernail.

Faits établis quant aux risques

  1. Le fait de ne pas avoir un accès direct en tout temps aux compartiments critiques pour la sécurité lors d'un voyage peut compromettre la sécurité du navire et de l'équipage en cas d'urgence.
  2. En l'absence de pratiques et de procédures de sécurité établies, il se peut que certaines conditions dangereuses ne soient pas décelées et corrigées comme il se doit.

Le présent rapport met un terme à l'enquête du Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) sur cet événement. Le Bureau a autorisé la publication du rapport le .

Annexes

Annexe A - Croquis des lieux de l'événement

Annexe A. Croquis des lieux de l'événement
Croquis des lieux de l'événement

Annexe B - Plan d'ensemble du bateau

Annexe B. Plan d'ensemble du bateau
Plan d'ensemble du bateau