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Rapport d'enquête aéronautique A10Q0132

Perte de repères visuels au sol, perte de la maîtrise de l'appareil et collision avec le relief
de l'hélicoptère Eurocopter AS350-BA, C-GIYR
exploité par Héli-Excel Inc.
à 22 milles marins au nord de Sept-Îles (Québec)
le



Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a enquêté sur cet événement dans le but de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n’est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales. Le présent rapport n’est pas créé pour être utilisé dans le contexte d’une procédure judiciaire, disciplinaire ou autre. Voir Propriété et utilisation du contenu.

Synopsis

L'Eurocopter AS350-BA (immatriculé C-GIYR, numéro de série 2299), exploité par Héli Excel Inc., effectue un vol selon les règles de vol à vue de Sept-Îles (Québec) à destination du Poste Montagnais (Québec), situé à quelque 100 milles marins au nord. Il décolle à 11 h 11, heure avancée de l'Est, et 50 minutes après le décollage, le système de suivi des vols par satellite de la compagnie indique que l'appareil se trouve à 22 miles marins au nord de Sept-Îles et qu'il ne se déplace pas. On effectue des recherches et l'épave est retrouvée sur un plateau. Aucun incendie ne se déclare, mais l'appareil est détruit par la force de l'impact. Le pilote ainsi que les 3 passagers périssent. Aucun signal de détresse n'est reçu de la radiobalise de repérage d'urgence.

1.0 Renseignements de base

1.1 Déroulement du vol

Le 13 août 2010, Héli-Excel Inc. reçoit une demande d'affrètement d'un hélicoptère AS350-B2 pour transporter 4 passagers et 300 livres de bagages de Sept-Îles (Québec) au Poste Montagnais (Québec) le 17 août 2010 (Figure 1) pour le compte d'Hydro-Québec. L'hélicoptère sera ensuite basé au Poste Montagnais pendant que des travaux d'inspection et d'entretien sont effectués sur des structures d'Hydro-Québec. Le retour à Sept-Îles est prévu le 20 août 2010.

Étant donné qu'un hélicoptère AS350-B2 n'est pas disponible, Hydro-Québec convient avec la compagnie d'utiliser un hélicoptère AS350-BA, dont la masse maximale autorisée au décollage est de 330 livres inférieure au modèle AS350-B2. On convient de transporter une partie des 300 livres de bagages au Poste Montagnais, alors que le reste sera acheminé par avion. Cette entente n'est pas documentée.

Photo 1. Image satellite de la région du vol
Photo of Image satellite de la région du vol

En raison des conditions météorologiques dans la région, il n'est pas possible d'effectuer le vol en ligne droite au-dessus du relief : la cime des montagnes se trouve dans les nuages. Par conséquent, le pilote prévoit suivre les lignes de transport hydro-électriques en direction nord-est jusqu'à la rivière Moisie. Une fois dans la vallée de la rivière Moisie, le pilote pourrait suivre la voie ferrée en direction nord jusqu'au Poste Montagnais. Le temps de vol prévu est de 1 heure et 15 minutes, et le pilote prévoit une charge de carburant de 75 %, soit environ 750 livres ou 2 heures et 30 minutes d'autonomie de vol.

Les documents de volFootnote 1 prévoient un départ à 9 h 30Footnote 2 de Sept-Îles avec l'AS350 BA (C-GIYR), et avec à son bord 3 passagers, 300 livres de bagages et 75 % de carburant. On prévoit arriver au Poste Montagnais à 11 h 30.

Vers 8 h, les passagers arrivent à la base d'Héli-Excel Inc. avec environ 760 livres de bagages. En raison des conditions météorologiques défavorables au vol à vue, le gestionnaire des opérations de la compagnie informe le pilote que le vol est retardé. Le pilote avise les passagers, et ensemble, ils effectuent le chargement des bagages, constitués principalement d'outils de travail. Étant donné la masse importante des outils, le pilote réduit l'avitaillement en carburant à 60 %, soit environ 600 livres ou 2 heures d'autonomie de vol.

À 9 h, le pilote téléphone au préposé des vols d'Hydro-Québec du Poste Montagnais pour obtenir les dernières conditions météorologiques. Selon les renseignements obtenus, la cime des montagnes est dans la couche nuageuse, et le vol devra être effectué dans le fond des vallées.

À 9 h 15, le pilote avise le gestionnaire des opérations de la compagnie des nombreux bagages. On convient de transporter l'excédent de bagages par camion, de la base d'Héli-Excel Inc. à l'aéroport de Sept-Îles, où un avion décolle à 10 h 15 à destination du Poste Montagnais.

À 11 h 11, C-GIYR décolle en direction nord-est, le long des lignes de transport hydro électriques, à vitesse réduite. Quatre minutes plus tard, le pilote avise Hydro-Québec qu'il a décollé, mais qu'en raison des conditions météorologiques, un retour à Sept-Îles est possible.

À 11 h 21, l'hélicoptère survole la rivière Moisie en direction nord à 150 pieds au-dessus du sol (agl) et à une vitesse de croisière normaleFootnote 3. À 11 h 25, le pilote avise Hydro-Québec qu'il prévoit arriver au Poste Montagnais à 12 h 15.

À 11 h 27, à l'embranchement de la rivière Nipissis, au lieu de suivre la voie ferrée qui emprunte la vallée de la rivière Nipissis jusqu'au Poste Montagnais (Figure 2), le pilote demeure au-dessus de la rivière Moisie, qui bifurque en direction nord-ouest. L'hélicoptère survole la rivière Moisie à sa vitesse normale de croisière, à une hauteur d'environ 200 pieds agl.

Figure 2. Image-satellite du relief avec la trajectoire de vol de C-GIYR à l'embranchement de la rivière Nipissis
Figure of Image-satellite du relief avec la trajectoire de vol de C-GIYR à l'embranchement de la rivière Nipissis

À 11 h 35, le pilote cesse de suivre la rivière Moisie et emprunte une vallée à sa droite en direction nord-est vers le Poste Montagnais. À 11 h 43, il fait demi-tour pour revenir à la rivière Moisie et la suivre à nouveau, mais en direction sud. Le demi-tour s'effectue à une altitude d'environ 1900 pieds au-dessus du niveau de la mer (asl), où la cime des montagnes atteint plus de 2000 pieds.

À 11 h 54, l'hélicoptère est à environ 9 milles marins (nm) au nord de l'embranchement de la rivière Nipissis. Il bifurque en direction est, quitte la vallée de la rivière Moisie, suit le relief ascendant et, quelques minutes plus tard, atteint un plateau, à une altitude d'environ 1700 pieds asl. L'appareil se situe à environ 80 pieds agl et sa vitesse sol est de 38 nœuds.

À 11 h 59, l'hélicoptère survole le sommet du plateau, toujours à une hauteur d'environ 80 pieds agl, et progresse à une vitesse sol moyenne de 26 nœuds. Cette position est la dernière position transmise par le système de suivi des vols par satellite.

À 12 h 01 min 5 s, l'hélicoptère atteint l'extrémité sud-est du plateau, où le sol descend rapidement en direction de la vallée de la rivière Moisie. L'hélicoptère amorce une montée qui culmine environ 300 pieds au-dessus du plateau en virage à gauche, et moins de 4 secondes plus tard, l'appareil percute le sol à un angle prononcé en direction nord-ouest (Figure 3). L'accident survient à 12 h 01 min 37 s.

Figure 3. Image-satellite du relief et profil de vol indiquant la position de l'hélicoptère à des intervalles de 1 seconde, immédiatement avant l'accident
Figure of Image-satellite du relief et profil de vol indiquant la position de l'hélicoptère à des intervalles de 1 seconde, immédiatement avant l'accident

À 12 h 05, le responsable du suivi des vols d'Hydro-Québec au Poste Montagnais remarque sur le système de suivi des vols par satellite que C-GIYR est immobile depuis 11 h 59 et communique avec le gestionnaire des opérations d'Héli-Excel Inc. Celui-ci communique avec le Centre principal de contrôle des missions à Trenton (CMCC), qui confirme n'avoir reçu aucun signal de détresse provenant de la radiobalise de repérage d'urgence (ELT) de C-GIYR.

À 13 h 28, le gestionnaire des opérations décolle de la base de Sept-Îles et trouve l'épave de C GIYR 14 minutes plus tard.

1.2 Tués et blessés

Blessures Membres d'équipage Passagers Autres personnes
Mortelles 1 3 0
Graves 0 0 0
Légères/Aucune 0 0 0

1.3 Dommages à l'aéronef

La force d'impact de l'accident a complètement détruit l'hélicoptère.

1.4 Autres dommages

Environ 187 litres de carburéacteur de type JET A-1 se sont déversés.

1.5 Renseignements sur le personnel

Le pilote a commencé sa formation sur hélicoptère en mars 2007 et a obtenu sa licence de pilote professionnel canadienne le 2 novembre 2007. Le pilote comptait 105,8 heures de vol, dont 39,3 heures à titre de commandant de bord sur un hélicoptère.

Le 26 mars 2008, le pilote est embauché par Héli-Excel Inc. à Sept-Îles à titre d'employé à tout faire. À l'occasion, il pilote les hélicoptères pour des vols de convoyage ou autres vols non payants. En 2008 et 2009, le pilote accumule environ 66 heures de vol avec des pilotes expérimentés, dont 20 heures de vol avec l'AS350. Au printemps 2010, le pilote commence sa première saison à titre de pilote professionnel chez Héli-Excel Inc. et reçoit la formation au sol et en vol requis par le Règlement de l'aviation canadien (RAC). Le 21 juin 2010, le pilote réussit sa vérification de compétence pilote et sa qualification de type avec l'AS350.

Le pilote possédait la licence et les qualifications nécessaires au vol en vertu de la réglementation en vigueur. Au moment de l'accident, le pilote avait accumulé un total d'environ 235 heures de vol, dont 113 heures à titre de commandant.

