Language selection

Rapport d’enquête sur la sécurité du transport ferroviaire R18W0237

Déraillement de train en voie principale
Chemin de fer de la baie d’Hudson
Train de marchandises 995-15
Point milliaire 99,59, subdivision de Wekusko
Ponton (Manitoba)



Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a enquêté sur cet événement dans le but de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n’est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales. Le présent rapport n’est pas créé pour être utilisé dans le contexte d’une procédure judiciaire, disciplinaire ou autre. Voir Propriété et utilisation du contenu.

Résumé

Le 15 septembre 2018, vers 16 h 32, heure avancée du Centre, le train de marchandises 995 du chemin de fer de la baie d’Hudson (HBR) circulait en direction nord à 25 mi/h sur la subdivision de Wekusko. Au point milliaire 99,59, près de Ponton (Manitoba), le train a atteint un vide dans la surface de la plateforme. Malgré que les rails étaient en place, un affaissement de la couche supérieure de plateforme et un espace vide créé par un emportement par les eaux d’une longueur de 50 pieds et d’une profondeur de 15 pieds avaient laissé les rails et les traverses suspendus dans le vide. Le train a circulé sur le segment de voie suspendu, qui s’est effondré sous le poids des locomotives. Les 3 locomotives et les 4 premiers wagons ont déraillé. Les 3 locomotives ont été détruites, et les membres de l’équipe de train ont été coincés dans la locomotive de tête. Le chef de train est mort sur les lieux de l’accident des suites de ses blessures environ 8,5 heures plus tard. Le mécanicien de locomotive a été extirpé près de 10 heures après l’accident et a ensuite été évacué par hélicoptère dans un état critique vers un hôpital à Thompson (Manitoba). Les réservoirs de carburant de la locomotive se sont rompus et ont déversé quelque 6800 litres de carburant diesel.

Entretien de l’infrastructure de la voie et vulnérabilité à un emportement par les eaux

Comme c’est le cas pour de nombreux tronçons de voie des chemins de fer canadiens, certains tronçons du réseau ferroviaire de HBR sont construits sur des remblais dans des endroits qui sont parfois exposés à des épisodes hydrodynamiques inhabituels qui peuvent entraîner un emportement par les eaux. Ces épisodes hydrodynamiques comprennent :

Le printemps 2017 a été marqué par de fortes inondations qui ont causé au total 23 emportements par les eaux et gravement endommagé la voie entre Gillam et Churchill (Manitoba), ce qui a entraîné à toutes fins pratiques la fermeture de ce tronçon de la voie ferrée de HBR. Du printemps 2017 à l’été 2018, OmniTRAX n’a consenti aucun investissement important en capitaux dans l’infrastructure de la voie, malgré la nécessité des travaux à plusieurs endroits. Le lieu du déraillement était l’un de ces endroits.

À l’été 2018, les précipitations dans le secteur où le déraillement a eu lieu ont atteint 380,8 mm, soit une hausse de 60 % comparativement à la moyenne historique. Les fortes précipitations de cet été-là ont contribué à l’accumulation d’eau immédiatement à l’est et en bordure de la plateforme élevée au point milliaire 99,59.

Au cours des semaines qui ont précédé le déraillement, le personnel d’ingénierie de HBR avait surveillé les niveaux d’eau élevés à plusieurs endroits le long de la subdivision de Wekusko, y compris le secteur où a eu lieu l’emportement par les eaux qui a entraîné le déraillement. La dernière inspection des niveaux d’eau dans le secteur où l’accident a eu lieu a été menée 2 jours avant le déraillement. À un certain moment entre la dernière inspection et le passage du train, des niveaux d’eau élevés le long de l’emprise ont dépassé le haut des ponceaux. L’eau s’est infiltrée dans la plateforme saturée, ce qui a déplacé et détruit les ponceaux à dalot en bois sous la plateforme de la voie; le niveau d’eau était au moins 12 pieds au-dessus du lit du cours d’eau après l’emportement. Durant l’emportement par les eaux, la force du courant a emporté le bois d’œuvre des ponceaux jusqu’à 1000 pieds en aval de leur emplacement de départ. La détérioration des ponceaux à dalot en bois et la nécessité de les remplacer avaient été déterminées. Or, le remplacement de ponceaux n’est pas en soi une exigence réglementaire spécifique, et l’accident s’est produit avant l’exécution de ces travaux.

Il y avait une importante activité des castors en amont et dans les environs du lieu du déraillement. La réduction du programme de gestion des populations de castors de HBR en 2017 a accru la vulnérabilité de l’infrastructure à un emportement par les eaux, surtout si une digue de castor devait céder. En amont et à l’est de la voie ferrée, plusieurs digues de castor avaient cédé, probablement à cause des précipitations plus fortes cet été-là. Ces ruptures ont accru davantage le volume et l’écoulement d’eau qui s’accumulait juste à l’est et immédiatement en bordure de la plateforme, au point milliaire 99,59. Cette accumulation additionnelle d’eau a accru la pression hydrostatique sur le remblai de sable élevé de la couche supérieure de plateforme et a contribué à son affaissement.

Intervention en cas d’urgence

Dans l’événement à l’étude, plusieurs circonstances difficiles ont retardé l’accès au lieu de l’accident et ont compliqué l’intervention d’urgence. L’accès au lieu de l’accident a été retardé en raison de son emplacement isolé et du relief accidenté; de plus, le rejet de carburant diesel, le rejet possible de gaz de pétrole liquéfié et la nécessité de faire une évaluation des matières dangereuses, pour s’assurer que les niveaux étaient acceptables, ont tous contribué à prolonger le temps requis pour l’intervention.

Le Règlement sur la santé et la sécurité au travail (trains) stipule que les compagnies de chemin de fer doivent avoir un plan d’intervention d’urgence en place. Même si le plan d’intervention d’urgence de HBR comprenait des directives pour des types précis de menaces ou d’événements, il n’y en avait aucune pour une intervention d’urgence en cas de déraillement outre une structure hiérarchique et un message général sur la sécurité. Rien n’indiquait que HBR avait fait des exercices d’intervention d’urgence ou des examens d’interventions réelles. Ainsi, le personnel de HBR n’avait pas été adéquatement formé pour intervenir dans des déraillements importants ayant causé des blessures ou la mort à des voyageurs ou à des employés, ou mettant en cause des marchandises dangereuses. En l’absence d’une surveillance proactive du plan d’intervention d’urgence du chemin de fer de la baie d’Hudson par Transports Canada, les lacunes de ce plan relatives à la gestion des déraillements et à l’établissement d’une structure de commandement en cas d’incident sont passées inaperçues et n’ont pas été corrigées.

Zones exemptes de signalisation

Le déraillement s’est produit lorsque l’équipe de train se trouvait dans une zone exempte de signalisation. Les équipes de train communiquent par radio avec un contrôleur de la circulation ferroviaire (CCF), qui leur transmet des autorisations pour faciliter le mouvement des trains et assurer une distance sécuritaire entre les trains. Dans certains cas, les trains reçoivent des autorisations pour la subdivision au complet; ils traversent le secteur sans croiser un seul autre train ou du personnel de la voie. Même si les équipes de train maintiennent la communication radio avec le CCF, celui-ci n’a aucune façon de détecter où se trouve le train sur la subdivision ou ce qui se passe sur la voie.

HBR n’avait aucune directive précise selon laquelle une équipe de train ou le personnel d’entretien de la voie doit rendre compte de sa position par radio à des intervalles établis, et il n’existe aucune exigence réglementaire à cet effet.

Dans l’événement à l’étude, le pilote d’un hélicoptère civil qui survolait le secteur a vu le déraillement et a communiqué avec la Gendarmerie royale du Canada (GRC) pour lancer l’intervention. Si le pilote n’avait pas remarqué le déraillement et ne s’y était pas rendu pour venir en aide, le déraillement aurait pu passer inaperçu, sans aucun secours, pendant plusieurs heures de plus.

Si l’on utilise la régulation de l’occupation de la voie comme méthode de commande de trains en régions éloignées et s’il n’y a aucune directive précise de la compagnie pour que le personnel rende compte de sa position en route au CCF, il y a un risque accru que l’on mette du temps à détecter les situations d’urgence, dont les déraillements, et plus particulièrement si le personnel est dans l’incapacité de réagir.

1.0 Renseignements de base

1.1 L’accident

Le 15 septembre 2018, on a commandé le train 995 du chemin de fer de la baie d’Hudson (HBR) à 11 hNote de bas de page 1 à The Pas (Manitoba)Note de bas de page 2, à destination de Thompson (Manitoba) (figure 1).

Figure 1. Carte du lieu de l’événement (Source : Association des chemins de fer du Canada, Atlas des chemins de fer canadiens, avec annotations du BST)
Carte du lieu de l’événement (Source : Association des chemins de fer du Canada, Atlas des chemins de fer canadiens, avec annotations du BST)

Le train était composé de 3 locomotives de tête, de 4 wagons vides et de 23 wagons chargés. Huit des wagons chargés étaient des wagons-citernes chargés de marchandises dangereuses (MD) : 4 d’entre eux contenaient du gaz de pétrole liquéfié (GPL, UN 1075) et 4 contenaient de l’essence (UN1203). Le train pesait 3233 tonnes et mesurait 1601 pieds de long. L’équipe était formée d’un mécanicien de locomotive (ML) et d’un chef de train. Les 2 membres de l’équipe étaient qualifiés pour leur poste respectif, connaissaient bien le territoire et satisfaisaient aux exigences relatives au repos et à la condition physique.

Les locomotives ont fait l’objet d’une inspection avant le départ, le 10 septembre 2018 à The Pas. Tous les systèmes de sécurité, dont les radios par satellite des locomotivesNote de bas de page 3, fonctionnaient comme prévu.

Avant son départ, le train a fait l’objet d’une inspection mécanique complète et d’un essai de frein à air no 1. Aucune anomalie n’a été relevée.

Derrière les 3 locomotives de tête, on a placé les wagons du train dans l’ordre suivant :

À 11 h 55 le 15 septembre, le train a reçu l’autorisation 209 du système de régulation de l’occupation de la voie (ROV) qui autorisait le mouvement dans les 2 sens pour l’exécution de travaux sur la subdivision de Wekusko, entre les points milliaires 6,0 et 133,0 (Wabowden South).

À midi, le train a quitté The Pas (point milliaire 0,0) sur la subdivision de WekuskoNote de bas de page 4.

À 14 h 45, au moment où le train franchissait la voie d’évitement Dyce (point milliaire 61,9), l’équipe de train a transmis un compte rendu de position au contrôleur de la circulation ferroviaire (CCF) pour confirmer la position du train. Outre l’extrémité de la subdivision à Wabowden (point milliaire 136,4), il s’agit du seul endroit sur la subdivision où l’équipe de train devait transmettre un compte rendu de position au CCF. Même si les équipes de train pouvaient transmettre ces comptes rendus de position à d’autres endroits, ce n’était pas pratique courante.

Le jour de l’événement à l’étude, le train mis en cause et un train de voyageurs de VIA Rail Canada Inc. (VIA Rail) circulant en direction sud devaient se rencontrer à Wabowden, où les 2 trains pourraient se croiser et le train de VIA Rail pourrait continuer vers le sud. Le train de marchandises circulant en direction nord devait arriver à Wabowden à 18 h 10, avant l’arrivée prévue du train VIA Rail à 19 h.

À 16 h 32, pendant que le train circulait vers le nord à 25 mi/h sur un tronçon élevé de la voie, les membres de l’équipe de train ont remarqué un vide dans la surface de la plateforme devant eux, au point milliaire 99,59. Comme les rails semblaient être en place, il n’était pas évident qu’il y avait un important emportement par les eauxNote de bas de page 5. Par conséquent, le train a atteint le lieu de l’emportement par les eaux sans que l’équipe déclenche un serrage d’urgence des freins. Le train a circulé sur le segment de voie non supporté, la voie s’est affaissée, et la tête du train a percuté le côté opposé de l’espace vide créé par l’emportement par les eaux. Les 3 locomotives de tête, 2 wagons-tombereaux pneumatiques à ballast vides et 2 wagons-citernes chargés de GPL ont déraillé (figure 2).

Figure 2. Schéma du lieu du déraillement montrant les niveaux d’eau dans des conditions normales et avant l’emportement par les eaux (Source : BST)
Schéma du lieu du déraillement montrant les niveaux d’eau dans des conditions normales et avant l’emportement par les eaux (Source : BST)

Les 3 locomotives de tête ont été lourdement endommagées. La locomotive de tête a percuté le côté opposé de l’espace vide créé par l’emportement par les eaux à environ 12 pieds sous le niveau des rails. Les 2 locomotives et les wagons qui suivaient ont embouti la locomotive avant de s’immobiliser abruptement sur un peu plus de 400 pieds. La locomotive de tête s’est mise en « portefeuille » à un angle approximatif de 45 degrés en son centre. La génératrice principale et l’armoire électrique dans la locomotive de tête se sont déplacées vers l’avant dans la cabine de sorte que l’équipe de train s’est trouvée coincée. Les 2 membres de l’équipe de train ont été grièvement blessés; le chef de train est mort des suites de ses blessures avant qu’on puisse le secourir.

Les locomotives suivantes (la 2e locomotive et la 3e locomotive) se sont immobilisées sur le côté. Les 3 locomotives ont déversé du carburant diesel de leurs réservoirs de carburant et de l’huile moteur.

Au moment de l’accident, les conditions météorologiques étaient les suivantes : nuages épars, bonne visibilité et vent léger de l’ouest. La température était de 9 °C et le taux d’humidité était de 43 %.

1.2 Intervention en cas d’urgence

Le déraillement s’est produit dans une région éloignée du nord du Manitoba qui n’est accessible que par rail ou par transport aérien. Le lieu de l’accident se trouvait à environ 9,1 milles (15 km) au sud du passage à niveau de la route provinciale 6 du Manitoba à Ponton, situé au point milliaire 108,6 de la subdivision de Wekusko (figure 3). Ponton se trouve à 239 km au nord-est de The Pas et à 156 km au sud-ouest de Thompson.

Figure 3. Carte du lieu de l’événement (Source : Association des chemins de fer du Canada, Atlas des chemins de fer canadiens, avec annotations du BST)
Carte du lieu de l’événement (Source : Association des chemins de fer du Canada, Atlas des chemins de fer canadiens, avec annotations du BST)

1.2.1 15 septembre 2018

À 17 h 15, l’équipage d’un hélicoptère (composé du pilote et du copropriétaire de l’hélicoptère) qui était en route pour récupérer des arpenteurs dans le secteur a remarqué le train déraillé. Après avoir récupéré les arpenteurs, l’équipage a appris que ces derniers avaient entendu le déraillement quand il s’est produit. L’hélicoptère a changé de route pour survoler de nouveau le lieu du déraillement, et l’équipage et les arpenteurs ont aperçu une main qui s’agitait par une fenêtre de la cabine de la locomotive.

À 17 h 35, l’hélicoptère s’est posé sur une barre sableuse tout près, et l’équipage ainsi que les arpenteurs ont gagné à pied le lieu du déraillement. Les arpenteurs se sont approchés du site et sont venus en aide aux membres de l’équipe de train coincés dans la cabine de la locomotive. Le copropriétaire de l’hélicoptère a réussi à appeler les services d’urgence 911 en se tenant sur le dessus d’un wagon-citerne. Toutefois, le standardiste 911 n’a pu déterminer l’emplacement de l’accident.