Le pilote avait reçu, entre autres, une formation sur la prise de décisions, qui consiste en une lecture de diapositives qui se trouvent dans la trousse éducative de Transports Canada (TC)Footnote 4. Celle-ci revoit le processus de prise de décisions, les facteurs agissant sur le rendement de l'être humain, l'erreur humaine et la gestion des risques.

Puisque le pilote n'avait pas l'expérience minimale prévue au RAC dans le cadre de la spécification d'exploitation qui permet le vol selon les règles de vol à vue (VFR) en conditions de visibilité réduite, sa limite de visibilité en vol était de 1 mille terrestre (sm).

Le pilote n'avait pas reçu de la compagnie une formation sur les éléments suivants, et le RAC ne l'exige pas :

Le pilote avait effectué le trajet au Poste Montagnais à plusieurs reprises antérieurement. Ce vol n'était pas considéré comme étant difficile en raison de la voie ferrée qui longe les rivières Moisie et Nipissis jusqu'au Poste Montagnais. De plus, les aires d'atterrissage d'hélicoptères à utiliser sont exemptes d'obstacles.

La semaine précédant l'accident, le pilote avait effectué 7 vols totalisant 5,9 heures. Le matin du 17 août 2010, le pilote avait bénéficié de 14 heures de repos, précédées de 2 jours de congé, avant d'entamer sa deuxième journée de travail. Rien ne porte à croire que le rendement du pilote avait pu être affecté par un manque de sommeil ou un problème de santé le jour de l'accident.

1.6 Renseignements sur l'aéronef

C-GIYR était entretenu par l'organisme de maintenance agréé (OMA) d'Héli-Excel Inc., conformément à la réglementation et au programme de maintenance et d'inspection en vigueur. L'appareil totalisait 5475,1 heures de vol. L'hélicoptère avait passé une inspection de 100 heures le 28 mai 2010 et avait effectué 81,7 heures de vol depuis.

Au moment de l'accident, le turbomoteur, un Turbomeca Arriel 1B (numéro de série 4816TEC) totalisait 3831 heures de vol. L'examen du moteur et de ses accessoires n'a révélé aucune anomalie antérieure à l'impact qui aurait empêché le moteur de fonctionner normalement. On a retrouvé de la végétation dans la chambre d'admission du compresseur et dans la chambre de combustion. Les aubes de compresseur et les arbres d'entraînement reliés à la turbine de puissance exhibaient de la déformation caractéristique d'un moteur qui produisait de la puissance au moment de l'impact. L'examen des instruments moteurs a permis d'établir qu'au moment de l'impact, le régime du rotor principal était dans sa plage normale d'opération et le couple du moteur avait atteint le maximum permis.

L'examen des commandes de vol n'a révélé aucun élément permettant de croire à une défaillance ou à un mauvais fonctionnement avant l'accident.

Le tableau de bord avec le système de positionnement mondial (GPS) intégréFootnote 5, le panneau annonciateur, l'ELT et les composants du système de suivi et de télémesures de données par satelliteFootnote 6 ont tous été acheminés au Laboratoire du BST. L'hélicoptère n'avait pas d'indicateur d'assiette ou de conservateur de cap, et la réglementation n'en exige pas pour effectuer des vols VFR. L'examen du GPS intégré, de l'anémomètre, du variomètre et de l'altimètre n'a révélé aucune information utile à l'enquête.

Le panneau annonciateur est composé de 18 voyants, chacun muni de 2 ampoules incandescentes pour alerter le pilote de conditions qui requièrent son attention. L'examen des filaments des voyants ENG P et BLEED VALVE a révélé qu'ils étaient étirés, suggérant qu'ils étaient allumés au moment de l'impact. Puisque la pression d'huile du moteur est utilisée pour indiquer le couple du moteur et que celle-ci était à son maximum au moment de l'impact, il est possible de conclure que la pression d'huile était normale au moment de l'impact. Le voyant BLEED VALVE est vert et allumé lorsque la soupape de purge est ouverte. En vol, à environ 40 nœuds, le voyant reste allumé et prend au moins 1 seconde avant de s'éteindre lors d'une application rapide de puissance. Par conséquent, dans le contexte des derniers moments du vol, l'illumination de ces 2 voyants n'infirme pas la conclusion du démontage, c'est-à-dire que le moteur produisait de la puissance au moment de l'impact.

L'ELT de marque Kannad, modèle AF-COMPACT (numéro de série 2620805-0135) transmet sur les fréquences 121,5 MHz et 406 MHz. Elle est installée dans le compartiment à bagages arrière droit et l'antenne est positionnée sur le dessus de la cabine, près de l'entrée d'air du moteur. L'ELT, qui était toujours reliée au fil de l'antenne, ne démontrait aucun signe de dommage et l'interrupteur était en position ARM.

Lors d'un impact, l'ELT s'active et transmet un signal d'essai. Par la suite, l'ELT émet un signal de détresse toutes les 50 secondes. Le système COSPAS-SARSATFootnote 7 reçoit tous les signaux d'ELT, incluant le signal d'essai. Toutefois, le signal d'essai est filtré et n'est pas transmis au CMCC à Trenton. Puisque l'antenne a été sectionnée lors de la séquence de désintégration, COSPAS-SARSAT n'a pas reçu le signal de détresse.

Les composants du système de suivi et de télémesures de données par satelliteFootnote 8 installé à bord de l'hélicoptère enregistrent les données toutes les 4 secondes. Les données sont par la suite transmises par satellite au serveur Web, qui montre la position de l'appareil toutes les 2 minutes sur une carte géographique. Les données du serveur, dont l'heure, la position et l'altitude, ont permis de recréer la trajectoire approximative du vol.

La lecture de la carte du circuit imprimé à bord de C-GIYR a permis d'obtenir la position de l'hélicoptère aux 4 secondes pendant les 7,5 dernières minutes du vol. Le calcul de cette trajectoire en fonction de la vitesse a ensuite permis d'établir la position à chaque seconde pendant ces dernières minutes de vol (Figure 3).

La quantité de carburant à bord est affichée en pourcentage de la capacité maximale du réservoir de 540 litres, soit environ 1000 livresFootnote 9 à 100 %. La consommation de carburant en vol est d'environ 300 livres à l'heure. Lorsque la quantité de carburant utilisable dans le réservoir diminue à 104 livres, correspondant environ à 20 minutes de vol, le voyant bas niveau de carburant (FUEL) s'allume sur le panneau annonciateur. Cette quantité correspond à la réserve additionnelle minimale requise par le RACFootnote 10 de 20 minutes.

Au départ de la base de Sept-Îles, C-GIYR contenait 60 % de carburant, soit environ 600 livres ou 2 heures de vol, incluant la réserve minimale de 20 minutes.

1.6.1 Masse et centrage

La demande initiale d'affrètement d'Hydro-Québec faisait état de l'utilisation d'un AS350 B2 avec 4 passagers et 300 livres de bagages. L'AS350-B2 a une masse à vide similaire à l'AS350 BA, alors que sa masse maximale autorisée au décollage est plus élevée de 330 livres, soit 4960 livres. Selon la carte des poids d'un AS350-B2, avec 60 % de carburant et 4 passagers, il est possible de transporter un maximum de 272 livres de bagages.

Item Poids
(livres)
Poids à vide C-GIYR 2925,5
Trousse de survie 90
Carburant 599,4
Pilote 280
Passagers 561
Bagages 561,9
Total 5017,8

Puisqu'un AS350-B2 n'était pas disponible, la demande a été modifiée pour utiliser un AS350 BA, incluant la prise d'autres mesures en cas de bagages excédentaires. Selon la carte des poids de C GIYR (AS350 BA), avec 60 % de carburant et 4 passagers, il est possible de transporter un maximum de 162 livres de bagages (Annexe C). Dans ces conditions, avec 4 passagers, C GIYR aurait une surcharge de 250 livres.

Une balance se trouve à l'intérieur du hangar, mais n'a pas été utilisée lors du chargement. Toutefois, l'enquête a établi que les passagers totalisaient 761,9 livres de bagages, soit 561,9 livres récupérées de l'épave et pesées à Sept-Îles, ainsi que 200 livres qui avaient été retirées et envoyées par avion au Poste Montagnais.

Le poids du pilote était de 280 livres. Le poids réel de chacun des 3 passagers n'étant pas disponible, on a utilisé le poids moyenFootnote 11 d'un homme, en été et sans bagages à main, soit 187 livres, pour déterminer que la masse au décollage de C GIYR était de 5105,8 livres (Tableau 2). La masse maximale autorisée au décollage de l'AS350-BA (C GIYR) était de 4630 livres.

1.7 Conditions météorologiques

Le matin du vol en question, les conditions météorologiques à Sept-Îles faisaient état d'un écoulement d'air du fleuve vers le littoral, provoquant des conditions de nuages bas à 300 pieds et une visibilité réduite à 1 sm dans la bruine légère et la brume. Une amélioration des conditions était prévue après 10 h.

La région du vol, au nord de Sept-Îles, était recouverte d'une zone nuageuse liée à l'approche d'un front froid qui se déplaçait vers l'est. Selon la carte de prévision de zone graphique valide à 8 h, la zone nuageuse était constituée entre autres d'une couche nuageuse fragmentée à 3000 pieds agl et une visibilité de 6 sm (Annexe B). On y retrouvait également des cumulus bourgeonnants épars ayant des sommets pouvant atteindre 14 000 pieds, créant un risque d'averses de pluie légère et de la brume qui pourraient réduire la visibilité à 5 sm et des plafonds à 800 pieds agl. Toutefois, l'image radar de la région du vol ne démontre pas d'échos qui pourraient indiquer la présence de cumulus bourgeonnants dans la région. Aucun AIRMETFootnote 12 ni SIGMETFootnote 13 n'ont été émis pour la région le jour de l'accident.