Le copropriétaire a ensuite appelé un membre du détachement de la Gendarmerie royale du Canada (GRC) à Snow Lake pour signaler le lieu du déraillement et l’état de la situation. Ces renseignements ont été relayés au centre de contrôle de la GRC, qui a ensuite rappelé le pilote pour obtenir plus de renseignements sur le lieu du déraillement et pour déterminer quel équipement pourrait être nécessaire afin de secourir l’équipe de train.

À 18 h 07, la GRC a informé le CCF qu’il y avait eu un accident. À 18 h 18, la GRC a informé les services d’incendie et d’intervention d’urgence de Thompson (TFES) qu’un train avait déraillé, sans toutefois préciser que l’équipe de train était coincée dans la cabine de la locomotive et que certains des wagons déraillés transportaient des MD. Les services TFES ont dépêché à Ponton une ambulance des services médicaux d’urgence (SMU) avec 2 techniciens ambulanciers paramédicaux à bord.

À 18 h 23, le CCF a informé le superviseur chez HBR qu’il y avait eu un accident sur la subdivision de Wekusko, au sud de Ponton, et que la GRC était sur les lieux. Le CCF a aussi dit au superviseur que les membres de l’équipe de train étaient coincés dans la cabine de la locomotive. La direction de HBR a été mise au courant, et elle est intervenue à partir de The Pas. Le camion de réparation de la voie et du personnel formé pour les matières dangereuses ont été mis en état d’alerte. Un employé des Services de l’ingénierie a été dépêché sur les lieux de l’événement à bord d’un véhicule rail-route.

À 18 h 30, le centre de contrôle de la GRC a rappelé le pilote pour lui demander de retourner en hélicoptère à Ponton pour y récupérer 2 agents de la GRC qui étaient arrivés au passage à niveau. Le pilote a accepté et il est retourné à Ponton avec l’hélicoptère.

À 18 h 53, les services TFES ont reçu plus de renseignements, y compris des photos, selon lesquels 2 blessés étaient coincés dans la cabine de la locomotive de tête et que le train transportait des MD. On a sonné l’alarme générale pour appeler tous les membres des services TFES. Les photos et renseignements additionnels n’ont pas été transmis à HBR.

À 18 h 55, le pilote a regagné le lieu de l’accident avec les agents de la GRC, qui ont indiqué que les services TFES allaient intervenir. Le pilote est alors retourné à Ponton en hélicoptère pour transporter du personnel des services TFES ou du matériel qui pourrait être utile durant l’intervention. Toutefois, les services TFES n’ont pas dépêché de matériel.

À 19 h, une fois sur place, la GRC a signalé qu’il y avait une senteur de carburant diesel et possiblement de propane dans l’air. La GRC a aussitôt informé les services TFES que du carburant diesel fuyait et que le train comprenait des wagons-citernes de MD chargés de GPL, qui fuyaient peut-être eux aussi.

À 19 h 05, bien qu’un hélicoptère avait accédé au site, compte tenu du risque d’un rejet de MD mettant en cause du carburant diesel et du GPL, les services TFES ont décidé, conformément au protocole d’intervention d’urgence établi, de tenir tous les premiers intervenants à l’écart du lieu de l’accident jusqu’à ce que leur équipe d’intervention en présence de matières dangereuses ait fait une évaluation des dangers que posaient les MD. Par conséquent, le personnel des SMU a appris qu’il ne pourrait se rendre sur les lieux à bord de l’hélicoptère des arpenteurs tant que l’évaluation du site ne serait pas achevée.

Les services TFES savaient que 2 agents de la GRC et de l’équipement de premiers soins avaient été transportés sur les lieux en hélicoptère; ils avaient aussi dit aux agents de la GRC de se tenir de 300 à 500 m d’écart du wagon-citerne déraillé chargé de propane. Néanmoins, les agents de la GRC ont décidé de demeurer auprès des membres blessés de l’équipe de train.

À 19 h 12, une équipe de secouristes des services TFES a quitté Thompson à destination de Ponton, avec la remorque d’intervention en présence de matières dangereuses et de l’équipement connexe. Alors qu’ils étaient en route, les services TFES ont demandé que l’on dépêche une ambulance aérienne du Shock Trauma Air Rescue Service (STARS) à partir de Winnipeg. Ils ont appris que l’ambulance aérienne ne pourrait pas décoller à cause de mauvaises conditions météorologiques à Winnipeg, mais qu’un autre hélicoptère et un pilote étaient en alerte à Island Lake, à environ 250 km à l’est du lieu du déraillement, et qu’il se rendrait sur place plus tard dans la soirée.

Entre-temps, HBR a fourni des documents d’expédition, on a informé le Bureau du commissaire aux incendies du Manitoba et le Centre canadien d’urgence transport (CANUTEC), et on a dépêché plus de personnel et de l’équipement des services TFES à partir de Thompson.

À 19 h 40, l’équipe des SMU qui avait été dépêchée de Thompson est arrivée à Ponton. Le pilote de l’hélicoptère des arpenteurs a dit aux SMU à Ponton que les membres blessés de l’équipe de train avaient besoin des premiers soins et de médicaments contre la douleur. Les SMU ont répondu que les services TFES leur avaient interdit l’accès au lieu du déraillement tant que l’équipe d’intervention en présence de matières dangereuses n’avait pas terminé son évaluation du site.

À 20 h, le pilote de l’hélicoptère des arpenteurs est retourné au lieu du déraillement pour y récupérer le copropriétaire et les arpenteurs, puis il est retourné à Ponton pour livrer les clés d’un véhicule de la GRC et prendre des couvertures et des chauffe-corps. Les 2 agents de la GRC sont demeurés sur place auprès des membres blessés de l’équipe de train. L’hélicoptère des arpenteurs a fait un dernier voyage vers le lieu de l’accident pour livrer les couvertures et les chauffe-corps.

À 20 h 30, l’hélicoptère des arpenteurs a quitté le lieu de l’accident juste avant la tombée de la nuit; l’hélicoptère n’étant pas équipé pour le vol de nuit.

À 20 h 50, les services TFES sont arrivés à Ponton, et le capitaine des services TFES, qui avait reçu une formation complète en matière de structure de commandement en cas d’incident, a pris le commandement de l’intervention. C’était la première fois que les services TFES avaient à composer avec un accident ferroviaire de cette envergure, et le personnel TFES s’attendait à une intervention plus importante de la part du chemin de fer. Étant donné que le personnel de HBR, qui devait se déplacer de plus loin, n’était pas encore arrivé, les services TFES ont établi un poste de commandement en cas d’incident ainsi qu’une zone de rassemblement dans une gravière située non loin du passage à niveau de la route provinciale 6.

À 21 h 20, un superviseur et un surintendant de HBR sont arrivés au passage à niveau de la route provinciale 6 et se sont rendus à la zone de rassemblement. Aucun des membres du personnel d’intervention du chemin de fer n’avait reçu de formation officielle en intervention d’urgence ou en poste de commandement en cas d’incident. C’était la première fois que le personnel de HBR devait intervenir à la suite d’un accident de cette envergure. Sur le lieu de l’accident, les responsables de HBR ont travaillé de manière à soutenir les services TFES et la GRC.

À 21 h 45, l’ensemble du personnel et de l’équipement des services TFES avait atteint Ponton, y compris le chef des pompiers de Thompson, qui a pris le commandement de l’intervention. D’autres services d’urgence sont intervenus à partir de Snow Lake (SMU), et Wabowden (GRC, services d’incendie et SMU).

À 21 h 46, le groupe d’intervention des services TFES et des SMU a fait une première tentative pour accéder au lieu du déraillement afin de faire une évaluation du site et de mettre en branle les activités de secours. On a mis en œuvre :

Il était difficile d’atteindre le lieu du déraillement en VTT sur la plateforme de la voie. À 21 h 55, ayant franchi environ 2 km, les 2 VTT ont eu une crevaison. On a alors décidé d’utiliser les véhicules rail-route pour parcourir les 15 km qui séparaient le passage à niveau de la route provinciale 6 à Ponton du lieu du déraillement.

À 22 h, un contremaître de la voie de HBR à bord d’un camion équipé en rail-route est arrivé à la zone de rassemblement à Ponton avec une scie à rail et des outils hydrauliques. Le contremaître a reçu l’instruction de monter son camion sur les rails et de récupérer le personnel des services TFES qui était dans les VTT. Or, comme personne n’avait dit au contremaître où se trouvait le lieu de l’accident, il s’est malencontreusement dirigé vers le nord vers Wabowden, plutôt que vers le sud. Après avoir parcouru plusieurs milles sans croiser les VTT, le contremaître a fait demi-tour, est retourné à la zone de rassemblement, puis a poursuivi sa route vers le sud, jusqu’à ce qu’il atteigne les intervenants des services TFES et des SMU, qu’il a transportés jusqu’au site. Cette confusion par rapport à la direction du déplacement ainsi que les crevaisons des VTT ont retardé d’environ 90 minutes l’arrivée du premier groupe d’intervenants d’urgence des services TFES et des SMU sur les lieux de l’accident.

À 23 h 46, le premier groupe d’intervenants a atteint le site et en a fait une première évaluation. À 23 h 47, après avoir déterminé qu’il n’y avait pas eu de rejet de GPLNote de bas de page 6 et que le site était sécuritaire, l’équipe d’intervention a entrepris de secourir les membres blessés de l’équipe de train.

1.2.2 16 septembre 2018

À 0 h 12, un second groupe d’intervenants est arrivé sur place par véhicule rail-route avec plus d’équipement d’éclairage et de matériel hydraulique de désincarcération.

Le dégagement des membres blessés de l’équipe de train s’est avéré extrêmement difficile. L’efficacité de l’équipement de désincarcération était limitée par la taille et l’épaisseur des composants en acier de la locomotive qui emprisonnaient les membres de l’équipe de train dans la cabine de la locomotive. Les équipes d’intervention d’urgence ont d’abord axé leurs efforts sur le sauvetage et le dégagement du ML, mais après un peu de temps, elles se sont concentrées sur le chef de train.

À 0 h 53, malgré tous leurs efforts, les intervenants d’urgence n’ont pu dégager le chef de train; ce dernier est mort des suites de ses blessures pendant que l’on s’occupait de lui.

Les familles des membres de l’équipe de train n’ont été informées de l’accident que vers 1 h. Elles n’ont pas été avisées de l’accident lorsqu’il s’est produit, et personne ne leur a communiqué en temps opportun d’information exacte, notamment l’état des membres de l’équipe de train, à mesure que se déroulait l’intervention.

À la suite de la mort du chef de train, les intervenants d’urgence ont poursuivi leurs efforts de désincarcération pour tenter de dégager le ML de la cabine de la locomotive. À 2 h 30, on a dégagé le ML, que l’on a transporté par véhicule rail-route jusqu’à la zone de rassemblement (à environ 15 km de là), où un hélicoptère l’attendait.

À 3 h 30, l’hélicoptère a décollé en direction de l’hôpital général de Thompson; le ML était dans un état critique.

Vers 4 h, étant donné les conditions dangereuses qui persistaient sur les lieux de l’accident, tous les intervenants d’urgence ont été rappelés à la zone de rassemblement. Au terme de nombreuses discussions sur la situation, on a déterminé que la récupération du corps du chef de train nécessiterait l’aide d’autres organismes ayant de l’équipement de sauvetage plus évolué. Vers 7 h, la GRC a pris la relève du poste de commandement sur le site.

1.2.3 Entre le 16 septembre 2018 et le 17 septembre 2018

Le matin du 16 septembre, après d’autres discussions entre les intervenants d’urgence, il a été décidé que la désincarcération du corps du chef de train de la cabine serait confiée à l’équipe de recherche et sauvetage en milieu urbain (RSMU) du Bureau du commissaire aux incendies du Manitoba. Située à Brandon, l’équipe de RSMU avait l’équipement spécialisé et l’expertise nécessaires à la tâche.

Le 17 septembre, l’équipe de RSMU s’est déplacée de Brandon à Ponton (environ 700 km) en préparation de la désincarcération. Ce n’est qu’à 14 h 55 que la famille a été informée que la désincarcération du corps du chef de train aurait lieu le lendemain.

Pour ce qui est de la dépollution environnementale du lieu de l’accident, dès le 16 septembre, des barrages absorbants ont été installés en aval dans le cours d’eau afin de réduire l’impact environnemental du carburant diesel et de l’huile lubrifiante que la locomotive avait rejetés.

1.2.4 18 septembre 2018

À 10 h le 18 septembre, le Bureau du commissaire aux incendies et l’équipe de RSMU se sont rendus sur les lieux de l’accident. S’appuyant sur sa formation spécialisée de sauvetage et sur ses outils spécialisés, l’équipe a commencé l’opération de désincarcération. Vers 15 h 30, le corps du chef de train a été récupéré. Aussitôt la récupération achevée, les secouristes ont remis le commandement du site à HBR, qui a commencé la restauration du site.

1.2.5 Déroulement des événements liés à l’intervention d’urgence

Les tableaux 1 et 2 présentent un sommaire du déroulement des événements liés à l’intervention d’urgence.

Tableau 1. Déroulement des événements liés à l’intervention d’urgence du 15 septembre 2018
Heure Temps écoulé depuis l’accident Événement
16 h 32 00:00 Le train circulait sur le segment de voie non supporté, la voie s’est affaissée, et la tête du train a percuté le côté opposé de l’espace vide créé par l’emportement par les eaux.
17 h 15 00:43 L’équipage de conduite d’un hélicoptère qui survolait l’emplacement a aperçu le train déraillé.
17 h 35 01:03 L’hélicoptère est retourné au lieu de l’accident et s’est posé sur une barre sableuse située à proximité.
17 h 35 01:03 Le copropriétaire de l’hélicoptère a appelé les services d’urgence 911 pour signaler l’accident.
17 h 45 01:13 Le copropriétaire a appelé le détachement de la GRC à Snow Lake pour signaler l’accident.
18 h 07 01:35 La GRC a informé le CCF qu’il y avait eu un accident.
18 h 18 01:46 La GRC a informé les services d’incendie et d’intervention d’urgence de Thompson (TFES) qu’il y avait eu un accident. Les services TFES ont dépêché la première équipe des SMU.
18 h 23 01:51 La GRC a informé un superviseur de HBR qu’il y avait eu un accident.
18 h 26 01:54 La direction de HBR a été informée de l’accident.
18 h 30 01:58 L’hélicoptère a quitté le site pour aller récupérer du personnel de la GRC à Ponton.
18 h 45 02:13 Un employé des Services de l’ingénierie de HBR à The Pas a été dépêché sur les lieux de l’événement à bord d’un véhicule rail-route.
18 h 53 02:21 Les services TFES ont reçu plus de renseignements selon lesquels 2 personnes étaient coincées dans la cabine de la locomotive.
18 h 55 02:23 L’hélicoptère est arrivé sur les lieux de l’accident pour y déposer 2 agents de la GRC. L’hélicoptère est retourné à Ponton pour transporter d’autre personnel et de l’équipement au besoin.
19 h 02:28 Les agents de la GRC sur place ont informé les services TFES qu’il y avait une odeur de carburant diesel et possiblement de propane dans l’air. Ils ont indiqué également que du carburant diesel avait fui et que le train comprenait des wagons-citernes de MD chargés de GPL, qui fuyaient peut-être eux aussi.
19 h 05 02:33 Conformément au protocole d’intervention d’urgence établi, les services TFES ont décidé de tenir tous les intervenants à l’écart du lieu de l’accident jusqu’à ce que leur équipe d’intervention en présence de matières dangereuses ait fait une évaluation des dangers sur les lieux.
19 h 12 02:40 Une deuxième équipe de sauvetage (SMU) des services TFES a quitté Thompson à destination de Ponton.
19 h 40 03:08 La première équipe des SMU dépêchée par les services TFES est arrivée à Ponton.
20 h 10 03:38 Le camion et la remorque d’intervention en présence de matières dangereuses des services TFES ont quitté Thompson à destination de Ponton.
20 h 30 03:58 L’hélicoptère est revenu au lieu de l’accident avec des chauffe-corps, des couvertures et d’autres fournitures, puis est reparti.
20 h 50 04:18 Le capitaine des services TFES est arrivé à Ponton et a pris le commandement de l’intervention d’urgence.
21 h
(environ)
04:28 On a établi la zone de rassemblement dans une gravière près du passage à niveau de la route provinciale 6.
21 h 20 04:48 Le superviseur et le surintendant de HBR sont arrivés à la zone de rassemblement.
21 h 45 05:13 Tout le personnel et de l’équipement des services TFES étaient à Ponton, à la zone de rassemblement.
21 h 46 05:14 Du personnel des SMU a quitté la zone de rassemblement à bord de 2 VTT pour se rendre sur les lieux de l’accident.
21 h 55 05:23 En route vers le lieu de l’accident, les 2 VTT ont eu des crevaisons en roulant sur la voie.
22 h 05:28 Un contremaître de la voie de HBR à bord d’un véhicule rail-route est arrivé à la zone de rassemblement; on lui a demandé de récupérer les intervenants des SMU pour les transporter au lieu de l’accident. Toutefois, le véhicule rail-route est parti en direction nord, vers Wabowden, plutôt qu’en direction sud.
23 h 46 07:14 Ayant fait demi-tour avec le véhicule rail-route pour se diriger vers le sud et ayant récupéré les intervenants des SMU, le contremaître a atteint le lieu de l’accident.
23 h 47 07:15 Au terme d’une évaluation des matières dangereuses, le lieu de l’accident a été déclaré sécuritaire et l’intervention d’urgence a pu se poursuivre sans restriction. Les intervenants des SMU ont commencé à s’occuper des membres blessés de l’équipe de train.
Tableau 2. Déroulement des événements liés à l’intervention d’urgence du 16 septembre 2018
Heure Temps écoulé depuis l’accident Événement
0 h 12 07:40 Un second groupe d’intervenants des SMU est arrivé au lieu de l’accident par véhicule rail-route avec de l’équipement de désincarcération hydraulique et de l’équipement d’éclairage additionnel.
0 h 15 (environ) 07:43 Les intervenants des SMU ont commencé à dégager les membres blessés de l’équipe de train.
0 h 53
(environ)
08:21 Le chef de train est mort des suites de ses blessures pendant que les intervenants des SMU s’occupaient de lui.
0 h 55 (environ) 08:23 Les intervenants des SMU ont continué leurs efforts pour dégager le ML de la cabine de la locomotive.
2 h 30 09:58 On a réussi à dégager le ML de la cabine de la locomotive. On l’a ensuite transporté par véhicule rail-route jusqu’à la zone de rassemblement.
3 h 30 10:58 On a transporté le ML en hélicoptère jusqu’à l’hôpital de Thompson.
7 h (environ) 14:28 Le commandement des interventions sur le site a été transféré à la GRC.

1.2.6 Restauration du site

Le ministère du Développement durable du Manitoba est intervenu immédiatement sur les lieux de l’accident et a installé des barrages absorbants dans le cours d’eau pour atténuer l’impact sur l’environnement en aval.

HBR a confié à Tervita et à GFL Environmental le soin de restaurer le lieu de l’accident. Les 2 entreprises sont arrivées peu après l’accident et ont installé des barrages absorbants et en caoutchouc additionnels à proximité du lieu de l’accident pour atténuer davantage les effets potentiels sur l’environnement.

La restauration du site a également compris le transbordement du GPL à partir des wagons-citernes déraillés et le retrait du matériel roulant endommagé. On a installé de nouveaux ponceaux en métal, et renforcé les rivages du cours d’eau avant de remettre en état la plateforme et la voie.

GFL Environmental a retiré tous les contaminants environnementaux restants : carburant de locomotive, liquide de refroidissement, huile, batteries et autres.

HBR a retenu les services de Clifton Engineers, entre autres pour effectuer des essais, restaurer le site et surveiller l’environnement à cet endroit.

Le ministère du Développement durable du Manitoba a fait un suivi auprès de la compagnie de chemin de fer avant le gel en 2018 pour s’assurer que le site était propre et sans contaminants ni débris avant l’hiver.

1.3 Caractéristiques du gaz de pétrole liquéfié et précautions à prendre en cas de rejet

Le GPL est un gaz comprimé, inflammable et sans odeur. On ajoute souvent de l’éthanethiol, une substance odorante, au GPL pour faciliter la détection de tout rejet de ce produit.

1.3.1 Guide des mesures d’urgence 2016 – Guide 115

Le Guide 115 du Guide des mesures d’urgence 2016Note de bas de page 7 indique les dangers potentiels des divers gaz inflammables, dont le GPL, et donne des conseils pour les interventions d’urgence et la sécurité publique. De plus, le guide décrit les dangers potentiels et les précautions de sécurité à prendre en présence de gaz inflammables.

Les dangers potentiels associés aux gaz inflammables comprennent l’incendie ou l’explosion.

  • EXTRÊMEMENT INFLAMMABLE.
  • S’enflamme facilement sous l’action de la chaleur, d’étincelles ou de flammes.
  • Forme des mélanges explosifs avec l’air.
  • Les vapeurs de gaz liquéfiés sont initialement plus lourdes que l’air et se diffusent au ras du sol.

[…]

  • Les vapeurs peuvent se propager vers une source d’allumage et provoquer un retour de flamme au point de fuite.
  • Les bouteilles à gaz exposées au feu peuvent laisser s’échapper des gaz inflammables par les dispositifs de sécurité.
  • Les contenants peuvent exploser lorsque chauffés.
  • Les bouteilles à gaz brisées peuvent s’autopropulser violemment.

Les dangers pour la santé des gaz inflammables comprennent l’asphyxie, l’irritation respiratoire, les brûlures et les engelures. Le guide précise également que

  • Les vapeurs peuvent causer des étourdissements ou l’asphyxie sans   avertissement.
  • Certaines peuvent être irritantes si inhalées à fortes concentrations.
  • Le contact avec le gaz ou le gaz liquéfié peut causer de graves blessures, des   brûlures et/ou des engelures.
  • Un feu peut produire des gaz irritants et/ou toxiques.

1.4 Norme NFPA 472 de la National Fire Protection Association sur les compétences des intervenants à l’égard des incidents liés aux matières dangereuses et aux armes de destruction massive

Les organismes d’intervention partout en Amérique du Nord appliquent la norme NFPA 472 : Standard for Competence of Responders to Hazardous Materials/Weapons of Mass Destruction Incidents (NFPA 472) de la National Fire Protection Association (NFPA). Cette norme stipule le niveau minimal de compétences requis du personnel d’intervention d’urgence lorsque des matières dangereuses ou des armes de destruction massive sont en cause. Ce niveau minimal est nécessaire pour une intervention fondée sur le risque dans un incident de ce type. Cette norme traite des compétences pour 

Les compétences que doivent avoir les techniciens, Marchandises dangereuses, et les responsables des opérations d’intervention sont semblables, y compris les capacités suivantes :

  1. analyser un incident mettant en cause des matières dangereuses ou des armes de destruction massive pour déterminer la complexité du problème et son dénouement potentiel;
  2. planifier une intervention en fonction des capacités du personnel disponible;
  3. mettre en œuvre l’intervention planifiée conformément aux procédures d’exploitation courantes et au plan de sécurité et de gestion du lieu de l’intervention;
  4. évaluer la progression de l’intervention planifiée et modifier le plan, au besoin;
  5. clore l’incident en contribuant à une réunion-bilan et à la critique d’incident Note de bas de page 9.

En outre, les responsables des opérations d’intervention des organismes d’intervention doivent tenir une réunion-bilan d’incident et une critique multiservice, et présenter un rapport d’incident à l’autorité compétente Note de bas de page 10. La critique a pour objet de découvrir ce qui s’est bien passé et ce qui s’est mal passé, et ce qu’il faut améliorer pour rendre les interventions plus sûres à l’avenir.

Après l’accident, les services TFES ont fait un compte rendu interne de l’événement; on n’a relevé aucun problème. HBR n’a tenu aucune réunion-bilan et n’a pas été invité à participer à celle des services TFES.

1.5 Intervention d’urgence mettant en cause des marchandises dangereuses

Lorsqu’une situation d’urgence comprend des MD, les pratiques exemplaires du secteur exigent la mise en place d’une structure officielle de commandement en cas d’incident pour gérer les interventions. Quand plusieurs organismes interviennent pour s’entraider, chacun doit établir son propre poste de commandement, puis collaborer sous la direction d’une structure de commandement unifiée intégrée. Dans l’événement à l’étude, seuls les services TFES ont établi un poste de commandement.

Par poste de commandement en cas d’incident, on entend un système de gestion des interventions qui permet d’organiser les gens, l’équipement et les ressources afin d’intervenir dans toutes les situations d’urgence, y compris les incidents qui comprennent un incendie ou mettent en cause des MD. Ce système est très souvent utilisé par les militaires, les pompiers, les policiers et les équipes d’intervention d’urgence mettant en cause des MD. Aux États-Unis, la loi a été modifiée en mars 1990 pour y inclure ce systèmeNote de bas de page 11. Au Canada, lorsqu’on établit un poste de commandement en cas d’incident qui comprend un incendie ou met en cause des MD, on reconnaît souvent le chef des pompiers local ou un représentant provincial comme l’autorité compétente, et cette personne agit à titre de responsable des opérations d’intervention. Le principal représentant du chemin de fer sur place établit habituellement un poste de commandement en cas d’incident de la compagnie qui s’intègre dans la structure de commandement unifiée, et il coordonne les interventions ou les activités de restauration du site de la compagnie.

Pour tout événement ferroviaire mettant en cause des MD, y compris du GPL, l’équipe de train représente habituellement la source d’information initiale. Au cas où l’équipe de train serait hors d’état d’agir ou incapable de fournir des renseignements, il revient aux intervenants d’urgence qualifiés de recueillir et d’évaluer la source initiale d’information. Ces intervenants comprennent habituellement du personnel ferroviaire qualifié et le personnel qualifié des services d’incendie.

Une intervention d’urgence mettant en cause des MD comprend le plus souvent les activités suivantes :

  1. Mise en place d’un poste de commandement et sélection d’une zone de rassemblement.
  2. Collecte des renseignements initiaux par les intervenants d’urgence à partir d’une distance sécuritaire.
  3. Évaluation des renseignements initiaux par les intervenants d’urgence et établissement d’un plan d’entrée sur les lieux et d’un plan de travail sécuritaire. Ces plans comprennent habituellement la méthode d’entrée sur les lieux, la surveillance des lieux, l’identification des sources potentielles d’allumage, et l’utilisation de l’équipement de protection individuel (EPI) approprié.
  4. Entrée sur les lieux par des intervenants munis d’EPI approprié, dont un APRA à pression positive, au besoin. Normalement, les intervenants se munissent aussi de dispositifs de mesure de la qualité de l’air et de détection de produits, ainsi que de radios, d’appareils photo et de téléphones cellulaires à sécurité intrinsèqueNote de bas de page 12. Les dispositifs électroniques qui ne sont pas à sécurité intrinsèque peuvent être une source d’allumage.
  5. Une fois que l’évaluation des lieux est terminée et que l’on juge que les lieux sont sécuritaires, les SMU et autres intervenants d’urgence entrent sur les lieux pour entreprendre les opérations de sauvetage et d’autres activités au besoin.

1.5.1 Prise de décisions durant l’intervention d’urgence

La recherche sur la façon dont les personnes et les équipes prennent des décisions dans des situations de stress intense souligne la nécessité de procédures claires et bien exercées pour faire face à des situations d’urgence. En particulier, il a été démontré que, quand des équipes entreprennent une tâche nouvelle dans des conditions extrêmes, elles ont tendance à être prudentes dans leur approche et à se concentrer sur les règles ou les procédures établiesNote de bas de page 13. Ce comportement s’explique comme suit [traduction] :

Les personnes éprouvant du stress, de l’anxiété et une excitation psychologique tendent à accorder d’autant plus d’importance à des hypothèses internes et à des indices dominants pour réagir selon des modalités bien apprises. Autrement dit, la réponse décisionnelle potentielle à une situation de crise est de s’en tenir aux règles, en fonction des réponses apprisesNote de bas de page 14.

Les recherches ont fait ressortir l’importance de responsabilités hiérarchiques claires face à des situations d’urgenceNote de bas de page 15.

1.6 Plan d’intervention d’urgence du chemin de fer de la baie d’Hudson

Le plan d’intervention d’urgence de HBR stipule ce qui suit [traduction] :

1.0 PLANS D’INTERVENTION D’URGENCE

1.1 Plans généraux

Le chemin de fer de la baie d’Hudson s’efforce de mener ses activités de manière à assurer la sécurité de ses employés et du public, et à être entièrement conforme à tous les règlements applicables.

En cas d’incident, le chemin de fer de la baie d’Hudson prendra rapidement toutes les mesures appropriées conformément à ce plan, fera appel à des intervenants d’urgence compétents pour protéger la vie, la santé, les biens et l’environnement, tout en collaborant entièrement avec les organismes de réglementation, les organismes publics et les médias.

Nous maintenons notre capacité d’intervention par l’intermédiaire de notre personnel d’intervention d’urgence local. Nous mettons à l’essai notre plan d’intervention d’urgence en faisant des exercices et des examens systématiques de toutes les interventions réelles.

Les autres parties du plan d’intervention d’urgence de HBR portent sur les types particuliers de menaces ou d’événements : alertes à la bombe, explosions non accidentelles, détournement d’un train, prise d’otages, et barrages sur les voies.

Le plan d’intervention d’urgence de HBR ne comprend aucun processus ni aucune procédure pour une intervention d’urgence en cas de déraillement en région éloignée mettant en cause des MD et des blessures potentiellement mortelles à l’équipe de train. Les seuls renseignements pertinents pour ce type d’urgence étaient une structure hiérarchique et un message général sur la sécurité.

Les dossiers de HBR n’indiquaient pas que la compagnie avait mené des exercices d’intervention d’urgence en collaboration avec d’autres organismes d’intervention ou examiné systématiquement des interventions précédentes.

1.7 Examen des lieux

1.7.1 Wagons de marchandises déraillés

Les 2 wagons-tombereaux pneumatiques à ballast vides se sont immobilisés dans diverses positions dans l’espace vide créé par l’emportement par les eaux.

Le premier wagon-citerne déraillé (PROX 35275) s’est immobilisé en position perpendiculaire à la voie. Ce wagon est demeuré à la verticale avec le bout A se trouvant au bas d’un remblai, dans le lit du cours d’eau; il affichait une brûlure due au frottement d’une roue sur le côté de l’enveloppe externe de la citerne.

Le second wagon-citerne déraillé (GATX 209551) s’est immobilisé à la verticale, à côté de la voie et parallèlement à celle-ci, sur l’emprise. La traverse pivot du bout A de ce wagon était lourdement endommagée, mais la citerne ne présentait aucun dommage visible.