L'observation météorologique régulière pour l'aviation (METAR) de 9 h de l'aéroport de Sept-Îles, qui est situé à environ 7 nm au sud-est de la base d'Héli-Excel Inc., indiquait des vents du 100° vrai (V) à 11 nœuds avec des rafales à 17 nœuds, une visibilité de 4 sm, un plafond à 200 pieds et une température de 15 °C. À 10 h, la visibilité a augmenté à 10 sm et le plafond à 300 pieds. À 11 h, la visibilité était de 8 sm et le plafond toujours à 300 pieds.

Selon le rapport des conditions météorologiques au Poste Montagnais obtenu avant le départ, le plafond était à 900 pieds agl, la visibilité était de 20 sm et le vent soufflait du 200° magnétique (M) à 10 nœuds. La présence de plafonds inférieurs à la cime des montagnes avec une visibilité adéquate au VFR sous la couche a été rapportée par d'autres pilotes d'hélicoptères évoluant dans la vallée des rivières Moisie et Nipissis.

Le vol s'est déroulé dans l'espace aérien non contrôlé, à une altitude inférieure à 1000 pieds agl, selon les règles de vol VFR. Dans ces conditions, la visibilité minimale en vol est de 1 smFootnote 14 et l'hélicoptère doit être utilisé hors des nuages. Lorsque les conditions météorologiques sont inférieures aux minimums pour le vol VFR, elles sont définies comme étant des conditions météorologiques de vol IMC.

1.8 Aides à la navigation

S.o.

1.9 Télécommunications

S.o.

1.10 Renseignements sur l'aérodrome

S.o.

1.11 Enregistreurs de bord

L'hélicoptère n'était ni équipé d'un enregistreur de données de vol (FDR) ni d'un enregistreur de conversations de poste de pilotage (CVR), et la réglementation ne l'exigeait pas.

1.12 Renseignements sur l'épave et sur l'impact

Le sabot de queue a laissé un sillon rectiligne d'environ 6 pieds devant le cratère causé par l'impact de l'hélicoptère. La bordure du cratère a un angle d'environ 45° et sa profondeur atteint quelque 3 pieds. La poutre de queue a été sectionnée, les 2 patins et le panier de transport sont restés au fond du cratère (Figure 4). Le rotor principal a traversé l'avant de la cabine et a sectionné le tableau de bord. L'hélicoptère a ensuite rebondi pour terminer sa course sur le dos 90 pieds plus loin.

Figure 4. Photos du site de l'accident montrant l'épave et la trajectoire de désintégration
Figure of Photos du site de l'accident montrant l'épave et la trajectoire de désintégration

1.13 Renseignements médicaux et pathologiques

L'examen des dossiers médicaux du pilote auprès de TC n'a révélé aucune condition médicale ou pathologique susceptible d'influencer l'exercice de ses fonctions.

1.14 Incendie

Il n'y a pas eu d'incendie après impact.

1.15 Questions relatives à la survie des occupants

S.o.

1.16 Essais et recherches

S.o.

1.17 Renseignements sur les organismes et la gestion

1.17.1 Renseignements sur la compagnie

Héli-Excel Inc. est détenteur d'un certificat d'exploitation valide et sa base est située environ 7 nm au nord-ouest de l'aéroport de Sept-Îles. Au moment de l'accident, Héli-Excel Inc. exploitait une flotte de 20 hélicoptères, soit des appareils Bell 205, Bell 206, Bell 206L, Bell 214B 1, Eurocopter AS350-B, BA, B2, D et AS355-F. Les appareils sont exploités selon les sous-parties 2 et 3 de la Partie VII du RAC. Le vol en question était exploité en vertu de la sous partie 3, soit l'exploitation d'un taxi aérien.

Héli-Excel Inc. détient la spécification d'exploitation numéro 5, permettant le vol VFR de jour dans l'espace aérien non contrôlé où la visibilité en vol est inférieure à 1 sm, soit jusqu'à une limite de ½ sm. Toutefois, les conditions de la norme 723.28 du RAC doivent être respectées. En particulier, le pilote doit avoir accumulé 500 heures de vol à titre de commandant de bord d'hélicoptères. Les opérations commerciales de la compagnie sont assujetties à un système de contrôle d'exploitation de type D selon lequel le gestionnaire des opérations peut déléguer au commandant de bord le contrôle d'exploitation d'un vol, tout en demeurant responsable de l'exploitation de l'ensemble des volsFootnote 15.

Le gestionnaire des opérations doit s'assurer que les opérations aériennes sont exécutées conformément au RAC, aux normes concernant les services aériens commerciaux et aux politiques et consignes du manuel d'exploitation de la compagnie (MEC)Footnote 16. De plus, les vols VFR de jour, effectués depuis la base d'opérations, doivent être préalablement autorisés par le gestionnaire des opérations ou le chef pilote.

Le commandant de bord est responsable de l'exploitation et de la sécurité de l'aéronef sous son commandement ainsi que de la sécurité des personnes à bord. Par conséquent, il prend les décisions sans appel concernant l'utilisation de l'aéronef tant qu'il en est responsableFootnote 17. Il est tenu de s'acquitter de ses fonctions dans le respect du RAC.

Selon le MEC, le commandant de bord est tenu de s'assurer que les masses au décollage et à l'atterrissage ne dépassent pas les masses maximales précisées dans le manuel de vol de l'hélicoptère homologué. Toutefois, si le commandant utilise un modèle de chargementFootnote 18, il n'est pas nécessaire de faire un calcul détaillé de la masse et du centrage avant chaque vol.

Les modèles de chargement sous forme de cartes des poids permettent d'établir rapidement la charge de bagages maximale en fonction du carburant et du nombre de passagers transportés (Annexe C). Aucun document de vol ne fait état du poids transporté à bord des hélicoptères d'Héli-Excel Inc. et la réglementation ne l'exige pas.

1.17.2 Surveillance réglementaire

Transports Canada élabore et administre des politiques et des règlements pour le réseau de transport aérien civil. Le programme de sécurité aérienne de TC a pour objectif de gérer les risques à des niveaux acceptables au moyen d'une approche systémique. La mise en place de systèmes de gestion de la sécurité (SGS) au sein du milieu de l'aviation change la façon dont TC conçoit ses responsabilités en matière de surveillance.

Les méthodes de surveillance classiques ont été remplacées par des évaluations et des inspections de validation de programme (IVP)Footnote 19 qui constituent les principaux outils de surveillance. L'évaluation et l'IVP servent à mesurer l'efficacité du contrôle des opérations et le niveau de conformité au RAC, mais l'IVP constitue plutôt une méthode de surveillance périodiqueFootnote 20. Transports Canada effectue des interventions et des inspections supplémentaires au besoin, et selon les ressources disponibles. De plus, des vérifications sur le terrain de tous les appareils présents sont occasionnellement effectuées. Entre 2005 et 2010, TC a effectué 14 vérifications sur le terrain au Québec, dont 2 à Sept-Îles. Toutefois, aucune de celles-ci ne portait spécifiquement sur le vol d'hélicoptères en surcharge.

Selon la Liste de surveillance du BST publiée en 2012, TC n'effectue pas toujours un contrôle efficace des sociétés de transport aérien qui sont en voie de se doter d'un SGS, et certaines sociétés ne sont même pas tenues d'adopter un tel système.

Mis en œuvre correctement, les SGS permettent aux sociétés aériennes de déterminer elles-mêmes les dangers, de gérer les risques et d'élaborer des processus efficaces de sécurité et d'y adhérer. Les grands transporteurs commerciaux canadiens sont tenus d'avoir un SGS depuis 2005. Toutefois, on a retardé la mise en œuvre des SGS pour les plus petits exploitants, comme les exploitants de taxis aériens et les entreprises de travail aérien et de service aérien de navette, afin de leur offrir plus de temps pour améliorer leurs procédures, leur formation et leurs documents d'orientation. Pourtant, de 2002 à 2011, ce groupe dans son ensemble a enregistré 91 % des accidents d'aéronefs commerciaux et 93 % des pertes de vie attribuables aux accidents d'aéronefs commerciaux. Transports Canada indique que toutes les organisations d'aviation civile réglementées devront avoir mis des SGS en œuvre d'ici 2015.

Le BST propose que TC surveille efficacement l'intégration des pratiques liées aux SGS dans les activités courantes. En outre, toutes les sociétés aériennes doivent adopter de telles pratiques.

Héli-Excel Inc. utilise un SGS bien qu'il ne soit pas requis par le RAC. Son efficacité n'a donc pas été vérifiée par TC.

L'IVP d'Héli-Excel Inc., réalisée en février 2010, n'a relevé aucun point de non-conformité au contrôle des opérations puisqu'elle respectait tous les critères de mesures. De plus, une note supérieure a été accordée puisqu'Héli-Excel Inc. respectait 5 des 8 éléments des critères de mesure pour une note parfaite.

1.17.3 Surveillance par certains grands utilisateurs de services héliportés

En général, les clients qui utilisent les services aériens commerciaux d'hélicoptères se fient sur l'exploitant et le pilote pour assurer la sécurité des vols. Toutefois, l'employeur est responsable de ses employés en matière de santé et de sécurité au travail, et doit prendre les précautions raisonnables pour que le lieu de travail soit sécuritaire. Dans ce contexte, certains grands utilisateurs de services héliportés, dont Hydro-Québec, choisissent d'instaurer leurs propres mesures de surveillance et critères supplémentaires aux normes du RAC.

1.17.3.1 Société de protection des forêts contre le feu

La Société de protection des forêts contre le feu (SOPFEU) est un organisme privé à but non lucratif qui a pour mission la prévention, la détection et la suppression des incendies de forêt. La SOPFEU évalue chaque type d'hélicoptère avant son utilisation, afin de confirmer sa viabilité dans le cadre des opérations et du respect du RAC. L'équipement utilisé par le personnel est catégorisé en mission type et pesé. De plus, les travailleurs sont pesés afin d'établir, au préalable, le poids du personnel et de l'équipement transporté à bord des hélicoptères. Tout équipement supplémentaire est pesé à la base avant le déploiement.

Le pilote établit le carburant nécessaire pour la mission et, en fonction de la masse maximale autorisée au décollage de l'hélicoptère, calcule la charge maximale pouvant être transportée. Cette limite de charge est ensuite utilisée pour établir le nombre de personnes, avec leur équipement, pouvant être transporté.

La SOPFEU dispense une formation annuelle spécifique à ses procédures aux pilotes et au personnel transporté par hélicoptère. Finalement, un système de rapports confidentiels est instauré afin que les usagers puissent signaler des incidents ou soulever des inquiétudes liées aux opérations de la SOPFEU.

1.17.3.2 Ministère des richesses naturelles de l'Ontario

Les services d'aviation du ministère des Richesses naturelles (MNR) satisfont aux besoins du ministère à l'égard de services d'aviation spécialisés et offrent ou organisent un transport aérien non prévu pour les membres du gouvernement de l'Ontario. L'équipement utilisé est pesé et catégorisé en fonction du travail à effectuer.

Le MNR produit un formulaire de calcul de la masse au décollage de l'hélicoptère. Le poids réel des passagers est utilisé avec le poids préétabli des trousses de travail pour remplir le formulaire avant le vol ou la série de vols prévus. Le formulaire est ensuite signé par le chef d'équipe du MNR et le pilote pour attester que la limite de masse maximale autorisée au décollage de l'hélicoptère est respectée.

Le service d'aviation du MNR dispense de la formation aux nouveaux pilotes assignés aux opérations du MNR, et de la formation est dispensée au personnel du MNR voyageant par hélicoptère chaque année. Les politiques du MNR sont établies en vue d'assurer le respect des limites de masse et de centrage des hélicoptères.

À l'occasion, les trousses de travail sont pesées sur le terrain, afin de s'assurer que le poids maximum préétabli est respecté. Finalement, le SGS du MNR incorpore un mécanisme qui permet aux utilisateurs de rapporter tout incident, expériences jugées non sécuritaires, ou toute situation qui pourrait constituer une menace à la sécurité des vols.

1.17.3.3 Hydro-Québec

L'unité du Transport aérien d'Hydro-Québec utilise les services de plusieurs exploitants au Québec pour effectuer le travail aérien par hélicoptère. La moyenne annuelle dépasse les 15 000 heures de vol, plaçant Hydro-Québec au premier rang des clients requérant des services héliportés au Québec. En 1992, à la suite d'une série d'accidents, Hydro-Québec a mis en place un programme de qualification et d'audit technique afin d'évaluer les compagnies aériennes utilisées par Hydro-Québec. Ce programme visait principalement à vérifier que les transporteurs entretiennent leurs aéronefs en conformité avec le RAC.

En 2005, Hydro-Québec a développé une méthode d'évaluation technique des transporteurs qu'elle utilise. L'implantation de cette méthode est effectuée en collaboration avec l'École nationale d'aérotechnique (ENA), et produit un rapport d'évaluation audit de qualité (REAQ). Les audits sont effectués en moyenne tous les 18 mois. Par la suite, Hydro-Québec rédige un bilan d'évaluation, en fonction de l'historique des évaluations du transporteur et du respect des exigences contractuelles, qui est exprimé en pourcentage. Selon le pourcentage obtenu, le transporteur se voit attribuer un certain niveau de qualificationFootnote 21. Lorsqu'Hydro-Québec fait un appel d'offres de services héliportés, le niveau de qualification minimale est précisé.

Héli-Excel Inc. a passé un audit de qualification le 24 février 2010 et le résultat du bilan d'évaluation accorde un niveau de qualification R2, soit le deuxième plus haut niveau.

Lorsqu'un groupe de travail d'Hydro-Québec requiert des services héliportés, il transmet ses exigences à l'unité du Transport aérien d'Hydro-Québec, qui transmet la demande d'affrètement aux transporteurs qualifiés, selon une charte de prix déposée en soumission. La logistique du vol est par la suite coordonnée entre le requérant et le transporteur. Les transporteurs avec qui on communique ont le choix d'effectuer ou non l'affrètement.

Hydro-Québec exige que le pilote ait un minimum de 800 heures de vol au total, dont 100 heures sur le type d'hélicoptère utilisé, pour effectuer le transport de personnel. Toutefois, le minimum est réduit à 250 heures de vol au total si le pilote a complété le programme de formation spécifique de l'Association québécoise du transport aérien (AQTA). Le pilote n'avait pas complété cette formation.

Le feuillet d'information pour les passagers, produit par Hydro-Québec, est un rappel des consignes de sécurité pour voyager à bord d'un hélicoptèreFootnote 22.

1.18 Renseignements supplémentaires

1.18.1 Le vol VFR en conditions IMC

En 1998, TC a publié un rapport d'étude du Groupe de travail chargé de l'examen de la sécurité de l'exploitation d'un taxi aérien (SATOPS)Footnote 23, qui se penche entres autres, sur le vol VFR en conditions de visibilité inférieures aux minimums prescrits par la réglementation. Parmi les recommandations visant à réduire le nombre d'accidents, le groupe de travail soulève la nécessité d'une surveillance accrue et d'une application plus stricte de la réglementation de la part de TC. À ce moment, TC s'était fixé comme objectif de réduire de moitié la moyenne quinquennale des accidents en exploitation de taxis aériens d'ici 2005.

En 2005, à l'International Helicopter Safety Symposium (IHSS), symposium international sur la sécurité des opérations héliportées, on a constaté que le taux d'accidents est demeuré inchangé au cours des 20 dernières années. En conséquence, l'équipe International Helicopter Safety Team (IHST) a été formée avec l'objectif de réduire le taux d'accidents héliportés de 80 % sur 10 ans. L'IHST a par la suite mandaté l'équipe Joint Helicopter Safety Analysis Team (JHSAT) pour analyser les données d'accidents et émettre des recommandations visant à réduire le taux d'accidents d'hélicoptères. Le rapport de l'équipe JHSAT, publié en 2007, contient 127 recommandations liées à la sécurité, dont certaines visant en particulier le vol VFR en conditions IMC. Toutefois, en 2012, ces recommandations ne sont toujours pas incorporées dans les opérations héliportées au Canada.

En 2007, TC a ensuite publié une autre étudeFootnote 24 sur le vol VFR en conditions défavorables qui souligne l'effet des pressions des clients comme facteurs d'aggravation des risques pour les opérations.

L'Australian Transport Safety Bureau a publié une étudeFootnote 25 en 2007 qui démontre que 75,6 % des accidents liés aux vols VFR en conditions IMC résultent en pertes de vie. De plus, aux États Unis en 2008, 88 % des accidents liés aux vols VFR en IMC ont entraîné des accidents mortels comparés à 17 % pour les autres types d'accidents.

Les données du BST démontrent des résultats similaires; 80 % des accidents liés à la perte de références visuelles provoquent des fatalités, alors qu'ils ne représentent que 15 % de tous les accidents. De plus, les rapports d'enquêtes aéronautiques du BSTFootnote 26 ont soulevé les risques entourant les vols VFR en conditions IMC à plusieurs reprises, et ont cité spécifiquement la poursuite du vol VFR en conditions IMC comme fait établi quant aux causes et aux facteurs contributifs.

L'étude de sécurité du BST (90-SP002) semble indiquer que les compétences de vol aux instruments des pilotes d'hélicoptère qui ont obtenu leur licence plus récemment (et qui ont donc acquis une expérience élémentaire du vol aux instruments avant de pouvoir obtenir leur licence) s'estomperont si elles ne sont pas mises en pratique. Ainsi, ils risquent de perdre tout le bénéfice qu'ils pourraient tirer de l'apprentissage des techniques de vol avancées qu'ils ont reçu durant l'entraînement nécessaire à l'obtention de leur licence, apprentissage qui leur serait très utile pour pouvoir se tirer d'affaire en cas de voile blanc. Un pilote n'est pas tenu de suivre un cours de réactualisation de ses connaissances élémentaires des techniques du vol aux instruments avant d'obtenir une nouvelle validation de sa licence. Toutefois, un pilote professionnel doit subir chaque année une vérification de compétence pilote (PPC ou VPC). Un examen de l'aptitude du pilote à exécuter les manœuvres de base du vol aux instruments au cours de la VPC ou de la PPC permettrait de s'assurer que les pilotes professionnels d'hélicoptère possèdent toujours, quelle que soit la date d'obtention de leur licence, les compétences nécessaires pour venir à bout de la principale cause d'accidents d'hélicoptère en VFR dans des conditions météorologiques défavorables. C'est pourquoi le Bureau recommande que :

le ministère des Transports exige que les pilotes professionnels d'hélicoptère subissent, au cours de leur vérification annuelle de compétence pilote, un contrôle de leur aptitude à exécuter les manœuvres de base du vol aux instruments.

Pour suivre cette recommandation, les hélicoptères doivent nécessairement être équipés d'un indicateur d'assiette et d'un conservateur de cap. C-GIYR n'en avait pas et la réglementation n'en exige pas pour effectuer des vols VFR. Transports Canada maintient que le vol VFR en conditions IMC par inadvertance constitue un faible pourcentage des accidents liés aux vols VFR en conditions IMC.

À l'heure actuelle, les risques associés au vol VFR dans des conditions météorologiques défavorables demeurent considérables, et TC n'a pas indiqué son intention de mettre en œuvre des mesures visant à maintenir les compétences de vol aux instruments des pilotes d'hélicoptères commerciaux qui ne détiennent pas la qualification de vol aux instruments, comme le prévoit la recommandation A90-81. En conséquence, la réévaluation de la réponse de TC demeure insatisfaisante en 2012.