Ni l’un ni l’autre des wagons-citernes déraillés n’a rejeté quelque produit que ce soit.

1.7.2 Voie

Un affaissement de la couche supérieure de plateforme et un espace vide créé par un emportement par les eaux mesurant 50 pieds de long sur 15 pieds de profond avaient laissé les rails et les traverses suspendus dans le vide.

Avant le déraillement, 2 ponceaux à dalot en bois, chacun mesurant 40 pouces de haut, 48 pouces de large et 42 pieds de long, assuraient le drainage du cours d’eau à cet endroit; le haut du ponceau se trouvait à environ 12 pieds sous l’assiette des rails. Ces ponceaux avaient été inspectés le 13 septembre 2018. Les dossiers indiquent que le niveau d’eau était élevé, mais que les 2 ponceaux permettaient l’écoulement de l’eau.

L’emportement par les eaux s’est produit soudainement et a entraîné un important écoulement d’eau en aval; le niveau d’eau a diminué de plus de 12 pieds.

Il y avait des indications d’une importante activité de castors en amont et à l’est de la voie ferrée; en effet, plusieurs digues de castors avaient cédé.

On a retrouvé du bois d’œuvre des ponceaux ainsi que des plantes du lit du cours d’eau aplaties jusqu’à 1000 pieds en aval, au nord de l’emportement par les eaux (figure 4).

Figure 4. Photo des lieux en aval montrant du bois d’œuvre des ponceaux et des plantes aplaties du lit du cours d’eau (Source : BST)
Photo des lieux en aval montrant du bois d’œuvre des ponceaux et des plantes aplaties du lit du cours d’eau (Source : BST)

1.8 Conditions météorologiques durant le printemps et l’été précédents

Il avait plu beaucoup au printemps et à l’été 2018 à l’endroit où l’événement s’est produit, les précipitations ayant été abondantes depuis mai.

La station de surveillance d’Environnement Canada la plus proche se trouve à Cross Lake Jenpeg, à quelque 100 km à l’est du lieu du déraillement. Cependant, les données enregistrées à cet endroit ne comprenaient pas les totaux de précipitations.

La station de surveillance d’Environnement Canada à Thompson, située à environ 160 km au nord du lieu du déraillement, avait enregistré 380,8 mm de précipitations à l’été 2018. Les précipitations moyennes en été dans ce secteur étaient de 237,0 mm.

1.9 Chemin de fer de la baie d’Hudson

Le chemin de fer Canadien du Nord a construit le HBR au début des années 1900. Ce dernier a ensuite été repris par le gouvernement du Canada et achevé en 1929. Cette voie ferrée relie The Pas et Churchill, et comprend une ligne secondaire pour desservir Flin Flon ainsi qu’un contrat d’exploitation conclu avec le chemin de fer Keewatin Railway Company pour desservir Lynn Lake.

Les activités de HBR visent principalement les secteurs axés sur les ressources : le transport de minerai, de bois d’œuvre, de céréales et de produits pétroliers ainsi que de l’équipement, des vivres et d’autres provisions essentielles pour les résidents des collectivités nordiques éloignées.

1.9.1 Propriété de la voie et investissement de capitaux

En 1997, OmniTRAX Canada (OmniTRAX) a fait l’acquisition de HBR, du port de Churchill et de tous les actifs connexes, et a entrepris d’exploiter l’ensemble sous le nom HBR. Tant avant qu’après l’acquisition par OmniTRAX, la voie ferrée entre The Pas et Churchill était entretenue et exploitée comme voie de catégorie 3Note de bas de page 16 avec une vitesse maximale permise de 40 mi/h pour les trains de marchandises.

En 2014, alors que les volumes de trafic étaient en baisse et que l’on envisageait la vente de la voie, HBR, exploité par OmniTRAX, a commencé à réduire ses investissements dans le personnel d’entretien et les projets d’amélioration de la voie.

En 2015, à la suite de la dissolution de la Commission canadienne du blé, le trafic de céréales au port de Churchill a considérablement diminué, ce qui a entraîné d’autres réductions de l’effectif et des investissements. Par la suite, OmniTRAX a amorcé le processus de vente du chemin de fer et du port.

Le printemps de 2017 a été marqué par de fortes inondations qui ont causé au total 23 emportements de la voie par les eaux et lourdement endommagé la voie entre Gillam et Churchill. Essentiellement, on a dû fermer ce tronçon de voie ferrée HBR, ce qui a interrompu le service ferroviaire à Churchill et au port de Churchill. Étant donné l’ampleur des coûts de réparation de la voie endommagée par les inondations, HBR n’a pas entrepris ces travaux. De plus, la voie ferrée étant à vendre, une grande partie des autres travaux d’entretien de l’infrastructure a également été reportée. En général, HBR, exploité par OmniTRAX, n’a effectué qu’un minimum d’entretien pour maintenir le reste de la voie ferrée en service tout en satisfaisant aux exigences réglementaires.

Le personnel d’ingénierie étant réduit, l’infrastructure de la voie a commencé à se détériorer. Le 25 octobre 2017, HBR a diffusé un bulletin de marche général qui a rétrogradé la voie à la catégorie 2, ce qui limitait la vitesse à 25 mi/h pour les trains de marchandises, et à 30 mi/h pour les trains de voyageurs sur l’ensemble de la subdivision de Wekusko.

De 2017 jusqu’au moment de la vente de HBR en 2018, OmniTRAX n’a fait aucun investissement important en capitaux dans HBR et n’était pas tenu de le faire, malgré la nécessité de travaux de réfection à plusieurs endroits. On avait noté qu’il fallait remplacer des ponceaux à dalot au point milliaire 99,59 en raison de la détérioration et de l’affaissement de la voie, travaux qui exigeraient le soulèvement de la voie. Or, le remplacement des ponceaux n’est pas en soi une exigence réglementaire spécifique. Néanmoins, le Règlement concernant la sécurité de la voie approuvé par Transports Canada (TC), également connu sous le nom de Règlement sur la sécurité de la voie, stipule les faits suivants :

Les ouvrages de drainage et autres conduits pour l’écoulement des eaux passant sous une plate-forme ou adjacents à celle-ci doivent être entretenus afin d’assurer une évacuation satisfaisante des débits d’eauNote de bas de page 17.

Le 31 août 2018, Arctic Gateway Group LP (un consortium de propriétaires) a fait l’acquisition de HBR, du port de Churchill et de tous les actifs et passifs connexes d’OmniTRAX. L’Arctic Gateway Group a poursuivi les activités ferroviaires sous le nom de HBR. La nouvelle compagnie a hérité de tous les aspects des activités, dont les politiques et procédures d’exploitation de HBR en place quand le chemin de fer appartenait à OmniTRAX, y compris le plan d’intervention d’urgence de HBR.

1.10 Renseignements sur la subdivision

La subdivision de Wekusko commence à The Pas (point milliaire 0,0) et s’étend vers le nord jusqu’à Wabowden (point milliaire 133,0). Une grande partie de la subdivision se trouve en région éloignée, où la couverture cellulaire est limitée.

La subdivision de Wekusko est une voie ferrée au trafic de faible densité. Le trafic ferroviaire comprend 4 trains de voyageurs de VIA Rail et 2 trains de marchandises de HBR par semaine.

Les mouvements sur la subdivision se font en ROV, comme l’autorise le Règlement d’exploitation ferroviaire du Canada (REF), et ils sont supervisés par un CCF de RailTerm en poste à Montréal (Québec). Dans les environs de la zone de l’accident, la vitesse maximale permise était de 25 mi/h pour les trains de marchandises et de 30 mi/h pour les trains de voyageurs.

La méthode de commande des trains en ROV signifie que les trains circulent dans une zone exempte de signalisation. Dans ce type de zone, les équipes de train n’ont aucun signal à observer en bordure de voie. Les équipes de train communiquent plutôt par radio avec un CCF, qui leur transmet des autorisations pour faciliter le mouvement des trains. Il incombe au CCF de coordonner les mouvements des trains et de maintenir une distance sécuritaire entre eux.

Les trains reçoivent habituellement des autorisations pour la subdivision au complet et il arrive souvent qu’ils traversent un secteur sans croiser un seul autre train ou du personnel de la voie. Quoique les équipes de train communiquent par radio avec le CCF, celui-ci n’a aucune façon de détecter à distance où se trouve le train sur la subdivision ou ce qui pourrait se passer sur la voie. Au moment du déraillement, il n’y avait aucune directive de la compagnie selon laquelle une équipe de train doit rendre compte de sa position par radio à des intervalles établis, et il n’existait aucune exigence réglementaire à cet effet.

1.11 Renseignements sur la voie

Dans les environs du lieu du déraillement, la voie était en alignement droit, avec une légère pente descendante en direction nord vers le cours d’eau. La voie était composée de rails de 100 livres avec éclisses à tête appuyée fabriqués par Algoma Steel en 1950 et posés en 1955. Les rails mesuraient 78 pieds de long et étaient attachés ensemble par des éclisses à 4 trous fixées par des boulons de 1 pouce. Les rails reposaient sur des selles à double épaulement de 12 pouces fixées à l’aide de 2 crampons chacune à toutes les 2 traverses. Les traverses étaient en bois tendre, et il y en avait 55 par 100 pieds de voie. Le ballast était un mélange de gravier tout-venant et de pierre concassée de 3 pouces ou moins; les cases étaient garnies et le ballast s’étendait légèrement au-delà des traverses pour former de larges banquettes.

La plateforme se trouvait à environ 12 pieds au-dessus du relief local. À l’endroit où s’est produit le déraillement, la couche supérieure de plateforme se composait principalement de sable (figure 5).

Figure 5. Coupe transversale de la plateforme et de la couche supérieure de plateforme au lieu du déraillement (Source : Chemin de fer de la baie d’Hudson)
Coupe transversale de la plateforme et de la couche supérieure de plateforme au lieu du déraillement (Source : Chemin de fer de la baie d’Hudson)

Un pont à chevalets franchissait auparavant le cours d’eau à cet endroit et permettait le drainage des environs. À une certaine époque, on a remplacé ce pont par 2 ponceaux à dalot en bois et du remblai de sable. La couche supérieure de plateforme avait été compactée au fil des ans par le passage des trains. Toutefois, elle demeurait susceptible aux infiltrations d’eau, en particulier durant les périodes de crues dans les environs.

1.12 Drainage dans les environs du déraillement

La voie ferrée du HBR traverse de vastes régions de forêt boréale et de terres humides qui abritent une importante population de castors. Le territoire à l’est du lieu du déraillement comprend environ 10 milles carrés de forêt boréale.

Le drainage naturel du cours d’eau s’écoule principalement vers le nord-ouest. Dans les environs de l’accident, les ponceaux sous la voie ferrée situés aux points milliaires 96,45, 99,59, 99,79 et 99,91 assuraient le drainage de ce territoire. Dans des conditions normales d’écoulement des eaux, chacun de ces ponceaux fonctionnait indépendamment.

Au point milliaire 99,59, l’eau s’écoulait par les ponceaux à dalot en bois installés à 12 pieds sous les rails. Toutefois, des volumes d’eau élevés ont causé des refoulements d’eau et la formation d’un vaste bassin à l’est (en amont) de la voie ferrée. Un examen aérien réalisé après le déraillement a permis de constater la présence de signes visibles d’eau sur la rive, ce qui témoignait des récents niveaux élevés de l’eau à l’est de la voie ferrée (figure 6).

Figure 6. Vue aérienne vers l’est. Les marques de hautes eaux visibles sur la rive sont indiquées à l’est de la voie ferrée. Les flèches montrent l’écoulement des eaux vers l’ouest. (Source : BST)
Vue aérienne vers l’est. Les marques de hautes eaux visibles sur la rive sont indiquées à l’est de la voie ferrée. Les flèches montrent l’écoulement des eaux vers l’ouest. (Source : BST)

1.13 Gestion des populations de castors

Le Règlement sur la sécurité de la voie de TC exige que la plateforme soit entretenue et dégagée afin d’assurer un drainage satisfaisant des débits d’eau prévus dans une zone donnée. Quand l’activité des castors modifie ou pourrait modifier le drainage des eaux attendu, il incombe au chemin de fer de contrôler les niveaux d’eau qui pourraient compromettre l’exploitation sécuritaire des activités ferroviaires.

Quand elle exploitait cette voie ferrée, la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada (CN) avait un programme d’évaluation des dangers liés aux activités des castors. Ce programme prévoyait l’exécution d’évaluations des dangers pour les tronçons du réseau ferroviaire où les populations de castors étaient importantes et où leurs activités pourraient compromettre le mouvement sécuritaire des trains. Ces endroits étaient cernés et classés selon une cote numérique en fonction de la gravité du problème. Le système de classement des cotes tenait compte du potentiel et de la nature du danger, des caractéristiques du bassin versant, de la topographie, du niveau d’activité des castors, et de l’infrastructure existante.

Cette cote servait à quantifier les conditions et les circonstances qui accroissent la probabilité ou la gravité d’un affaissement du remblai de chemin de fer causé par un afflux soudain d’eau et de débris. Les événements qui peuvent causer l’affaissement du remblai de chemin de fer comprennent :

Aux endroits ayant une cote de danger élevé, le retrait des castors et l’enlèvement des digues de castors comptent parmi les principaux moyens de gestion de l’écoulement des eaux lié à l’activité de cet animal. On a beaucoup mis en œuvre ce programme avant qu’OmniTRAX acquière ce chemin de fer en 1997.

HBR, exploité par OmniTRAX, a maintenu un programme de gestion des populations de castors par l’intermédiaire d’un entrepreneur spécialisé dans ce domaine. En 2015, cet entrepreneur a enlevé 813 digues de castors.En 2016, HBR a commencé à enlever les digues de castors de façon ponctuelle, surtout en fonction de ce que l’on pouvait voir à partir de la voie. On a fait appel à un entrepreneur spécialisé en explosifs à l’appui de ces travaux. Cette activité s’est poursuivie durant le printemps, l’été et l’automne, avec pour résultat l’enlèvement de 82 digues de castors.

L’entrepreneur a enlevé 55 digues de castors durant l’été 2017. Or, à l’automne 2017, la compagnie a décidé de ne plus faire appel à l’entrepreneur spécialisé en explosifs, et on a abandonné le programme d’enlèvement des digues de castors. À compter de l’été 2017, ce sont les équipes de travail de HBR qui enlevaient les digues de castors, manuellement ou à l’aide de machines, lorsque ces digues étaient accessibles à partir de la voie.

En août 2018, un entrepreneur a été embauché pour une période de 4 jours avant la vente de HBR à Arctic Gateway, et ce dernier a enlevé 41 digues.

1.14 Inspections de la voie et des ponceaux par le chemin de fer de la baie d’Hudson

Au cours de l’été 2018, le personnel d’ingénierie du chemin de fer s’employait principalement à assurer le drainage efficace le long de l’emprise et à effectuer tout entretien requis pour maintenir la voie en service.

Dans les environs du déraillement, on a fait les inspections suivantes :

1.14.1 Inspections des hautes eaux et géotechniques par le chemin de fer de la baie d’Hudson

Au cours de la semaine qui a précédé l’accident, on a vérifié à 3 occasions la voie de la subdivision de Wekusko pour surveiller les hautes eaux.