En 2010, l'équipe European Helicopter Safety Team (EHEST) a fait une analyse des accidents d'hélicoptères survenus en Europe entre 2000 et 2005Footnote 27 et a formulé des recommandations d'intervention visant à prévenir les accidents présentant des éléments similaires aux événements qui se sont déjà produits. Plusieurs d'entre elles portent sur la formation initiale et périodique sur le vol en conditions IMC par inadvertance, ainsi que la reprise de la maîtrise de l'hélicoptère en utilisant uniquement les instruments lorsque l'hélicoptère se retrouve avec une assiette anormale. L'EHEST recommande aussi une amélioration des audits, des inspections et de la surveillance réglementaire, avec plus de moyens pour imposer des sanctions à ceux qui ne se conforment pas à la réglementation.

1.18.2 Risques liés à la perte de références visuelles

Les pilotes confrontés à des conditions météorologiques limitesFootnote 28 volent à basse altitude, près du relief afin de garder un contact visuel avec le sol. Dans ces conditions, les pilotes courent de grands risques d'entrer par inadvertance en IMC où les références visuelles ne sont possiblement plus suffisantes pour garder la maîtrise de l'appareil.

À basse vitesse, l'AS350, comme la plupart des hélicoptères, se trouve dans une plage d'instabilité inhérente qui augmente avec la diminution de la vitesse. Puisque les pilotes d'hélicoptère réduisent généralement leur vitesse en condition de visibilité réduite, le risque de perdre la maîtrise de l'appareil augmente.

1.18.3 La désorientation spatiale

Le système visuel est de loin le plus important des 3 systèmes sensoriels en fournissant 80 % de l'information brute. Par conséquent, lorsque l'on perd les repères visuels, 80 % de l'information d'orientation est perdue, ne laissant que 20 % divisée également entre les systèmes vestibulaireFootnote 29 et proprioceptifFootnote 30 , tous les 2 moins précis et prédisposés aux illusions et aux erreurs d'interprétation.

La force gravitationnelle agit sur la membrane otolithique du système vestibulaire. Le changement de force exercé lors d'un vol peut fausser l'interprétation de la force gravitationnelle, et par conséquent la position de la verticale. Par exemple, l'illusion somatogravique est une forte sensation de cabrage lors d'une accélération. En l'absence de repères visuels, l'accélération est perçue par le cerveau comme une inclinaison vers l'arrière. Réciproquement, une décélération est perçue comme une inclinaison vers l'avant.

La sensibilité proprioceptive, quant à elle, permet d'établir la position et le tonus des différents membres du corps par rapport à la situation du corps et à l'intensité de l'attraction terrestre. Elle permet au pilote de stabiliser son corps dans le poste de pilotage et lui fournit des indices utiles sur les changements de direction et d'assiette en vol à vue. En l'absence de repères visuels, le pilote qui se fie au mouvement de son corps, appelé pilotage par sensation, court un grave danger puisque les forces centripète et centrifuge rivalisent avec la force gravitationnelle et peuvent perturber la proprioception.

La désorientation spatiale survient lorsque le pilote ne parvient pas à percevoir correctement la position, le mouvement ou l'assiette de l'appareil (ou la sienne), au sein du système de coordonnées fixes fournies par la surface de la Terre et la verticale gravitationnelleFootnote 31 . Autrement dit, lorsque le pilote est désorienté, il est incapable de se situer dans l'espace, et par conséquent ne peut garder la maîtrise de l'appareil pour une période prolongée.

Il est important de souligner que tous les pilotes peuvent ressentir de la désorientation spatiale, et que pendant leur carrière, ils finiront par rencontrer des conditions où ils subiront les effets de celle-ci. Toutefois, le résultat n'est pas toujours la perte de la maîtrise de l'appareil. Il existe plusieurs mesures préventives pour minimiser le risque que la désorientation spatiale se produise, ou qu'elle conduise à un accident, et la plupart de celles-ci peuvent être prises avant le décollageFootnote 32 .

En bref, la fatigue, le stress, le rhume, l'alcool et certains médicaments peuvent augmenter le risque de désorientation spatiale. Cependant, la conscience du potentiel de désorientation pendant un vol constitue une principale mesure pour prévenir la perte de maîtrise en vol.

Dans le cadre d'une expérience, des pilotes privés qui n'avaient pas reçu de formation sur le vol aux instruments ont été placés dans un simulateur d'avion. Le pilote en vol en VFR était confronté à des conditions météorologiques IMC et devait faire demi-tour. L'avion (simulateur) s'est écrasé en moins de 178 secondes dans tous les casFootnote 33 .

1.18.4 Prise de décisions du pilote

La prise de décisions du pilote (PDP) est un aspect primordial de la sécurité des vols. La PDP peut être définie comme une boucle à 4 étapes : recueillir l'information, traiter l'information, prendre une décision, puis la mettre en œuvreFootnote 34 . L'évaluation des options disponibles comprend une évaluation subjective des risques basée sur l'expérience et la connaissance.

Les décisions du pilote peuvent être influencées par un grand nombre de facteurs, comme la perception de la situation, l'expérience, la formation, les capacités, les attentes, les buts et les objectifs, les pressions sociales et organisationnelles, la pression du temps et les divers éléments contextuels. La réussite d'un vol dans des conditions similaires peut faire augmenter la tolérance au risque et inciter le pilote à continuer le vol en conditions limites.

Selon le rapport SATOPS, la pression des clients est un facteur pouvant inciter les pilotes à voler dans des conditions qu'ils auraient autrement considérées comme dangereuses. Ces pressions peuvent être explicites, sous la forme de demandes expresses des clients et de menaces de recourir à d'autres exploitants prêts à prendre plus de risques, ou plus sournoises, lorsque les compagnies et les pilotes cherchent à satisfaire leurs clients en démontrant leur grande fiabilité.

Il existe plusieurs outils d'évaluation des risques, dont certains sous forme de liste de vérification, pour cerner les risques liés à un vol spécifique et ainsi, guider le pilote dans ses préparatifs pré-vol. Ces outils, comme la liste de vérification pré-vol d'évaluation des risques (Pre-departure Risk Assessment Check List) de l'EHEST, soulèvent le fait que des éléments qui peuvent sembler simples, s'ils sont isolés, sont susceptibles d'augmenter le risque global du vol s'ils sont combinés.

1.18.5 La dissonance cognitive

Au-delà des facteurs agissant sur la prise de la décision elle-même, des influences post- décisionnelles faussent l'interprétation du résultat. Lorsque le pilote doit choisir entre 2 options, telles que poursuivre un vol en conditions limites ou effectuer un déroutement, un état de tension ou de dissonance est créé. Une fois la décision de continuer prise, le pilote tentera de réduire cette dissonance en accentuant les aspects positifs de la décision (de poursuivre) et en amplifiant les attributs négatifs de l'option rejetée (le déroutement). Ce procédé inconscient et automatique consiste à écarter les autres options, aussi appelé la distorsion postérieure à une décision.

La théorie de la dissonance cognitive procure un modèle convaincant de la prise de décisions qui mènerait un pilote à poursuivre un vol VFR en conditions IMC. Selon cette théorie, il y a une propension à continuer avec le plan d'action choisi après que la décision a été prise. D'ailleurs, l'influence de la dissonance est cumulative. Chaque fois qu'une nouvelle décision est prise de continuer au lieu d'effectuer un déroutement, l'écart entre les solutions de rechange (distorsion postérieure à une décision) s'agrandit incitant le pilote à prendre des décisions de plus en plus risquées.

Afin de réduire l'influence de la dissonance, il est proposé de prendre le plus de décisions que possible à l'avance, de se concentrer sur l'information disponible au moment de la décision et de dissocier les nouvelles décisions à prendre de celles prises auparavant.

1.18.6 Adaptation et marges de sécurité réduites

Les pressions au niveau du temps et des ressources peuvent amener les pilotes à s'adapter à la situation pour réussir à faire leur travail. Bien que les procédures et les règlements soient justement là pour fixer des limites pour que les opérations se déroulent en toute sécurité, il arrive que certains pilotes repoussent ces limites pour augmenter leur productivité. Il y a alors adaptation des procédures et déplacement au-delà des limites fixées vers des pratiques dangereusesFootnote 35.

L'adaptation des méthodes de travail n'a, d'ordinaire, pas de conséquences néfastes visibles et immédiates. Les menaces à la sécurité ne sont pas évidentes parce que les infractions aux procédures ne mènent pas immédiatement à un accident. Par conséquent, le déplacement des méthodes de travail se poursuit.

Lorsque les membres d'équipage se transmettent ces adaptations de procédures ayant donné de bons résultats (par exemple, le vol en surcharge), il y aura une tendance, à moins d'une bonne supervision, à provoquer une généralisation de ces adaptations au sein de l'organisme.

De plus, les exigences de rendement imposent des contraintes qui peuvent inciter les pilotes à travailler en dehors des règles établies pour accomplir la tâche assignéeFootnote 36. Sans supervision, éducation, ni surveillance du respect des limites attendues sur une base régulière, il est probable que certains pilotes continuent à adapter les procédures jusqu'à ce qu'ils atteignent la véritable limite d'une situation dangereuse par un accident.

1.18.7 Les passagers

La Federal Aviation Administration (FAA) américaine a reconnu que la réglementation qui encadre les pilotes et les exploitants n'était pas suffisante pour réduire les accidents. La FAA croit que les passagers ont également un rôle à jouer dans la sécurité des vols en conditions météorologiques défavorables. Ainsi, elle a mis sur place le programme Circle of Safety Program en Alaska visant à renseigner les voyageurs, entre autres, sur les conditions météorologiques requises pour le vol en VFR ainsi que sur les altitudes minimales de vol en VFR.

1.19 Techniques d'enquête utiles ou efficaces

S. o.

2.0 Analyse

2.1 Généralités

L'examen de l'épave et des composants n'a révélé aucun élément permettant de croire qu'une défaillance structurale, qu'un mauvais fonctionnement des commandes ou qu'une perte de puissance était à l'origine de l'accident.

La possibilité d'une panne hydraulique ou d'une défaillance des commandes de vol a été écartée. Selon les expertises effectuées par le Laboratoire du BST, le couple du moteur était au maximum permis au moment de l'impact avec le sol indiquant que le pilote a appliqué le collectif au maximum. Une panne hydraulique ou une défaillance des commandes de vol aurait provoqué un déplacement non coordonné et un mouvement de lacet prononcé vers la gauche au moment de l'application du collectif. Or, le sillon au sol laissé par le sabot de queue ainsi que la trajectoire de désintégration est rectiligne.

L'hélicoptère a décollé en surcharge en conditions météorologiques marginales et 50 minutes plus tard, il percute le sommet d'un plateau à un angle prononcé, à 22 nm du point de départ. Par conséquent, l'analyse portera sur les circonstances entourant le vol, la prise de décisions du pilote, le vol VFR en conditions IMC et la surveillance des opérations héliportées.

2.2 Circonstances du vol

2.2.1 Généralités

Hydro-Québec est le plus important utilisateur de services héliportés au Québec, et l'exclusion des appels d'offres d'Hydro-Québec peut engendrer des conséquences financières sérieuses pour un transporteur. Il est donc raisonnable de présumer que, lorsqu'ils reçoivent les demandes d'affrètement d'Hydro-Québec, les transporteurs sont motivés à faire le nécessaire pour fournir les services demandés.

Selon la carte des poids de l'AS350 B2, la demande initiale d'affrètement d'Hydro-Québec pour le transport de 4 passagers et de 300 livres de bagages en AS350-B2 ne pouvait être réalisée sans excéder la masse maximale au décollage de 4960 livres avec la charge habituelle de carburant.

Puisqu'un AS350-B2 n'était pas disponible, Hydro-Québec a convenu avec le transporteur d'utiliser un AS350-BA. Toutefois, selon la carte des poids de C-GIYR (AS350 BA), même avec 60 % de carburant, 4 passagers et aucun des 300 livres de bagages prévus, il n'était pas possible d'effectuer le vol sans excéder la masse maximale autorisée au décollage de 4630 livres. Par conséquent, il n'était pas possible de respecter les conditions de la demande d'affrètement d'Hydro-Québec, tout en respectant le RAC, même en transportant autrement les 300 livres de bagages prévus.

2.2.2 Pressions du client

La demande d'affrètement d'Hydro-Québec ne semble pas cadrer avec les mesures de sécurité instaurées, puisque ni la première ni la deuxième demande ne pouvait être effectuées en respectant la limite de masse maximale autorisée au décollage.

En l'absence de mécanismes de vérification assurant que la demande d'affrètement tient compte des limites de charges de l'hélicoptère affrété, il revient au transporteur, dans son environnement concurrentiel, de limiter les demandes du client, grand utilisateur de services héliportés, afin de respecter le RAC.

2.2.3 Pressions du transporteur

La compagnie avait accepté la demande d'affrètement qui requérait un décollage en surcharge, et le pilote qui a effectué le vol ne satisfaisait pas aux critères d'expérience exigés par Hydro Québec. Il est probable que le pilote inexpérimenté a ressenti les pressions opérationnelles entourant ce vol, lesquelles sont reconnues pour leur effet néfaste sur la prise de décisions du pilote.

2.2.4 Pressions des passagers

Le matin du vol, les passagers sont arrivés avec 761 livres de bagages au lieu des 300 livres prévues. Il est probable que les passagers n'étaient pas au fait des 300 livres prévues à la demande d'affrètement, ni de l'entente convenue pour réduire cette charge de bagages en raison de l'utilisation de l'AS350-BA. On n'a pas utilisé la balance qui se trouvait à l'intérieur du hangar, mais le pilote estimait tout de même que la charge de bagages était excessive.

Les différents modèles d'AS350 ont tous une apparence similaire malgré la différence de poids maximale autorisée au décollage. En conséquence, les passagers peuvent facilement confondre les différents modèles et être surpris de voir la charge de bagages limitée par un pilote, alors qu'auparavant ils avaient effectué des vols similaires avec tous leurs outils.

Puisque le poids des bagages est estimé, il est difficile pour le pilote de démontrer de façon quantitative que les passagers ont plus de bagages qu'initialement prévu à la demande d'affrètement ou même que le poids de l'appareil est au maximum autorisé au décollage.

Puisque le vol ne pouvait se faire en ligne droite au-dessus du relief, le pilote avait prévu une charge de carburant de 75 %, et lors du chargement, il l'a réduit à 60 %, soit au total environ 600 livres ou 2 heures de vol. Par conséquent, il est raisonnable de conclure qu'il a subi de la pression de la part des passagers qui voulaient garder leurs outils de travail. Quoiqu'il ait convenu avec les passagers de faire acheminer 200 livres de bagages par avion, il demeure que 561 livres de bagages ont été chargées à bord de C-GIYR, qui a décollé avec une masse 476 livres au dessus de la masse maximale autorisée au décollage. Cette pression des passagers a probablement mené le pilote à réduire la charge de carburant, à accepter une grande partie des bagages et l'a finalement incité à décoller en surcharge évidente.

Le pilote n'a pas respecté les procédures établies pour satisfaire aux besoins opérationnels, et cette adaptation des procédures au-delà des limites fixées confirme la nécessité d'avoir de la supervision et de la surveillance des limites attendues sur une base régulière. Sinon, la situation peut durer des années, sans que le pilote réalise à quel point il est près de la limite réelle de sécurité.

D'un point de vue organisationnel, on pourrait croire invraisemblable qu'il revienne au jeune pilote au tout dernier moment, soit à l'embarquement, d'aviser les passagers qu'ils ne pourront pas transporter les outils nécessaires au travail prévu sans réaction de la part des passagers.

Lorsque les conditions de transport sont clairement énoncées par le client, et que la limite de bagages permis est déterminée à l'avance, les passagers ne sont pas surpris au moment de l'embarquement. Certains grands utilisateurs ont choisi d'établir les limites de chargement au préalable et responsabilisent les passagers quant au contrôle de la charge transportée. Un client exige même la signature du passager contremaître et du pilote sur le document de calcul de la masse au décollage de l'hélicoptère. Dans ces conditions, la sécurité du vol ne repose pas uniquement sur la capacité du pilote de résister aux pressions des utilisateurs.

Dans le cadre des opérations héliportées, il n'est pas toujours possible ou nécessaire de tout peser pour faire un calcul précis de la masse au décollage de l'hélicoptère avant chaque décollage; par exemple, lors de déplacements multiples et courts avec une charge en élingue, ou avec le même personnel et leurs bagages ou outils. Le RAC procure une certaine flexibilité en ce qui concerne l'utilisation de poids et de configurations préétablis, à condition que le pilote respecte les limites de masse au décollage lors du premier décollage d'une série de vols, ou en début de contrat, avec les mêmes travailleurs et leurs outils.

Puisque le calcul précis de la charge transportée n'a pas été établi, le poids au décollage de l'hélicoptère n'a pas été calculé, donc aucune donnée n'est consignée au livre de bord de l'appareil. Par conséquent, il n'a pas été possible de faire un suivi historique des charges transportées ou de la masse au décollage de C-GYIR, et le RAC ne l'exige pas.

Une officialisation de la charge et de la masse au décollage responsabilise le pilote, procure une mesure quantitative au transporteur face au client et minimise la possibilité de conflits entre les passagers et le pilote. De plus, la consignation officielle de la charge et de la masse au décollage permet à TC d'effectuer une surveillance réglementaire des charges transportées lors d'opérations héliportées.

2.3 Le déroulement du vol

Le pilote a décollé et a suivi les lignes de transport hydro-électriques en direction nord-est à basse vitesse en raison de la visibilité réduite.

Lorsqu'il a bifurqué en direction nord-est en direction de la rivière Moisie, sa vitesse a atteint la vitesse normale de croisière, indiquant une amélioration de la visibilité en vol à une altitude plus basse que le relief. Une fois établi dans la vallée de la rivière Moisie, il était habituellement possible de suivre la voie ferrée en direction nord jusqu'au Poste Montagnais.

À l'embranchement de la rivière Nipissis, le pilote est demeuré au-dessus de la rivière Moisie au lieu de maintenir la trajectoire de vol et de suivre la voie ferrée en direction nord (Figure 5, 11 h 27). Il n'a pas été possible d'établir la raison pour laquelle le pilote a pris cette décision.

Huit minutes plus tard, le pilote a tourné à droite, a quitté la rivière Moisie et a emprunté une vallée en direction du Poste Montagnais (Figure 5, 11 h 35). Toutefois, il a fait demi-tour au bout de celle-ci (Figure 5, 11 h 43) pour retourner à la rivière Moisie. La réduction de la vitesse avant le demi-tour tend à indiquer que la visibilité était réduite au bout de la vallée et que le col, d'une hauteur de plus de 2000 pieds asl, était dans les nuages.

Alors qu'il survolait la rivière Moisie en direction sud, il a bifurqué à gauche en direction des montagnes à l'est (Figure 5, 11 h 54). À ce moment, l'hélicoptère était en vol depuis 43 minutes et avait consommé environ 215 livres de carburant. Il restait donc 385 livres à bord, soit 1 h 17 d'autonomie de vol.

Si le pilote avait poursuivi son vol dans la vallée de la rivière Moisie jusqu'à l'embranchement de la rivière Nipissis avant de procéder au Poste Montagnais, il ne lui aurait resté qu'environ 60 livres de carburant, soit 13 minutes de vol, à son arrivée. Le voyant indiquant un bas niveau de carburant (FUEL) sur le panneau annonciateur se serait illuminé au moins 7 minutes avant l'arrivée, et la politique de la compagnie est de se poser immédiatement lorsque cellui ci s'illumine. Il aurait fallu par la suite qu'il se fasse héliporter du carburant.