Le lundi 10 septembre 2018, on a relevé de hautes eaux à plusieurs endroits, y compris au point milliaire 99,59, où le niveau d’eau était 6 pouces au-dessus du ponceau; toutefois, l’eau s’écoulait encore librement. Les ponceaux aux points milliaires 99,79 et 99,91 étaient obstrués et ont dû être dégagés. On a également noté que du ballast supplémentaire était requis pour soulever les 2 rails au point milliaire 99,59.

Le mercredi 12 septembre 2018, on a vérifié la voie dans les environs du lieu du déraillement; on a une fois de plus remarqué de hautes eaux. On a planté un pieu au bord de l’eau pour surveiller le niveau d’eau. On a inspecté la plateforme, et aucune infiltration d’eau n’était visible dans la plateforme à ce moment. On a livré du ballast en prévision du soulèvement de la voie au point milliaire 99,59.

On a de nouveau vérifié la voie à 15 h 45, le jeudi 13 septembre 2018. On a remarqué que le niveau d’eau au point milliaire 99,59 avait baissé de 1 pied par rapport à celui de la veille, et que le soulèvement de la voie et de la surface étaient terminés. Ce fut la dernière inspection de la voie avant le déraillement. Aucune autre mesure n’a été jugée nécessaire pour protéger la voie avant le passage des prochains trains, prévus le 15 septembre 2018.

Au moment de l’inspection du 13 septembre, les inspecteurs et superviseurs de la voie de HBR n’étaient pas entièrement au courant de la susceptibilité de cet endroit à la saturation en eau, de l’ampleur et des conséquences potentielles de la formation inégale de bassins contre la plateforme, et en quoi cela pourrait influer sur la stabilité des sols. HBR, exploité par OmniTRAX, n’a donné aucune formation géotechnique à ses inspecteurs ni à ses superviseurs de la voie avant le déraillement, et ces employés n’avaient reçu aucune formation de la sorte avant l’acquisition de HBR par OmniTRAX, en 1997.

1.14.2 Formation géotechnique pour d’autres chemins de fer

À la suite d’un important déraillement en 1997 causé par l’affaissement de la couche supérieure de plateforme près de Conrad (Colombie-Britannique)Note de bas de page 18, le CN et le Chemin de fer Canadien Pacifique (CP) ont ensemble élaboré un programme de formation sur les dangers liés à la couche supérieure de plateforme destiné aux employés d’entretien de la voie et intitulé Geotechnology for Railroaders (géotechnologie pour les employés de chemins de fer). Depuis, le personnel du CN et du CP à l’échelle du pays a suivi cette formation. Ce programme comprend des éléments qui portent sur la préparation et les inspections printanières par le personnel de l’ingénierie, un formulaire de signalement de dangers liés au drainage, et les mesures de sécurité à prendre pour gérer les niveaux d’eau.

1.15 Surveillance réglementaire

C’est à TC qu’il incombe d’effectuer diverses activités de surveillance réglementaire du secteur ferroviaire au Canada et de lui fournir des directives. Cela comprend la surveillance prévue par la Loi sur la sécurité ferroviaire et les règlements connexes, le Règlement sur la sécurité de la voie et l’infrastructure connexe ainsi que le Règlement de 2015 sur le système de gestion de la sécurité ferroviaire (Règlement de 2015 sur le SGS). TC se charge également de la surveillance réglementaire et de la mise en application de la partie II du Code canadien du travail (CCT) et de ses règlements connexes au nom du ministre du Travail, dans le cas d’événements qui touchent les employés des services de bord des chemins de fer.

1.15.1 Lignes directrices de Transports Canada relatives aux ponceaux et au drainage

En janvier 2012, TC a publié une Ligne directrice sur la gestion de la sécurité des ponceaux Note de bas de page 19 élaborée de concert avec le secteur ferroviaire. L’objectif était de fournir aux compagnies de chemin de fer un guide pour les aider à élaborer leur propre programme de gestion de la sécurité des ponceaux et de promouvoir des pratiques exemplaires pour le secteur. Cette ligne directrice souligne l’importance des inspections et de l’entretien efficaces des ponceaux, y compris les dangers associés aux digues de castors, aux conditions de niveaux d’eau élevés, à la suffisance des voies d’eau, aux ponceaux obstrués, et aux travaux reportés.

En janvier 2014, TC a émis un Bulletin de la Sécurité ferroviaire intitulé « Ponts et ponceaux – Atténuation des risques durant et après des phénomènes météorologiques violents Note de bas de page 20 ». La préparation de ce bulletin est attribuable à plusieurs conditions dangereuses qui se sont produites à des ponts et à des ponceaux à la suite d’inondations, de fortes précipitations ou d’événements entraînant un débit élevé de l’eau en 2013. Le bulletin fournit des mesures recommandées et des pratiques exemplaires pour corriger ces problèmes.

1.15.2 Enquêtes sur des événements dangereux mettant en cause des employés à bord des trains

Emploi et Développement social Canada (EDSC) a conclu un protocole d’entente avec TC. En vertu de ce protocole, il incombe à la Direction générale de la sécurité ferroviaire de TC d’enquêter sur les événements dangereux dans le secteur ferroviaire qui mettent en cause des employés à bord, conformément à la mise en œuvre et à la mise en application de la partie II du CCT.

Étant donné qu’un employé a été grièvement blessé et qu’un autre a été mortellement blessé dans l’accident à l’étude, TC a mené, au nom d’EDSC, une enquête parallèle à celle du BST.

1.15.3 Règlement sur la santé et la sécurité au travail (trains)

Conformément au CCT, le Règlement sur la santé et la sécurité au travail (trains) (DORS/87-184) a été approuvé par le ministre du Travail et est entré en vigueur le 2 avril 1987.

La partie XIII de ce règlement porte sur la « Sécurité des employés séjournant dans le lieu de travail » et établit (en partie) :

Procédures d’urgence

  1. 13.7 (1) Après avoir consulté le comité local ou le représentant, l’employeur établit les procédures d’urgence à suivre :
    1. lorsque quiconque commet ou menace de commettre un acte qui peut présenter un risque pour la santé ou la sécurité de l’employeur ou de l’un de ses employés;
    2. dans le cas où il y a risque d’accumulation, de déversement ou de fuite d’une substance dangereuse dans un lieu de travail qui est sous la responsabilité de l’employeur, lorsqu’une telle situation se produit;
    3. lorsqu’un train est impliqué dans un accident;
    4. lorsque le système d’éclairage d’un train subit une panne.
  2. (2) Les procédures d’urgence visées au paragraphe (1) doivent à la fois :
    1. comprendre la description détaillée de la marche à suivre et indiquer les obligations des employés;
    2. préciser l’emplacement de l’équipement d’urgence fourni par l’employeur Note de bas de page 21.

Il n’y a aucun dossier faisant état d’un examen par TC des procédures d’urgence ou du plan d’intervention d’urgence de HBR avant l’accident.

1.15.4 Règlement de 2015 sur le système de gestion de la sécurité ferroviaire

Le 1er avril 2015, le Règlement de 2015 sur le SGS est entré en vigueur et a remplacé le Règlement de 2001 sur le SGS. Bon nombre des modifications contenues dans le Règlement de 2015 sur le SGS découlaient des recommandations issues de l’examen de la Loi sur la sécurité ferroviaire de 2007 et de l’étude de 2008 sur la sécurité ferroviaire du Comité permanent des transports, de l’infrastructure et des collectivités.

Aux termes du Règlement de 2015 sur le SGS, les compagnies de chemin de fer de compétence fédérale doivent élaborer et mettre en œuvre un système de gestion de la sécurité (SGS), créer un index de tous les processus requis, maintenir des dossiers, informer le ministre de tout changement qu’elles se proposent d’apporter à leurs activités, et soumettre au ministre toute la documentation liée à leur SGS, sur demande.

D’après l’article 5 du Règlement de 2015 sur le SGS, une compagnie de chemin de fer doit développer et mettre en œuvre un SGS qui comprend (en partie) :

  1. un processus visant la responsabilité et l’obligation de rendre compte;
  2. un processus à l’égard de la politique de sécurité;
  3. un processus pour veiller au respect des règlements, des règles et des autres instruments;
  4. un processus pour gérer les accidents ferroviaires;
  5. un processus pour cerner les préoccupations en matière de sécurité;
  6. un processus visant les évaluations des risques;
  7. un processus pour mettre en œuvre et évaluer les mesures correctives;
  8. un processus pour établir les objectifs et élaborer des initiatives;
  9. un processus pour signaler les infractions et les dangers pour la sécurité.

Compte tenu des éléments a), c), d) et g), il serait raisonnable d’attendre d’une compagnie de chemin de fer qu’elle dispose d’un plan d’intervention d’urgence qui établit les responsabilités et les processus pour gérer les événements ferroviaires, et pour mettre en œuvre et évaluer les mesures correctives pour ces événements, y compris les déraillements.

1.16 Activités réglementaires de Transports Canada concernant le chemin de fer de la baie d’Hudson depuis juillet 2016

Le 8 juillet 2016, TC a entrepris une inspection en vertu de la Loi sur la sécurité ferroviaire. Un problème de non-conformité a été signalé à HBR, soit le fait que la partie II du CCT n’était pas affichée et que les règlements d’application du CCT n’étaient pas facilement accessibles. HBR a signé une promesse de conformité volontaire d’afficher l’information dans les 14 jours, et le dossier a été clos.

TC a aussi fait des inspections de santé et de sécurité au travail le 22 août 2016, le 12 septembre 2017, le 11 octobre 2017 et le 12 octobre 2017. Aucune infraction n’a été relevée.

Du 22 août 2016 au 31 mai 2018, TC a mené 4 inspections d’équipement mécanique à HBR, à The Pas. Chaque inspection a cerné des non-conformités relativement à de l’équipement de wagon de marchandises et de locomotive. Des lettres de non-conformité ont été envoyées à HBR pour expliquer la nature de l’entretien requis. Dans chaque cas, HBR a effectué l’entretien requis, mesure qui a résolu les problèmes de non-conformité mécanique.

En novembre 2016, TC a entrepris une vérification de 4 jours du SGS de HBR par rapport aux alinéas 5a) à 5i) du Règlement de 2015 sur le SGS. Cette vérification a relevé 1 non-conformité et 4 lacunes relativement aux processus de HBR. La non-conformité et les lacunes ont révélé que l’on ne respectait pas les processus de signalement de HBR et que la compagnie ne collaborait pas entièrement avec ses employés pour cerner les dangers pour la sécurité. La non-conformité et les lacunes ont par la suite été corrigées, ce qui a conclu la vérification.

Du 13 au 16 juin 2017, des inspecteurs de la voie de TC ont fait un examen de l’entretien de la voie sur la subdivision de Wekusko. Cette démarche comprenait un examen de la documentation de HBR pour la période du 14 mai 2017 au 10 juin 2017, qui comprenait tout l’entretien connexe effectué sur la subdivision, ainsi qu’une inspection visuelle et une inspection de l’état géométrique de la voie au moyen du véhicule d’évaluation de la voie de TC. Cette inspection a révélé plusieurs défauts du nivellement transversal, mais aucun d’entre eux ne dépassait le maximum permis pour une voie de catégorie 3. L’inspection a également relevé plusieurs endroits avec des problèmes liés aux digues de castors et à la gestion des eaux, mais aucun de ces endroits ne se trouvait à proximité du lieu du déraillement.

Le 18 juin 2017, TC a émis une lettre de non-conformité signalant une préoccupation relativement aux enjeux cernés durant l’inspection de la voie.

Le 7 juillet 2017, HBR a répondu à TC pour indiquer qu’il avait pris des mesures correctives pour régler les problèmes cernés durant l’inspection. TC a par la suite envoyé une lettre sur le caractère adéquat des mesures prises, et le dossier a été clos.

Le 11 octobre 2017, une inspection de l’exploitation a eu lieu durant laquelle TC a surveillé une équipe de train. Une autorisation écrite n’a pas été copiée ou transmise, ce qui a entraîné l’envoi d’une lettre de non-conformité. Cette lettre n’a fait l’objet d’aucun suivi.

D’autres inspections de l’exploitation ont été menées le 5 juillet 2017, et les 10 et 12 octobre 2017, sans que celles-ci relèvent de non-conformité.

TC n’a fait aucune autre inspection ni vérification à HBR avant l’accident.

1.17 Événements antérieurs mettant en cause un affaissement de la couche supérieure de plateforme

Depuis 1992, le BST a enquêté sur 10 autres déraillements mettant en cause un affaissement de la couche supérieure de plateforme, dont certains ont causé des pertes de vie et des blessures graves à des membres de l’équipe de train. Dans 4 événements, l’affaissement de la couche supérieure de plateforme a été causé par des quantités d’eau excessives à la suite de ruptures de digues de castors (annexe A). Dans les 6 autres événements, l’affaissement de la couche supérieure de plateforme était attribuable à la saturation en eau et à l’accumulation d’une pression d’eau interstitielle excessive dans les matériaux de remblayage hydrosensibles à la suite de précipitations records ou à l’obstruction ou à la défaillance de systèmes de drainage des eaux (annexe B).

La présence de dépôts hydrosensibles dans la couche supérieure de plateforme de la voie ferrée est attribuable aux limites dans les capacités de construction et la compréhension des caractéristiques des sols à l’époque où les couches supérieures de plateforme ont été construites (autour de 1900). À l’époque, la capacité de compactage de la couche supérieure de plateforme était limitée, et on ne comprenait pas toute l’importance de cette action.

De nombreuses sections des chemins de fer canadiens construites sur des remblais exposés à des épisodes hydrodynamiques inhabituels – que ce soit en raison de fortes précipitations, de la fonte rapide de l’épaisse couche de neige, d’une accumulation naturelle excessive d’eaux dans un bassin versant, d’un dérèglement du système de drainage et d’une accumulation d’eau connexe, par exemple, à une digue de castors ou à un ponceau obstrué – pourraient représenter un risque pour la sécurité.

1.18 Enquêtes antérieures mettant en cause des zones exemptes de signalisation où un retard à informer le contrôleur de la circulation ferroviaire a nui à l’intervention d’urgence

Depuis 1995, le BST a enquêté sur 2 autres déraillements en voie principale qui se sont produits dans une zone exempte de signalisation et où des retards dans la communication des incidents au CCF ont nui à l’intervention d’urgence.

R03V0083 – Le 14 mai 2003, vers 12 h 10, heure avancée du Pacifique, pendant que le train de marchandises no 356-51-14 du CN roulait vers l’est à destination d’Edmonton (Alberta) en provenance de Prince George (Colombie-Britannique), 2 locomotives et 5 wagons chargés de bois d’œuvre ont déraillé sur un pont, au point milliaire 7,9 de la subdivision de Fraser, près de McBride (Colombie-Britannique). Les 2 membres de l’équipe ont été mortellement blessés. Le mouvement des trains dans la subdivision de Fraser est assujetti aux règles de la ROV, comme l’autorise le REF, et est surveillé par un CCF en poste à Edmonton. Le CCF était sans nouvelles de l’équipe depuis environ 11 h 40. Il a essayé de communiquer avec le train à 12 reprises entre 13 h 23 et 13 h 35, mais n’a reçu aucune réponse. À 13 h 54, du personnel du CN a été dépêché sur les lieux en véhicule routier à la recherche du train. L’enquête a permis de déterminer que

[s]i le territoire avait disposé d’un système permettant de communiquer fréquemment la position du train, comme le système mondial de localisation [GPS], ou s’il y avait eu des appels fréquents entre le contrôleur de la circulation ferroviaire et le train, il aurait été possible de connaître la position et l’état du train plus tôt, et d’intervenir plus rapidement.

R95V0017 – Le 20 janvier 1995, vers 7 h 21, heure normale du Pacifique, le train de marchandises no 981-20 du CP, qui comprenait 3 locomotives, 27 wagons chargés et 22 wagons vides et se dirigeait vers l’ouest, est arrivé à la courbe de 10 degrés vers la gauche du point milliaire 111,0 de la subdivision de Nelson. Le train roulait à environ 25 mi/h lorsqu’un freinage d’urgence s’est produit. Le train a ensuite parcouru quelque 322 pieds avant de heurter un éboulis de roches sur la voie. Les 3 locomotives et les 2 premiers wagons ont déraillé et ont plongé dans les eaux du lac Kootenay du haut d’une falaise de 125 pieds. Le mécanicien de locomotive et un mécanicien en formation se sont noyés. Le chef de train a été légèrement blessé. Le mouvement des trains dans la subdivision était assujetti aux règles de ROV et surveillé par un CCF en poste à Revelstoke (Colombie-Britannique). L’enquête avait permis de constater que

[c]omme il n’a pas de radio, [le chef de train] se met à courir vers l’ouest sur la voie ferrée où il rencontre une équipe d’entretien de la voie au point milliaire 114,0 [à 3 milles du lieu de l’accident]. On signale aussitôt l’accident au contrôleur de la circulation ferroviaire (CCF) et [on fait appel] au Service d’intervention d’urgence.

1.19 Liste de surveillance du BST

La Liste de surveillance du BST énumère les principaux enjeux de sécurité qu’il faut s’employer à régler pour rendre le système de transport canadien encore plus sûr.

MESURES À PRENDRE

La gestion de la sécurité et surveillance restera sur la Liste de surveillance jusqu’à ce que :

  • Les transporteurs qui ont un SGS démontrent à Transports Canada qu’il fonctionne bien et donc permet de déceler les risques et de mettre en œuvre des mesures efficaces pour les atténuer.
  • Transports Canada exerce ses responsabilités lorsque des exploitants ne peuvent pas assurer une gestion efficace de la sécurité de façon à ce qu’ils corrigent les pratiques d’exploitation non sécuritaires.

La gestion de la sécurité et surveillance figure sur la Liste de surveillance 2018. Tous les transporteurs sont responsables de gérer les risques de sécurité dans leurs activités d’exploitation.

Certaines entreprises estiment que le niveau de sécurité est adéquat tant qu’elles se conforment à la réglementation; or, cette dernière ne peut à elle seule prévoir tous les risques propres à une activité. C’est pourquoi le BST a maintes fois souligné les avantages d’un SGS, un cadre de gestion qui est reconnu à l’échelle internationale et permet aux entreprises de gérer efficacement les risques et d’améliorer la sécurité de leurs activités.

Dans l’événement à l’étude, le plan d’intervention d’urgence de la compagnie de chemin de fer, qui n’avait pas fait l’objet d’un examen par l’organisme de réglementation, ne comprenait ni procédure ni processus détaillé pour intervenir en cas de déraillement. En outre, le personnel de supervision de la compagnie n’avait reçu aucune formation sur les opérations d’intervention.

2.0 Analyse

Le train était exploité conformément aux exigences de l’entreprise et de la réglementation. Ni l’état mécanique des locomotives ni celui du matériel roulant n’a été un facteur contributif dans l’événement à l’étude. L’analyse portera principalement sur le drainage et la gestion des populations de castors, sur l’entretien, l’inspection et les patrouilles de la voie, et sur l’intervention d’urgence et la surveillance réglementaire.

2.1 L’accident

À 16 h 32 le 15 septembre 2018, le train circulait vers le nord à 25 mi/h sur un tronçon élevé de la voie, au point milliaire 99,59. Les membres de l’équipe de train ont remarqué ce qui semblait être un vide dans la surface de la plateforme devant eux. Les rails et traverses semblaient bien être en place, mais en réalité ils étaient suspendus au-dessus d’un espace vide d’une longueur d’environ 50 pieds et d’une profondeur d’environ 15 pieds causé par un emportement par les eaux. L’équipe de train n’a pas déclenché de freinage d’urgence avant de s’engager dans l’espace, action qui aurait pu réduire la gravité de l’impact.

Le train a circulé sur le segment de voie suspendu, qui s’est effondré sous le poids du train. L’avant de la locomotive de tête a chuté de quelque 12 pieds sous les rails et a percuté le côté opposé de l’espace vide créé par l’emportement des eaux. Par la suite, les 2 autres locomotives, 2 wagons-tombereaux pneumatiques à ballast vides et 2 wagons-citernes chargés de gaz de pétrole liquéfiés (GPL) ont déraillé.

L’impact a lourdement endommagé la locomotive de tête – le poids et le moment du train ont poussé le matériel vers l’avant jusqu’à ce qu’il s’immobilise abruptement au bout d’un peu plus de 400 pieds. La locomotive de tête penchait sur un côté et était pliée en « portefeuille » à un angle approximatif de 45 degrés en son centre. La génératrice principale et l’armoire électrique ont été poussées vers l’avant pour emboutir la cabine de la locomotive et y coincer les membres de l’équipe de train, qui ont tous 2 été grièvement blessés. Le chef de train est mort des suites de ses blessures avant que les secouristes puissent le dégager.

Ce déraillement s’est produit lorsque le train a franchi un segment de voie qui n’était plus supporté à la suite d’un emportement par les eaux et d’un affaissement de la couche supérieure de plateforme qui étaient survenus au point milliaire 99,59 avant le passage du train.

2.2 Affaissement de la couche supérieure de plateforme et emportement par les eaux

Au cours des semaines qui ont précédé le déraillement, le personnel d’ingénierie du chemin de fer de la baie d’Hudson (HBR) avait surveillé les niveaux d’eau élevés à plusieurs endroits le long de la subdivision de Wekusko. Durant la semaine avant le déraillement, le secteur dans les environs du lieu du déraillement avait été inspecté à 3 reprises. Lors de ces inspections, le niveau d’eau aux ponceaux du point milliaire 99,59 était parfois au-dessus, parfois en dessous de la partie supérieure des ponceaux.

La dernière inspection du niveau d’eau au point milliaire 99,59 a été menée 2 jours avant le déraillement. On a noté le fait que le niveau d’eau avait diminué de 1 pied par rapport à celui de la veille, que l’eau s’écoulait par le ponceau à ce moment, et que les travaux prévus de soulèvement et de nivellement de la voie avaient été achevés. Aucune autre mesure n’a été jugée nécessaire pour protéger la voie avant le passage des prochains trains prévus.

À un certain moment entre la dernière inspection et le passage du train 2 jours plus tard, des niveaux d’eau élevés le long de l’emprise ont dépassé le haut des ponceaux. L’eau s’est infiltrée dans la plateforme saturée, et a déplacé et détruit les ponceaux à dalot en bois. Durant l’emportement par les eaux, la force du courant a emporté le bois d’œuvre des ponceaux jusqu’à 1000 pieds en aval de leur emplacement de départ. Des indications sur les lieux laissaient croire que le niveau d’eau avait été au moins 12 pieds au-dessus du lit du cours d’eau après l’emportement. L’emportement par les eaux et l’affaissement de la couche supérieure de plateforme ont été causés par la saturation en eau et un accroissement de la pression d’eau interstitielle dans le sable de remblayage hydrosensible, attribuables aux niveaux d’eau élevés qui s’étaient accumulés en bordure de la voie.

2.3 Patrouilles et inspections de la voie

Les inspecteurs et superviseurs de la voie de HBR n’étaient pas au courant de la susceptibilité de cet endroit à la saturation en eau, de l’ampleur et des conséquences potentielles de la formation inégale de bassins contre la plateforme, et en quoi celles-ci pourraient compromettre la stabilité des sols. Avant le déraillement, HBR, exploité par OmniTRAX, n’avait donné aucune formation géotechnique à ses inspecteurs de la voie ni à ses superviseurs de la voie, et ces employés n’avaient reçu aucune formation de la sorte avant l’acquisition de HBR par OmniTRAX, en 1997.

Bien que les inspections de la voie requises aient eu lieu et que les ponceaux aient été dégagés, les inspecteurs de la voie de HBR ne comprenaient pas pleinement le danger lié à la formation inégale de bassins contre la plateforme.

2.4 Gestion de l’évacuation des eaux

Comme c’est le cas pour de nombreux tronçons de voie des chemins de fer canadiens, certains tronçons du réseau ferroviaire de HBR sont construits sur des remblais dans des endroits qui sont parfois exposés à des épisodes hydrodynamiques inhabituels qui peuvent entraîner un emportement par les eaux. Ces épisodes hydrodynamiques comprennent

2.4.1 Précipitations

Dans les environs du lieu du déraillement, la moyenne historique des précipitations en été était de 237,0 mm. Or, les précipitations au cours de l’été 2018 dans cette région ont atteint 380,8 mm, soit une hausse de 60 % comparativement à la moyenne historique. Les fortes précipitations de cet été-là (supérieures d’environ 60 % à la norme historique) ont contribué à l’accumulation d’eau immédiatement à l’est et en bordure de la plateforme élevée au point milliaire 99,59.

2.4.2 Programme de gestion des populations de castors

La voie ferrée de HBR traverse de vastes régions de forêt boréale et de terres humides qui abritent une importante population de castors. Avant et après la vente de HBR à OmniTRAX en 1997, un entrepreneur agréé spécialisé en gestion des populations de castors a été embauché pour gérer les populations de castors et enlever leurs digues afin de mieux gérer l’évacuation des eaux.

En 2014, les volumes de trafic ferroviaire étaient en baisse, et OmniTRAX envisageait de vendre le chemin de fer. OmniTRAX a commencé à diminuer ses investissements en capitaux dans le chemin de fer HBR. Cette mesure comprenait une réduction du personnel d’entretien et des investissements dans les projets d’amélioration de la voie.

En 2015, alors que les volumes de trafic de HBR et les activités d’entretien de l’infrastructure continuaient de diminuer, OmniTRAX a amorcé le processus de vente du chemin de fer et du port de Churchill. Le spécialiste en gestion des populations de castors a enregistré l’enlèvement de 813 digues de castors cette année-là.

En 2016, HBR a commencé à faire appel à un entrepreneur en explosifs et à son personnel de la voie pour enlever les digues de castors.

À l’automne 2017, HBR a cessé d’utiliser les services de l’entrepreneur en explosifs, probablement afin de réduire les coûts, sans toutefois se doter d’une stratégie de rechange viable pour gérer les populations de castors. Toute autre élimination de digues de castors par HBR à compter de l’été 2017 a été l’œuvre des équipes de travaux, quand ces digues étaient accessibles à partir de la voie.

En août 2018, un entrepreneur, embauché avant la vente de HBR, a enlevé 41 digues en 4 jours.

Il y avait une importante activité des castors en amont et dans les environs du lieu du déraillement. En amont et à l’est de la voie ferrée, plusieurs digues de castors avaient cédé, probablement à cause des précipitations plus fortes cet été-là. Ces ruptures ont accru davantage le volume et l’écoulement d’eau qui s’accumulait juste à l’est et immédiatement en bordure de la plateforme, au point milliaire 99,59. Cette accumulation additionnelle d’eau a accru la pression hydrostatique sur le remblai de sable élevé de la couche supérieure de plateforme et a contribué à son affaissement. Ainsi, la réduction du programme de gestion des populations de castors de HBR a accru la vulnérabilité de l’infrastructure à un emportement par les eaux, surtout si une digue de castors devait céder.

2.4.3 Réduction de l’entretien de l’infrastructure de la voie

Le printemps 2017 a été marqué par de fortes inondations qui ont causé au total 23 emportements par les eaux et gravement endommagé la voie entre Gillam et Churchill (Manitoba), ce qui a entraîné à toutes fins pratiques la fermeture de ce tronçon de la voie ferrée de HBR. Par la suite, OmniTRAX n’a consenti aucun investissement important en capitaux dans HBR, malgré la nécessité des travaux à plusieurs endroits. Le lieu du déraillement était l’un de ces endroits. Le personnel d’ingénierie de HBR avait constaté la détérioration des ponceaux à dalot en bois au point milliaire 99,59 et la nécessité de les remplacer. Or, le remplacement de ponceaux n’est pas en soi une exigence réglementaire spécifique, et l’accident s’est produit avant l’exécution de ces travaux.

Dans les environs du lieu du déraillement, il avait plu abondamment durant tout l’été. Plusieurs digues de castors ayant cédé ont également contribué au niveau d’eau élevé.

L’accumulation d’eau à la suite de fortes précipitations durant l’été combinée aux digues de castors ayant cédé en amont ont entraîné la formation d’un important bassin d’eau en bordure de la voie. Si les compagnies de chemin de fer ne surveillent pas et n’entretiennent pas en temps opportun leurs systèmes de drainage, il pourrait y avoir détérioration et défaillance des composants de ces systèmes, ce qui accroît le risque qu’un affaissement de la couche supérieure de plateforme mène à un déraillement.

2.5 Intervention en cas d’urgence

Le déraillement s’est produit à 16 h 32 le 15 septembre 2018, dans une région éloignée du nord du Manitoba. L’équipage de conduite d’un hélicoptère privé qui survolait l’emplacement a d’abord remarqué le train déraillé à 17 h 15. Après avoir posé l’hélicoptère sur les lieux de l’accident, l’équipage de conduite a composé le 911 et la Gendarmerie royale du Canada (GRC). Les services d’incendie et d’intervention d’urgence de Thompson (TFES) et HBR ont été avisés par la suite, et ils ont pris des dispositions pour se rendre sur les lieux de l’accident. À 18 h 55, des agents de la GRC sont arrivés sur les lieux de l’accident en hélicoptère. À 23 h 45, une équipe des services médicaux d’urgence (SMU) (des services TFES) est arrivée sur les lieux de l’accident par rail à bord d’un véhicule rail-route de HBR.

À 0 h 53 le 16 septembre, malgré les efforts considérables de l’équipe des SMU pour dégager le chef de train, celui-ci est mort des suites de ses blessures. On a finalement dégagé le mécanicien de locomotive à 2 h 30, et on l’a transporté par véhicule rail-route jusqu’à la zone de rassemblement, puis à l’hôpital en hélicoptère.

Dans l’événement à l’étude, les intervenants d’urgence ont dû relever bon nombre de défis logistiques, d’abord pour se rendre sur les lieux de l’accident, puis une fois rendus sur place.

Les défis logistiques pour se rendre sur les lieux de l’accident étaient, entre autres :

Les autres défis sur les lieux de l’accident étaient, entre autres :

Dans l’événement à l’étude, plusieurs circonstances difficiles ont retardé l’accès au lieu de l’accident et ont compliqué l’intervention d’urgence. L’accès au lieu de l’accident a été retardé en raison de son emplacement isolé et du relief accidenté; de plus, le rejet de carburant diesel, le rejet possible de GPL et la nécessité de faire une évaluation des matières dangereuses pour s’assurer que les niveaux étaient acceptables ont tous contribué à prolonger le temps requis pour l’intervention.

2.6 Plan d’intervention d’urgence et formation

Quand on doit intervenir dans une situation d’urgence, les pratiques exemplaires du secteur sont fondées sur la mise en place d’une structure officielle de commandement en cas d’incident pour gérer l’intervention. Quand plusieurs organismes interviennent, chacun établit son propre poste de commandement, puis travaille de concert avec les autres sous la direction d’une structure de commandement unifiée intégrée.