Puisque l'appareil se trouvait à environ 24 nm du point de départ, il était toujours possible de retourner à la base de Sept-Îles pour refaire l'avitaillement en carburant et reprendre le vol. Toutefois, les conditions météorologiques au départ étaient limites puisque le pilote n'était pas certain de se rendre au Poste Montagnais après le décollage. Rien n'indique qu'il avait reçu de mise à jour des conditions météorologiques à ce moment.

Le pilote d'hélicoptère a toujours une option supplémentaire, soit de se poser en lieu sûr et attendre une amélioration des conditions météorologiques.

Toutefois, aucune de ces 3 options n'est attrayante du point de vue des passagers. Le pilote aurait plutôt dû admettre aux passagers, à son employeur, ainsi qu'à Hydro-Québec, qu'il ne pouvait pas accomplir le vol qui lui avait été assigné. Comme Hydro-Québec suit également le déroulement du vol, un tel délai aurait suscité des questions quant au déroulement du vol, augmentant ainsi la probabilité que l'on remarque qu'il n'avait pas l'expérience exigée au contrat pour effectuer le vol. Par conséquent, il est probable que le pilote ait choisi de prendre un raccourci en direction est dans l'espoir de rejoindre la vallée de la rivière Nipissis et ainsi réduire le temps de vol pour se rendre au Poste Montagnais.

Bien que le vol ait été effectué à basse altitude, le pilote a maintenu la vitesse normale de croisière, donc il est probable que la visibilité en vol ait été adéquate au moment où l'appareil se dirigeait en direction est.

2.4 Le vol VMC en conditions IMC

Figure 5. Photos du site de l'accident montrant l'épave et la trajectoire de désintégration
Figure of Photos du site de l'accident montrant l'épave et la trajectoire de désintégration

Lorsque l'appareil a atteint le flanc de la montagne, le pilote a repris une trajectoire sud et a réduit la vitesse de l'appareil, ce qui indique que les cimes étaient dans les nuages et qu'il ne pouvait les franchir. Toutefois, il a poursuivi l'ascension en flanc de montagne pour éventuellement atteindre le plateau à la cime (Figure 5, 11 h 59). Vraisemblablement, en raison de la visibilité réduite, l'appareil a survolé la cime à une hauteur entre 50 et 100 pieds agl, à une vitesse sol qui variait entre 20 et 40 nœuds, ce qui se situe sous les minimums pour le vol VFR prescrits au RAC.

Le pilote a choisi de poursuivre le vol VFR en conditions IMC alors qu'il était encore possible de se diriger en direction de la vallée de la rivière Moisie à l'ouest. Il est probable qu'il a évalué son choix de poursuivre comme étant nettement mieux que les autres options écartées. Selon la théorie de la dissonance cognitive, les décisions successives de poursuivre le vol en conditions limites peuvent par la suite fausser l'évaluation du choix entre la poursuite du vol et le déroutement. Or, plus le pilote réfléchit à sa décision de poursuivre le vol, plus il risque de renforcer son choix, générant, ce faisant, une plus grande distorsion de la situation dans laquelle il se trouve. Il s'expose ainsi à prendre des décisions de plus en plus risquées.

Plusieurs autres facteurs ont pu influencer la décision du pilote de poursuivre son vol VFR en IMC, dont la pression des passagers. La pression des passagers peut avoir une influence soit négative sur la prise de décisions liée à la sécurité par le pilote, selon que les passagers ont eux mêmes des contraintes temporelles liées au travail à faire, soit positive, lorsque les passagers interviennent ou questionnent un pilote lorsqu'un vol ne semble pas se conformer à la réglementation. Il est possible que ce questionnement amène un pilote à choisir une des options plus sécuritaires, comme se poser pour attendre une amélioration des conditions météorologiques.

La FAA a reconnu que la réglementation, à elle seule, ne peut empêcher la poursuite des vols VFR en conditions IMC. Le programme de sensibilisation des passagers, instauré en Alaska, a pour objectif de leur faire jouer un plus grand rôle dans la sécurité des vols. Il n'existe aucun programme similaire au Canada.

Un autre exemple de sensibilisation est le décollage d'avions en conditions de givrage. Les passagers sont davantage sensibilisés aux risques liés au décollage avec de la neige ou de la glace recouvrant les ailes. Désormais, les passagers hésitent moins à questionner un décollage en de telles conditions sans faire dégivrer les ailes, et le simple fait de remettre en question le décollage peut influencer un pilote dans le doute à choisir l'option la plus sécuritaire.

Alors que l'hélicoptère survolait le plateau en conditions météorologiques limites, la décision critique de sécurité était celle de poursuivre ou de ne pas poursuivre le vol pour atteindre la vallée de la rivière Nipissis.

Les minimums VFR ont été établis par l'organisme de réglementation qui estime que ce sont les limites minimales de sécurité. Le risque augmente de façon significative lorsque les pilotes tiennent à poursuivre leur route dans des conditions météorologiques défavorables au vol à vue. En poursuivant le vol en conditions IMC, le pilote a augmenté le risque de collision avec le relief ainsi que le risque de perdre ses références visuelles avec le sol. La faible vitesse de l'hélicoptère sur le plateau laisse croire que les limites météorologiques du vol VFR ne pouvaient être maintenues. À basse vitesse, l'hélicoptère se trouve dans une plage d'instabilité inhérente qui augmente le risque de perte de la maîtrise de l'appareil lorsque les références visuelles sont limitées.

Lorsque C-GIYR a atteint l'extrémité sud-est du plateau où le terrain descendait rapidement en direction de la vallée, l'appareil a amorcé une montée et sa vitesse a diminué. L'hélicoptère a monté d'environ 200 pieds, fait demi-tour, amorcé une descente à un taux moyen de 4500 pieds par minute et a percuté la surface du plateau à un angle de descente prononcé.

La trajectoire tend à indiquer que le pilote a perçu la réduction de références visuelles et a tenté de ralentir l'appareil rapidement. Pour ralentir un hélicoptère rapidement, le pilote augmente l'assiette en tirant sur le manche du cyclique, et en même temps, il réduit le collectif pour éviter d'amorcer une montée. L'assiette de l'hélicoptère a possiblement augmenté juste au moment où le sol du plateau a laissé place à la vallée et le pilote a perdu toutes ses références visuelles avec le sol.

Puisque le système visuel fournit 80 % de l'information d'orientation, lorsque le pilote a perdu ses références visuelles, il ne lui restait que 20 % de capacité d'orientation avec les systèmes vestibulaire et proprioceptif. Ces derniers sont moins précis, et prédisposent aux illusions, comme l'illusion somatogravique qui induit une sensation d'inclinaison vers l'avant lors d'une décélération. Tous les pilotes, à tout niveau d'expérience, sont susceptibles de subir les effets de la désorientation spatiale lorsqu'ils sont exposés aux mouvements complexes du vol.

Lorsque le pilote a perdu ses références visuelles en décélération, il a probablement subi les effets de l'illusion somatogravique, l'incitant à cabrer l'appareil et à établir une montée. L'hélicoptère a ensuite fait demi-tour, d'une trajectoire de vent de face à une trajectoire de vent de dos. Ce changement de trajectoire se traduit en une perte significative de portance du rotor principal et requiert une augmentation importante de puissance pour éviter qu'une descente ne se produise. L'hélicoptère volait vraisemblablement dans les nuages à ce moment et le pilote n'a pas perçu la descente rapide et n'a pas eu le temps de stopper la descente lorsque le sol est apparu.

L'hélicoptère n'avait pas les instruments nécessaires et le pilote n'avait pas les qualifications nécessaires pour effectuer un vol aux instruments. Par conséquent, la seule façon dont il disposait pour garder la maîtrise de l'appareil était de maintenir un contact visuel avec le sol.

La conscience du risque de désorientation spatiale est un des éléments clés dans la prévention d'accidents liés à la désorientation spatiale et la plupart des mesures existantes pour réduire les risques qui y sont associés portent sur la préparation avant même d'entreprendre un vol. Le fait de subir les effets de la désorientation spatiale n'aboutit pas nécessairement à la perte de la maîtrise de l'appareil. Cependant, les pilotes d'avion qui ont participé à l'expérience au simulateur ont tous perdu la maîtrise de l'avion, beaucoup plus stable qu'un hélicoptère, en moins de 178 secondes. La perte de maîtrise de C-GIYR est survenue en moins de 25 secondes.

Depuis 1998, plusieurs organisations ont reconnu qu'il existe un risque élevé de perte de vie lié au vol VFR en conditions IMC. Leurs conclusions sont similaires à celles du BST, soit 80 % des accidents liés à la perte de références visuelles entraînent des décès, bien qu'ils ne représentent que 15 % de tous les accidents.

Plusieurs mesures ont été proposées, entre autres par JSAT et l'EHEST, soit d'augmenter la compétence de vol aux instruments des pilotes, d'améliorer l'équipement disponible et de sensibiliser davantage les gestionnaires, les pilotes ainsi que les passagers aux dangers liés au vol en conditions de visibilité réduite. Toutefois, ces mesures ne sont pas encore implantées et les accidents de ce type continuent de se produire.

La recommandation du BST A90-81 cible la mise à jour des compétences de vol aux instruments acquises pendant la formation pour l'obtention de la licence de pilote commerciale. Ces compétences sont justement conçues pour aider les pilotes à éviter qu'un accident se produise lorsque le pilote VFR rencontre des conditions IMC. Le fait que la plupart des accidents liés au vol VFR en conditions IMC soient souvent précédés par une mauvaise prise de décisions de la part du pilote ne diminue pas la valeur du maintien des compétences de vol aux instruments destinés à faire face à une telle situation.