Par poste de commandement en cas d’incident, on entend un système de gestion des interventions qui permet d’organiser les gens, l’équipement et les ressources afin d’intervenir dans toutes les situations d’urgence. Au Canada, lorsqu’on établit un poste de commandement en cas d’incident qui comprend un incendie ou met en cause des matières dangereuses, on reconnaît souvent le chef des pompiers local ou un représentant provincial comme l’autorité compétente, et cette personne agit à titre de responsable des opérations d’intervention.

Dans le cas d’un accident ferroviaire, comme un déraillement mettant en cause des marchandises dangereuses (MD) ou ayant causé la mort d’employés, la compagnie de chemin de fer met habituellement en œuvre son plan d’intervention d’urgence, puis collabore avec d’autres organismes sous la direction d’une structure de commandement unifiée.

Habituellement, les compagnies de chemin de fer interviennent immédiatement en faisant appel à tout leur personnel et équipement mécanique et d’ingénierie, et au personnel et à l’équipement pour les matières dangereuses, avant de diminuer leur intervention par la suite, s’il y a lieu. Dans de telles circonstances, les compagnies de chemin de fer assument habituellement le commandement, parfois pendant même que leurs ressources sont en route vers le lieu d’un accident, et établissent une structure de commandement en cas d’incident et une zone de rassemblement pour entreprendre les travaux. Le personnel ferroviaire est habituellement formé et préparé pour intervenir dans un large éventail de conditions.

2.6.1 Services d’incendie et d’intervention d’urgence de Thompson

Lorsque le personnel des services TFES est arrivé à Ponton (Manitoba), le capitaine, qui avait reçu une formation complète en matière de structure de commandement en cas d’incident, a pris le commandement de l’intervention. On a établi une zone de rassemblement et un poste de commandement dans une gravière près du passage à niveau de la route provinciale 6. C’était la première fois que les services TFES devaient gérer un accident ferroviaire de cette envergure.

Le personnel des services TFES reçoit la formation sur la norme NFPA 472: Standard for Competence of Responders to Hazardous Materials/Weapons of Mass Destruction Incidents de la National Fire Protection Association (NFPA), la norme qu’utilisent les organismes d’intervention partout en Amérique du Nord. La NFPA 472 stipule le niveau minimal de compétences requis du personnel d’intervention d’urgence lorsque des matières dangereuses sont en cause. Les compétences que doivent avoir les responsables des opérations d’intervention comprennent la capacité :

  1. d’analyser un incident mettant en cause des matières dangereuses ou des armes de destruction massive pour déterminer la complexité du problème et son dénouement potentiel;
  2. de planifier une intervention en fonction des capacités du personnel disponible;
  3. de mettre en œuvre l’intervention planifiée conformément aux procédures d’exploitation courantes et au plan de sécurité et de gestion du lieu de l’intervention;
  4. d’évaluer la progression de l’intervention planifiée et modifier le plan, au besoin;
  5. de clore l’incident en contribuant à une réunion-bilan et à la critique d’incident.

Outre la NFPA 472, le personnel des services TFES est formé pour consulter le Guide des mesures d’urgence, qui indique les dangers potentiels des incidents de transport mettant en cause des MD, comme des gaz inflammables.

2.6.2 Chemin de fer de la baie d’Hudson

Dès qu’il a été informé de l’accident, HBR a mis en alerte son camion rail-route de réparation ainsi que du personnel ayant reçu de la formation sur les matières dangereuses, et a dépêché 2 superviseurs sur les lieux. À 21 h 20, le personnel de HBR est arrivé à la zone de rassemblement à Ponton. Même si les services TFES avaient déjà établi une structure de commandement en cas d’incident, HBR n’a établi aucun poste de commandement officiel pour gérer ses activités d’intervention d’urgence. Le personnel de HBR qui a été dépêché sur les lieux n’avait qu’une expérience limitée de l’intervention dans un accident de cette ampleur. De plus, il n’avait reçu aucune formation officielle en intervention d’urgence ou sur l’établissement d’une structure de commandement en cas d’incident.

Même si le plan d’intervention d’urgence de HBR comprenait des directives pour des types précis de menaces ou d’événements, il n’y en avait aucune pour une intervention d’urgence en cas de déraillement outre une structure hiérarchique et un message général sur la sécurité. Rien n’indiquait que HBR avait fait des exercices d’intervention d’urgence ou des examens d’interventions réelles. Ainsi, le personnel de HBR n’avait pas été adéquatement formé pour intervenir dans des déraillements importants ayant causé des blessures ou la mort à des voyageurs ou à des employés, ou mettant en cause des MD.

Si les compagnies de chemin de fer ne mettent pas en œuvre un solide plan d’intervention d’urgence pour intervenir en cas de déraillements importants, y compris de la formation à l’intention du personnel ferroviaire, l’intervention des compagnies en cas d’événements de la sorte pourrait être incohérente et inefficace, ce qui accroît le risque de conséquences négatives additionnelles.

2.6.3 Aide de civils

L’équipage de conduite de l’hélicoptère et les arpenteurs, qui ont été les premiers à voir le déraillement et à venir en aide aux membres blessés de l’équipe de train, ont travaillé dans des circonstances difficiles et ont joué un rôle important en alertant les autorités, en offrant de l’aide et du réconfort aux membres de l’équipe de train qui étaient coincés, et en appuyant l’intervention initiale de la GRC.

2.7 Risques liés à l’exploitation ferroviaire dans des zones exemptes de signalisation

Depuis 1995, le BST a enquêté sur 2 autres déraillements en voie principale qui se sont produits dans des zones exemptes de signalisation et où des retards dans la communication des incidents au contrôleur de la circulation ferroviaire (CCF) ont nui à l’intervention d’urgence.

L’enquête du BST sur le déraillement en voie principale survenu près de McBride (Colombie-Britannique), en mai 2003 Note de bas de page 22, a permis de constater que

[s]i le territoire avait disposé d’un système permettant de communiquer fréquemment la position du train, comme le système mondial de localisation [GPS], ou s’il y avait eu des appels fréquents entre le contrôleur de la circulation ferroviaire et le train, il aurait été possible de connaître la position et l’état du train plus tôt, et d’intervenir plus rapidement.

Dans le cas de l’événement à l’étude, la subdivision de Wekusko est une voie à faible densité de circulation, avec en moyenne 1 train par jour. La méthode de commande des trains se fait par la régulation de l’occupation de la voie; ainsi, les trains circulent dans une zone exempte de signalisation sans l’aide de signalisation en voie pour guider les équipes de train. Une grande partie de la subdivision est isolée, et la couverture cellulaire est limitée.

Dans une zone exempte de signalisation, les équipes de train communiquent par radio avec un CCF, qui leur transmet des autorisations pour faciliter le mouvement des trains. Il incombe au CCF de coordonner les mouvements de trains et d’assurer une distance sécuritaire entre eux.

Dans certains cas, les trains reçoivent des autorisations pour la subdivision au complet; ils traversent le secteur sans croiser un seul autre train ou du personnel de la voie. Même si les équipes de train maintiennent la communication radio avec le CCF, celui-ci n’a aucune façon de détecter où se trouve le train sur la subdivision ou ce qui se passe sur la voie. Au moment du déraillement, il n’y avait aucune directive précise de la compagnie selon laquelle une équipe de train ou le personnel d’entretien de la voie doit rendre compte de sa position par radio à des intervalles établis, et il n’existait aucune exigence réglementaire à cet effet.

Dans l’événement à l’étude, c’est le pilote d’un hélicoptère civil qui survolait le secteur qui a vu le déraillement et communiqué avec la GRC pour lancer l’intervention. Si le pilote n’avait pas remarqué le déraillement et ne s’y était pas rendu pour venir en aide, le déraillement aurait pu passer inaperçu, sans aucun secours, pendant plusieurs heures de plus.

Si l’on utilise la régulation de l’occupation de la voie comme méthode de commande des trains en régions éloignées et s’il n’y a aucune directive précise de la compagnie pour que le personnel rende compte de sa position en route au CCF, il y a un risque accru que l’on mette du temps à détecter les situations d’urgence, dont les déraillements, et plus particulièrement si le personnel est dans l’incapacité de réagir.

2.8 Surveillance par Transports Canada du chemin de fer de la baie d’Hudson

2.8.1 Règles et règlements ferroviaires

Depuis 2016, Transports Canada (TC) a mené plusieurs activités d’application des règlements pour surveiller la conformité de HBR à la réglementation. Ces activités de TC comprenaient la surveillance et l’examen du programme de santé et sécurité au travail de HBR, des inspections de l’équipement mécanique, le système de gestion de la sécurité (SGS), des inspections de la voie, et la conformité des opérations et aux règles.

Chaque fois que TC a cerné des non-conformités dans chacun de ces domaines, il a envoyé une lettre de non-conformité à la compagnie. HBR a répondu à ces lettres en fournissant des renseignements sur ses mesures correctives. Dans chaque cas, après avoir examiné la réponse de HBR, TC a indiqué que la mesure corrective en question était suffisante. Étant donné l’ampleur de ces activités, TC effectuait régulièrement des inspections réglementaires pour s’assurer que HBR se conformait aux règles et règlements.

2.8.2 Plans d’intervention d’urgence

Habituellement, les chemins de fer font immédiatement appel à toutes les ressources disponibles pour intervenir après un déraillement mettant en cause des MD ou ayant causé la mort d’employés. Toutefois, l’ampleur de l’intervention peut varier entre les grandes compagnies de chemin de fer (la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada [CN] et le Chemin de fer Canadien Pacifique [CP]) et les chemins de fer d’intérêt local (comme HBR), étant donné les ressources dont ils disposent et le caractère parfois isolé des régions où certains chemins de fer d’intérêt local mènent leurs activités. Dans ces cas, un plan d’intervention d’urgence efficace qui couvre toutes les situations est un élément important du bon déroulement d’une intervention d’urgence.

Le Règlement sur la santé et la sécurité au travail (trains) stipule que les compagnies de chemin de fer doivent avoir un plan d’intervention d’urgence en place. HBR avait bel et bien un plan d’intervention d’urgence, mais il ne contenait aucune directive sur une intervention en cas de déraillement de train. Rien n’indiquait que HBR avait fait des exercices d’intervention d’urgence ou des examens d’interventions réelles auxquels auraient pris part plusieurs organismes, ce qui laisse également croire que la formation donnée par HBR ne comprenait pas la possibilité d’un important déraillement. Ces facteurs ont eux aussi joué un rôle dans le retard de l’intervention d’urgence.

En outre, aux termes du Règlement de 2015 sur le système de gestion de la sécurité ferroviaire, il serait raisonnable d’attendre d’une compagnie de chemin de fer qu’elle ait un plan d’intervention d’urgence qui établit les responsabilités et les processus pour gérer les événements ferroviaires, se conformer aux règlements ainsi que mettre en œuvre et évaluer les mesures correctives pour ces événements, y compris les déraillements. Un tel plan serait tout particulièrement nécessaire en cas de déraillement dans une région éloignée ayant causé des blessures ou la mort d’employés ou de voyageurs, ou mettant en cause des MD.

Toutefois, en l’absence d’une surveillance proactive du plan d’intervention d’urgence de HBR par TC, les lacunes de ce plan relatives à la gestion des déraillements et à l’établissement d’une structure de commandement en cas d’incident sont passées inaperçues et n’ont pas été corrigées. Un examen par TC du plan d’intervention d’urgence de HBR aurait pu permettre d’en cerner les lacunes, et aurait pu être l’occasion pour la compagnie de l’améliorer.

Si le plan d’intervention d’urgence d’une compagnie de chemin de fer, en particulier un chemin de fer d’intérêt local, ne fait pas l’objet d’une surveillance réglementaire, des lacunes potentielles dans ce plan pourraient passer inaperçues et ne pas être corrigées, ce qui accroît le risque d’une intervention inadéquate en cas d’urgence.

3.0 Faits établis

3.1 Faits établis quant aux causes et aux facteurs contributifs

Il s’agit des conditions, actes ou lacunes de sécurité qui ont causé l’événement ou y ont contribué.

  1. Le déraillement s’est produit lorsque le train a franchi un segment de voie qui n’était plus supporté à la suite d’un emportement par les eaux et d’un affaissement de la couche supérieure de plateforme qui étaient survenus au point milliaire 99,59 avant le passage du train.
  2. L’emportement par les eaux et l’affaissement de la couche supérieure de plateforme ont été causés par la saturation en eau et un accroissement de la pression d’eau interstitielle dans le sable de remblayage hydrosensible, attribuables aux niveaux d’eau élevés qui s’étaient accumulés en bordure de la voie.
  3. Bien que les inspections de la voie requises aient eu lieu et que les ponceaux aient été dégagés, les inspecteurs de la voie du chemin de fer de la baie d’Hudson ne comprenaient pas pleinement le danger lié à la formation inégale de bassins contre la plateforme.
  4. Les fortes précipitations de cet été-là (supérieures d’environ 60 % à la norme historique) ont contribué à l’accumulation d’eau immédiatement à l’est et en bordure de la plateforme élevée au point milliaire 99,59.
  5. La réduction du programme de gestion des populations de castors du chemin de fer de la baie d’Hudson a accru la vulnérabilité de l’infrastructure à un emportement par les eaux, surtout si une digue de castors devait céder.
  6. L’accès au lieu de l’accident a été retardé en raison de son emplacement isolé et du relief accidenté; de plus, le rejet de carburant diesel, le rejet possible de gaz de pétrole liquéfié et la nécessité de faire une évaluation des matières dangereuses pour s’assurer que les niveaux étaient acceptables ont tous contribué à prolonger le temps requis pour l’intervention.
  7. En l’absence d’une surveillance proactive du plan d’intervention d’urgence du chemin de fer de la baie d’Hudson par Transports Canada, les lacunes de ce plan relatives à la gestion des déraillements et à l’établissement d’une structure de commandement en cas d’incident sont passées inaperçues et n’ont pas été corrigées.

3.2 Faits établis quant aux risques

Il s’agit des conditions, des actes dangereux, ou des lacunes de sécurité qui n’ont pas été un facteur dans cet événement, mais qui pourraient avoir des conséquences néfastes lors de futurs événements. 

  1. Si les compagnies de chemin de fer ne surveillent pas et n’entretiennent pas en temps opportun leurs systèmes de drainage, il pourrait y avoir détérioration et défaillance des composants de ces systèmes, ce qui accroît le risque qu’un affaissement de la couche supérieure de plateforme mène à un déraillement.
  2. Si les compagnies de chemin de fer ne mettent pas en œuvre un solide plan d’intervention d’urgence pour intervenir en cas de déraillements importants, y compris de la formation à l’intention du personnel ferroviaire, l’intervention des compagnies en cas d’événements de la sorte pourrait être incohérente et inefficace, ce qui accroît le risque de conséquences négatives additionnelles.
  3. Si l’on utilise la régulation de l’occupation de la voie comme méthode de commande des trains en régions éloignées et s’il n’y a aucune directive précise de la compagnie pour que le personnel rende compte de sa position en route au contrôleur de la circulation ferroviaire, il y a un risque accru que l’on mette du temps à détecter les situations d’urgence, dont les déraillements, et plus particulièrement si le personnel est dans l’incapacité de réagir.
  4. Si le plan d’intervention d’urgence d’une compagnie de chemin de fer, en particulier un chemin de fer d’intérêt local, ne fait pas l’objet d’une surveillance réglementaire, des lacunes potentielles dans ce plan pourraient passer inaperçues et ne pas être corrigées, ce qui accroît le risque d’une intervention inadéquate en cas d’urgence.

3.3 Autres faits établis

Ces éléments pourraient permettre d’améliorer la sécurité, de régler une controverse ou de fournir un point de données pour de futures études sur la sécurité.

  1. Le personnel d’ingénierie du chemin de fer de la baie d’Hudson avait constaté la détérioration des ponceaux à dalot en bois au point milliaire 99,59 et la nécessité de les remplacer. Or, le remplacement de ponceaux n’est pas en soi une exigence réglementaire spécifique, et l’accident s’est produit avant l’exécution de ces travaux.
  2. L’équipement que l’on a d’abord utilisé pour dégager les membres de l’équipe de train coincés dans la cabine de la locomotive était d’une efficacité limitée pour couper l’acier épais de la locomotive.
  3. L’équipage de conduite de l’hélicoptère et les arpenteurs, qui ont été les premiers à voir le déraillement et à venir en aide aux membres blessés de l’équipe de train, ont travaillé dans des circonstances difficiles et ont joué un rôle important en alertant les autorités, en offrant de l’aide et du réconfort aux membres de l’équipe de train qui étaient coincés, et en appuyant l’intervention initiale de la Gendarmerie royale du Canada.

4.0 Mesures de sécurité

4.1 Mesures de sécurité prises

4.1.1 Transports Canada

Le 5 février 2019, des inspecteurs de Transports Canada (TC) ont réalisé un profil du site et fait une inspection exhaustive du chemin de fer de la baie d’Hudson (HBR). Durant cette inspection, on a constaté qu’après le déraillement du 15 septembre 2018, HBR avait révisé son plan de sécurité et son plan d’intervention d’urgence en ajoutant des mesures qui tiennent compte de déraillements. On a aussi noté que HBR allait acheter de l’équipement de communication et mettre à niveau son équipement actuel.

Étant donné que l’accident à l’étude a causé une perte de vie et des blessures graves à des employés à bord, TC a mené, au nom d’Emploi et Développement social Canada et conformément au protocole d’entente conclu entre les 2 parties, une enquête parallèle à celle du BST.

4.1.2 Chemin de fer de la baie d’Hudson

Après l’événement à l’étude, HBR a inspecté les ponceaux dans toutes ses subdivisions. HBR a également remis sur pied son programme de gestion des populations de castors. Cette initiative comprend l’ajout d’équipement neuf, de personnel, de protocoles d’inspection et de formation pour tous les contremaîtres de la voie concernant ses directives relatives à l’inspection de la voie. En outre, HBR a embauché un spécialiste des ponts, ouvrages et ponceaux pour réaliser toutes les inspections prévues. Ce spécialiste assistera à toutes les inspections d’ingénierie effectuées par des tiers.

Le plan de sécurité et le plan d’intervention d’urgence de la compagnie ont été actualisés et comprennent désormais une section sur les interventions en cas de déraillement. Ces plans ont été mis en œuvre à l’échelle de la compagnie en avril 2019.

La compagnie a modifié sa politique de communication concernant l’exploitation dans une zone exempte de signalisation pour désormais exiger des équipes de train qu’elles communiquent avec le contrôleur de la circulation ferroviaire (CCF) toutes les heures. Si une équipe omet de le faire dans les 30 minutes, le CCF en avisera immédiatement un superviseur de HBR.

En avril 2019, HBR a actualisé son système de gestion de la sécurité (SGS) par l’ajout de modèles et de procédures de déclaration, ainsi que d’objectifs et d’initiatives de la compagnie mis à jour. Des postes de déclaration désignés ont été établis dans les postes d’enregistrement appropriés, avec des directives sur la documentation et les procédures à suivre. Le nouveau SGS comprenait également des comptes rendus sur la sécurité trimestriels et annuels de même que l’analyse des tendances.

HBR a mis en œuvre un nouveau programme de prévention des dangers. Dans le cadre de ce programme, en juin 2019, HBR a achevé une analyse des tâches en collaboration avec son comité de santé et sécurité.

HBR a élaboré un programme de formation préembauche en collaboration avec le Collège universitaire du Nord et le ministère de l’Éducation et de la Formation du Manitoba destiné aux nouveaux employés de la voie. Ce cours de 4 semaines comprend une formation spécifique sur la sécurité ferroviaire et de la voie.

HBR a mis en œuvre un programme d’orientation des nouveaux employés, et a mis en place un processus pour enseigner aux employés les procédures de sécurité de la compagnie. En outre, HBR a mis en œuvre un processus pour coordonner la formation ferroviaire additionnelle et les dates d’expiration de certification du personnel ferroviaire.

Le processus qui encadre les réunions de santé et sécurité a été actualisé. Un programme de formation pour les membres du comité a été mis en œuvre, qui comprend les mesures suivantes :

Le présent rapport conclut l’enquête du Bureau de la sécurité des transports du Canada sur cet événement. Le Bureau a autorisé la publication de ce rapport le . Le rapport a été officiellement publié le .

Annexes

Annexe A – Enquêtes du BST sur des affaissements de la couche supérieure de plateforme et des digues de castors

Rapport d’enquête ferroviaire R92T0183 du BST – En juillet 1992, un train de marchandises de la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada (CN) a franchi une couche supérieure de plateforme affaissée au point milliaire 135,0 de la subdivision de Caramat du CN, près de Nakina (Ontario). Dans cet événement, l’affaissement de la plateforme a été causé par une baisse soudaine du niveau d’eau dans un étang lorsqu’une digue de castors a cédé. Le train a roulé sur le segment de voie suspendu. Deux membres de l’équipe de train ont été mortellement blessés, et un 3e a été grièvement blessé.

Rapport d’enquête ferroviaire R97T0097 du BST – Le 7 avril 1997, une dépression dans la voie à la hauteur du point milliaire 44,8 de la subdivision de Parry Sound, près de Pointe au Baril (Ontario), a entraîné le déraillement de 4 locomotives et de 14 wagons d’un train de marchandises du Chemin de fer Canadien Pacifique (CP). L’affaissement de la couche supérieure de plateforme est attribuable à des pressions hydrostatiques créées par la présence d’une digue de castors. Un des membres de l’équipe de train a été grièvement blessé et 2 autres ont subi des blessures légères. On a constaté que le sable meuble du remblai avait contribué à l’affaissement de la couche supérieure de plateforme. La voie est demeurée intacte et suspendue au-dessus de la dépression, ce qui a permis au système de cantonnement automatique de continuer à fonctionner alors que le train s’approchait du lieu de l’affaissement.

Rapport d’enquête ferroviaire R97T0200 du BST – Le 18 juillet 1997, la plateforme s’est effondrée au point milliaire 195,75 de la subdivision de Bala du CN. L’effondrement s’est produit à un endroit où un pont avait été remplacé par un ponceau et du remblai tout-venant. Une importante digue de castors en amont, qui n’était pas visible à partir de l’emprise, a cédé, ce qui a entraîné l’écoulement d’un important volume d’eau vers la voie. L’eau s’est écoulée à travers la plateforme et le ponceau et les a emportés, ce qui a laissé la voie suspendue au-dessus de l’espace vide. Aucun train n’a été endommagé, car cet affaissement de la couche supérieure de plateforme a été détecté par des employés de l’entretien de la voie avant le passage d’un train.

Rapport d’enquête ferroviaire R09H0006 du BST – Le 3 juin 2009, 2 locomotives et 7 wagons d’un train de marchandises du Ottawa Valley Railway ont déraillé au point milliaire 60,1 de la subdivision de North Bay, près de Hodgson (Ontario). Les locomotives se sont reversées, ce qui a causé des blessures légères aux membres de l’équipe de train. Les fortes chutes de pluie durant la semaine avant l’accident, qui avaient fait augmenter le ruissellement et l’accumulation d’eau souterraine, ont contribué à l’affaissement. L’augmentation du niveau d’eau dans 3 étangs de castors en amont a causé la rupture d’un segment de 15 pieds de l’une des digues de castors. Cela a entraîné le déversement d’un important volume d’eau et créé un effet de cascade lorsque 2 autres digues de castors ont cédé sous l’effet de l’eau qui s’écoulait vers l’aval. Un bassin s’est formé contre le talus amont de la plateforme de la voie lorsque le volume d’eau accumulé a excédé la capacité du ponceau. En conséquence, le niveau d’eau a augmenté rapidement et la voie a été inondée, emportant plusieurs segments de la couche supérieure de plateforme, mais laissant la voie intacte et non supportée.

Annexe B – Autres enquêtes du BST sur des affaissements de la couche supérieure de plateforme

Rapport d’enquête ferroviaire R94W0101 du BST – En avril 1994, un train de marchandises de la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada (CN) est arrivé à la hauteur d’une dépression causée par un emportement par les eaux au point milliaire 91,0 de la subdivision de Kinghorn, près d’Orient Bay (Ontario). Deux membres de l’équipe de train ont été grièvement blessés, et 1 autre a été légèrement blessé. On a attribué l’affaissement de la plateforme à l’infiltration d’eau et à l’affaiblissement des limons et des argiles lacustres glaciaires. La voie était demeurée intacte et suspendue au-dessus de la dépression sans porter atteinte à la méthode de commande des trains par système de régulation de l’occupation de la voie en place.

Rapport d’enquête ferroviaire R97V0063 du BST – Le 26 mars 1997, une grande dépression dans la plateforme à la hauteur du point milliaire 106,15 de la subdivision d’Ashcroft, près de Conrad (Colombie-Britannique), a fait dérailler un train de marchandises du CN. Les 2 membres de l’équipe de train ont été mortellement blessés. Le Bureau a déterminé que le volume exceptionnel d’eau de ruissellement attribuable à la fonte de l’épaisse couche de neige et à de fortes précipitations saisonnières qui s’était accumulé au-dessus de la route transcanadienne adjacente n’a pas été capté et évacué comme prévu par le système de drainage. L’eau a pénétré dans le sol, a migré à travers les remblais de la route et s’est infiltrée dans la couche supérieure de plateforme, entraînant sa déstabilisation. La couche supérieure de plateforme n’a pu résister à la pression d’eau interstitielle qui en a résulté et elle s’est affaissée.

Rapport d’enquête ferroviaire R13E0069 du BST – Le 28 avril 2013, 17 wagons chargés de potasse d’un train de marchandises du Chemin de fer Canadien Pacifique (CP), roulant vers l’ouest de Wilkie (Saskatchewan) à Hardisty (Alberta), ont déraillé au point milliaire 80,7 de la subdivision de Hardisty, près de Provost (Alberta). La voie a été détruite sur une distance d’environ 350 pieds. Il n’y a eu aucun blessé.

Le déraillement s’est produit quand le train a franchi une irrégularité de la voie causée par un affaissement de la couche supérieure de plateforme. La plateforme s’élevait à environ 10 pieds au-dessus du terrain environnant; elle avait été construite au début du 20e siècle avec du sable, du gravier et des argiles locaux. Bien que la couche supérieure de plateforme ait été compactée au fil des ans par le passage des trains, elle était demeurée vulnérable à l’infiltration d’eau. En raison de la capacité limitée du système de drainage et de l’exposition au sud, le niveau d’eau est demeuré plus élevé sur le côté sud de la voie par rapport au côté nord, ce qui a entraîné une infiltration et une saturation en eau anormales dans la couche supérieure de plateforme de la voie.

Rapport d’enquête ferroviaire R13W0124 du BST – Le 28 avril 2013, un train de voyageurs de VIA Rail Canada Inc. (VIA Rail) qui circulait vers le nord a franchi un affaissement de la plateforme au point milliaire 83,55 de la subdivision de Togo du CN, près de Togo (Saskatchewan). Les 2 locomotives et les 2 wagons de tête ont déraillé. L’effondrement du remblai a été causé par la saturation en eau et l’accumulation d’une pression d’eau interstitielle excessive dans les matériaux de remblayage hydrosensibles qui ont suivi une fonte rapide des neiges et un drainage inadéquat en raison de la formation d’un bouchon de glace à la sortie du ponceau. Le ponceau gelé obstruait la surface de drainage, causant des accumulations d’eau dans le fossé amont et créant une charge hydraulique excessive dans le corps du ponceau et la structure du puits vertical. La charge hydraulique excessive sur la chute et les trous de rivet du ponceau qui présentaient des fuites a entraîné une élévation de la surface piézométrique dans le remblai, le rendant plus vulnérable aux glissements de terrain.

Rapport d’enquête ferroviaire R15H0092 du BST – Le 1er novembre 2015, un train de marchandises du Huron Central Railway roulait vers l’ouest à 25 mi/h sur la subdivision de Webbwood quand un freinage d’urgence provenant de la conduite générale s’est déclenché au point milliaire 72,08, près de Spanish (Ontario). Deux groupes distincts de matériel roulant ont déraillé : 3 locomotives et 8 wagons en tête, et 5 wagons près du milieu du train. Quelque 225 pieds de plateforme de la voie ont été détruits. Aucune marchandise dangereuse n’a été en cause et personne n’a été blessé.
La saturation en eau à l’intérieur du remblai a réduit la cohésion et la stabilité du matériau de la couche supérieure de plateforme, affaiblissant la capacité de la voie à supporter les trains à leur passage. L’instabilité de la plateforme, de concert avec les charges d’impact des roues des wagons amplifiées par les joints non décalés, avait augmenté les déflexions à la hauteur des joints de rail, amorçant ainsi des fissures de fatigue à l’intérieur des éclisses.

Rapport d’enquête ferroviaire R18W0168 du BST – Le 5 juillet 2018, alors qu’il circulait à 33 mi/h, un train de voyageurs de VIA Rail est arrivé à la hauteur d’un emportement par les eaux dans un endroit éloigné, au point milliaire 23,60 de la subdivision de Turnberry du CN. Les 2 locomotives de tête ont déraillé et se sont immobilisées sur le côté. L’équipe a envoyé un message radio d’urgence et informé le contrôleur de la circulation ferroviaire du déraillement et de son besoin d’aide, l’endroit étant inaccessible par la route. Les 2 membres de l’équipe de conduite ont été légèrement blessés et ont reçu des soins à l’hôpital local. Il n’y a eu aucun autre blessé.

Pour assurer le drainage des eaux des collines Pasquia, 2 ponceaux d’environ 30 pieds de long et de 8 pieds de diamètre chacun sont orientés d’ouest en est sous la route 9, au kilomètre routier 37. À la suite des fortes pluies reçues dans le secteur durant la semaine avant l’événement, les ponceaux sous la route ont commencé à accumuler des débris forestiers. Ces débris ont causé une accumulation d’un important volume d’eau du côté ouest de la route. Avec la montée du niveau d’eau et l’augmentation connexe de la pression hydraulique, l’écoulement des eaux a fini par dépasser la capacité des ponceaux. La route et les ponceaux ferroviaires ont été emportés par les eaux.

La route ayant été emportée, l’excédent d’eau s’est répandu en surface; l’emprise ferroviaire a été inondée entre 2 emplacements de ponceaux ferroviaires (soit aux points milliaires 23,53 et 24,23). Le volume d’eau accru a fini par dépasser la capacité des ponceaux ferroviaires (dont 3 avaient un diamètre de 3 pieds, et 1, un diamètre de 2,5 pieds) et a commencé à filtrer à travers la couche supérieure de plateforme de la voie. Avec le temps, la plateforme a été emportée par les eaux; la voie, qui n’était plus supportée à l’endroit où l’événement s’est produit, a causé le déraillement.