Compte tenu du taux de mortalité des événements liés au vol VFR en conditions IMC, le BST estime que les efforts de TC à ce jour pour réduire ce type d'événements sont insuffisants.

2.5 La surveillance des opérations héliportées

2.5.1 Généralités

TC assure la surveillance réglementaire, le transporteur s'assure que les vols sont effectués en conformité au RAC et le pilote commandant de bord est responsable de la sécurité du vol, tout en respectant les limites du RAC. En général, le client se fie au transporteur et au pilote pour assurer la sécurité des vols.

2.5.2 Transports Canada

Entre 2005 et 2010, TC a effectué 2 vérifications sur le terrain à Sept-Îles, mais celles-ci ne portaient pas spécifiquement sur le vol d'hélicoptères en surcharge.

Les méthodes de surveillance classiques ont été remplacées par des évaluations et des inspections de validation de programme (IVP) qui servent à mesurer l'efficacité du contrôle des opérations et le niveau de conformité au RAC. La dernière IVP d'Héli-Excel Inc. n'a révélé aucun point de non-conformité. Toutefois, en l'absence de documents de vol qui indiquent la charge transportée et la masse au décollage, il n'est pas possible de faire une surveillance réglementaire du vol en surcharge.

La surveillance réglementaire sur le terrain est rare, il n'existe aucun document pour évaluer les charges transportées lorsque des inspections sont effectuées, et il n'y a pas de programme de sensibilisation visant à engager les passagers dans le respect des limites du RAC. Nonobstant la fréquence des inspections, il revient au transporteur et au pilote de bien vouloir se conformer à la réglementation.

2.5.3 Le transporteur

Bien que le système de contrôle d'exploitation prévoie que la préparation du vol est faite par le pilote lui-même, le gestionnaire des opérations doit s'assurer que les opérations aériennes sont exécutées conformément au RAC. Toutefois, en acceptant des affrètements qui ne peuvent être effectués dans le respect du RAC, le transporteur envoie un message tacite au pilote de décoller en surcharge.

Les circonstances entourant cet accident démontrent que le pilote a subi des pressions opérationnelles qui lui ont amené à faire des compromis, qui ont à leur tour réduit la marge de manœuvre qu'il s'était accordée. Le prolongement inopiné du vol a créé des pressions temporelles qui ont placé le pilote face à des choix ayant des conséquences importantes pour les passagers, le client, le transporteur et sur la perception de sa performance à titre de pilote.

Des ressources existent pour réduire ces pressions opérationnelles, notamment une supervision directe au moyen d'outils d'évaluation de risques et de prises de décisions utilisés avant le décollage. L'utilisation de ces ressources pour guider le pilote dans sa prise de décisions peut mettre en évidence les facteurs individuels (menaces) liés au vol, qui peuvent s'additionner et, une fois combinés, placer le vol dans une plage de risques élevés.

Avec le peu de soutien de la part de la compagnie, il semble que la sécurité du vol reposait principalement sur la capacité du pilote à résister, à lui seul, aux pressions opérationnelles imposées.

Lorsque des pilotes inexpérimentés sont confrontés aux pressions opérationnelles seuls et sans soutien particulier de la part de la compagnie, ils peuvent être portés à prendre des décisions les mettant à risque ainsi que leurs passagers.

D'un point de vue organisationnel, il semble incohérent de déployer les efforts nécessaires pour satisfaire à toutes les exigences d'exploitation du RAC, des audits d'Hydro-Québec et des restrictions contractuelles, et par la suite s'en remettre au jeune pilote inexpérimenté pour assurer la sécurité de ce vol.

Puisque le RAC n'exige pas de SGS pour les opérations d'Héli-Excel Inc., il n'est pas raisonnable de mesurer l'efficacité de son SGS en fonction de la norme utilisée par les grands transporteurs commerciaux canadiens.

Toutefois, lorsque les SGS sont bien implantés et utilisés, les transporteurs déterminent eux mêmes les dangers afin de gérer les risques. Ce processus incorpore un système qui permet à tous les intervenants dans les opérations de vol de signaler des incidents ou des situations dangereuses, ainsi que de soulever des inquiétudes liées à la sécurité.

Il est possible qu'avec un tel SGS bien implanté, cette incohérence entre les efforts déployés pour satisfaire le client en toute sécurité et la réalité des besoins opérationnels des passagers ait été soulevée et analysée afin de trouver une autre façon de gérer les attentes des passagers.

2.5.4 Hydro-Québec

Le client, quant à lui, n'a pas de responsabilité comme telle vis-à-vis du RAC; toutefois, à titre d'employeur, il est responsable de la sécurité au travail de ses employés. Hydro-Québec déploie des efforts considérables pour avoir accès à des transporteurs techniquement qualifiés, des pilotes d'expérience, et, par la suite, surveille la progression de ses vols. Toutefois, le respect des limites de masse maximale autorisée au décollage et des conditions météorologiques minimales pour effectuer les vols VFR n'est pas surveillé.

Hydro-Québec et — par extension — ses employés qui voyagent exercent une influence importante sur le transporteur ainsi que sur le pilote. Il est possible que ceci ait incité le transporteur à accepter d'effectuer l'affrètement demandé et le pilote à accepter la charge importante d'outils des passagers. Finalement, cette influence a pu inciter le pilote à poursuivre le vol VFR en conditions IMC malgré les autres options sécuritaires, quoique moins pratiques pour le client.

À défaut de surveillance réglementaire sur le terrain, les autres intervenants, soit le transporteur aérien, le pilote, le client et ses passagers, doivent tous être activement engagés dans le développement et le maintien d'une culture de sécurité, laquelle vise, à la base, à assurer la conformité au RAC, et ce, même lorsque personne ne regarde.

3.0 Faits établis

3.1 Faits établis quant aux causes et aux facteurs contributifs

  1. Pour des raisons inconnues, le pilote n'a pas pris l'embranchement de la rivière Nipissis, mais a dû éventuellement rebrousser chemin en raison des nuages qui couvraient le relief. Ce prolongement du vol a réduit l'autonomie en carburant disponible pour se rendre à destination.
  2. Le pilote avait réduit la charge de carburant pour accommoder la quantité importante de bagages, réduisant ainsi son autonomie en cas d'imprévu pendant le vol. Cette autonomie réduite a probablement incité le pilote à prendre un raccourci en direction des montagnes pour regagner la route de vol initialement prévue.
  3. Le pilote a poursuivi le vol selon les règles de vol à vue en conditions météorologiques inférieures aux minimums des règles de vol à vue prescrits au Règlement de l'aviation canadien, ce qui a augmenté le risque de perdre ses références visuelles avec le terrain.
  4. Alors que l'appareil survolait le plateau en conditions météorologiques limites, le pilote a perdu le contact visuel avec le relief et ensuite la maîtrise de l'appareil, menant à l'impact avec le sol.

3.2 Faits établis quant aux risques

  1. Lorsqu'un client, grand utilisateur de services héliportés, demande un affrètement qui ne peut être effectué en conformité au Règlement de l'aviation canadien et que le transporteur l'accepte, le pilote est soumis à une pression tacite de décoller en surcharge.
  2. Les passagers d'un grand utilisateur de services héliportés qui se présentent avec un excédent de bagages exercent une pression implicite qui pourrait inciter le transporteur et le pilote à effectuer un vol en surcharge.
  3. Lorsque les bagages ne sont pas pesés, le calcul précis de la masse au décollage est impossible, et l'hélicoptère risque de décoller avec une masse supérieure à la limite autorisée, augmentant ainsi le risque d'accident lié au vol en surcharge.
  4. Lorsque des pilotes inexpérimentés sont confrontés aux pressions opérationnelles seuls et sans soutien particulier de la part de la compagnie, ils peuvent être influencés à prendre des décisions les mettant à risque ainsi que leurs passagers.
  5. Transports Canada fait peu de surveillance réglementaire des opérations héliportées sur le terrain et le détail des charges transportées n'est pas consigné aux livres de bord. Il n'est donc pas possible d'être au fait des décollages en surcharge.
  6. Malgré son déclenchement, le système COSPAS-SARSAT n'a pas détecté le signal de la radiobalise de repérage d'urgence (ELT) sur la fréquence 406 MHz puisque l'antenne a été sectionnée. Par conséquent, les efforts de recherches et de sauvetage auraient pu être retardés et ainsi, avoir une influence sur la survie de ceux qui ont survécu l'accident.
  7. Les pilotes commerciaux d'hélicoptères ne pratiquent pas régulièrement le vol aux instruments ni la façon de reprendre la maîtrise de l'hélicoptère en assiette inhabituelle, uniquement par vol aux instruments. Par conséquent, ils courent un plus grand risque de perdre la maîtrise de l'hélicoptère s'ils perdent le contact visuel avec le sol.

3.3 Autre fait établi

  1. Les programmes de sensibilisation destinés aux passagers, quant aux conditions de vol permises par la réglementation, pourraient inciter ces derniers à questionner la décision du pilote à poursuivre un vol à vue sous les limites météorologiques prescrites par la réglementation.

4.0 Mesures de sécurité

4.1 Mesures de sécurité prises

4.1.1 Mesures prises par Héli-Excel

Voici les mesures correctives ayant été instaurées chez Héli-Excel depuis l'accident du 17 août 2010.

4.1.2 Mesures prises par Hydro-Québec

Le présent rapport met un terme à l'enquête du Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) sur cet événement. Le Bureau a autorisé la publication du rapport le . Il est paru officiellement le 26 mars 2013.

Annexes

Annexe A —Liste des rapports de laboratoire

L'enquête a donné lieu au rapport de laboratoire suivant :

Annexe B — Prévision de zone graphique (GFA)

Annexe C — Cartes des poids et centre de gravité